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Quel avenir pour l'opposition syrienne: victoires militaires, défaites politiques?

Alors qu'elle dispose de moyens modestes qui restent sans commune mesure avec ceux de l'armée de Bashar al-Assad et qu'elle gagne progressivement du terrain face aux forces loyalistes, elle n'arrive pas à transformer en acquis durables et solides ses succès.
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AFP

L'opposition syrienne représente un paradoxe.

En effet, alors qu'elle dispose de moyens modestes qui restent sans commune mesure avec ceux de l'armée de Bashar el Assad et qu'elle gagne progressivement du terrain face aux forces loyalistes (bien que ces dernières mènent d'importantes contre-offensives ces dernières semaines), elle n'arrive pas à transformer en acquis durables et solides ses succès, ce qui permettrait de gagner la bataille de l'image et concomitamment de s'imposer politiquement, tant au niveau international que national.

Certes, cette situation est en partie le fait du régime syrien qui a tout tenté pendant des décennies pour morceler, briser et décrédibiliser l'opposition, qui de son côté a multiplié les erreurs stratégiques, et en particulier celle de Hama en 1982, ce qu'elle a par la suite admis. Il est donc logique que son unité prenne du temps, car il n'y a jamais eu d'opposition véritablement homogène, et si les Frères musulmans ont depuis toujours constitué un mouvement solide avec d'importants relais dans la société, ils n'ont jamais pu agréger à eux le reste des forces anti-Assad sur fond de différents idéologiques et de rivalités de personnes.

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Les armes artisanales des rebelles en Syrie

Rappelons que dans les pays où les révolutions arabes ont entraîné un changement à la tête du pays, l'opposition était globalement unie et on avait en tout cas une force dominante avec un chef incontesté comme avec les islamistes d'Ennahda en Tunisie ou les Frères musulmans en Égypte. La crise syrienne fait donc figure d'exception à plus d'un titre, par sa durée, sa violence, sa dimension internationale ou son absence d'opposition unie et crédible.

Mais l'autre explication principale de ces divisions profondes et peut-être fatales, tient au manque d'homogénéité flagrant des soutiens et "parrains" extérieurs de l'opposition, les "Amis de la Syrie", principalement constitués de nations occidentales et de pays arabes (en majorité des monarchies) hostiles aux ambitions iraniennes et chiites. Les agendas sont en effet très divers avec la volonté de certains d'imposer un futur État islamique, tandis que d'autres le préféreraient laïque et respectueux de la diversité ethnico-religieuse du pays. On peut par ailleurs noter que l'on a d'un côté un pouvoir minoritaire, mais plutôt homogène, soutenu par des États également minoritaires (Liban, Irak, Iran) au sein de l'espace arabo-musulman, principalement sunnite, mais justement fortement unis pour mieux résister face à ceux qui tentent de limiter leur influence nouvelle, ce qui leur confère une cohésion plus forte.

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Camps de réfugiés en Syrie

Des lors, on voit mal comment cette opposition morcelée, aussi bien sur le terrain que politiquement, pourrait sérieusement menacer le pouvoir baathiste, d'autant plus qu'elle n'arrive toujours pas à se trouver un chef, Moaz Al Khatib ayant confirmé pour la seconde fois en moins de deux mois qu'il démissionnait, révolté par l'inaction des "Amis de la Syrie" (alors qu'il était probablement le plus crédible et le plus clairvoyant des différents leaders qui se sont succédé depuis 2011 pour tenter de faire partir Bashar al-Assad).

Mais inversement, et puisque l'on en est pas un à un paradoxe près, on peut penser que les récentes déclarations du Front Al Nosra, faisant allégeance à Al Qaïda, terribles pour l'opposition « modérée » incarnée par la Coalition nationale syrienne peuvent clarifier les choses et lui offrir les moyens de définir ce qu'elle accepte et ce quelle refuse, voire d'unifier dans un large front nationalistes laïcs et religieux conservateurs et sur le terrain les différents mouvements armés regroupés sous le label "ASL", qui comportent un nombre non négligeable de combattants islamistes qui ne sont pas prêts pour autant à passer sous la bannière du djihadisme terroriste transnational. Cette crise importante peut se révéler une chance pour l'opposition. À elle d'en tirer les leçons et d'approfondir son laborieux processus d'unification, sans quoi elle restera encore et pour longtemps aux portes du pouvoir.

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