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Les évaluations environnementales ne freineront plus l'exploitation des ressources naturelles...

On connaît la propension des politiciens à se placer sous les feux de la rampe et à s'attribuer les bonnes nouvelles. Est-ce à dire que lorsqu'un ministre ne se présente pas à une conférence de presse qui le concerne, la nouvelle est mauvaise pour son ministère? C'est ce qu'on serait porté à croire de l'absence du ministre de l'environnement fédéral à la conférence de presse donnée le 17 avril dernier par son collègue des Ressources naturelles.
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On connaît la propension des politiciens à se placer sous les feux de la rampe et à s'attribuer les bonnes nouvelles. Est-ce à dire que lorsqu'un ministre ne se présente pas à une conférence de presse qui le concerne, la nouvelle est mauvaise pour son ministère? C'est ce qu'on serait porté à croire de l'absence du ministre de l'environnement fédéral à la conférence de presse donnée le 17 avril dernier par son collègue des Ressources naturelles et qui portait sur un plan de simplification des... évaluations environnementales fédérales.

C'est en effet à Joe Oliver, le ministre des Ressources naturelles, que Stephen Harper a confié la mission de présenter, dans une usine de fabrication de revêtement pour les oléoducs et les gazoducs, le canevas du volet de son Plan d'action économique 2012 portant sur l'environnement. M. Oliver aurait tout aussi bien pu faire siennes les paroles de la ministre péquiste de l'Énergie Rita Dionne-Marsolais, (qui déclarait à l'automne 2002 au sujet de l'exploration pétrolière dans le golfe que « les facteurs environnementaux ne doivent pas freiner le développement économique »), puisque sa mission consistait à vendre une simplification « d'un lourd système d'examen qui entraîne des retards, des chevauchements avec les processus d'autres gouvernements et des délais imprévisibles » « afin d'appuyer le développement responsable des ressources ».

Outre le fait qu'il faudra attendre le projet de loi pour avoir une idée plus claire de la portée de la réforme, que dire de ce canevas? Tout d'abord qu'il réduit de façon significative l'implication du fédéral en matière d'évaluation environnementale et s'étend même aux autorisations de la Loi sur les pêches.

Se concentrer sur les « grands projets »

L'objectif avoué de la réforme est de permettre la réalisation accélérée de « plus de 500 » projets des secteurs minier et énergétique au cours des 10 prochaines années. Sans en définir encore clairement la nature, Joe Oliver divise les projets en « grands » et « petits » projets en expliquant que, dorénavant, seuls les « grands » feront l'objet d'une évaluation environnementale fédérale.

Pour les « grands », il fournit ainsi une liste de projets comprenant une exploitation de sables bitumineux, un développement pétrolier en mer, une mine d'or, un oléoduc et des gazoducs. Les « petits » cités en exemple comme étant « pris dans l'engrenage du processus fédéral » vont de « la construction d'une station de pompage pour l'agrandissement d'une érablière » au « remplacement d'un ponceau existant sous une chaussée en remblai », en passant par l'agrandissement d'une usine de margarine.

Accélérer le processus et déléguer aux provinces

La réforme placera la responsabilité des évaluations environnementales au sein de trois organismes, l'Agence canadienne d'évaluation environnementale « pour la plupart des projets », l'Office national de l'Énergie et la Commission canadienne de sûreté nucléaire « pour les projets qui relèvent de leurs mandats ». On peut se demander si l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, dont le budget vient d'être amputé, sera en mesure d'accomplir son mandat. Néanmoins, ces organismes se verront imposer un délai limite pour rendre leur décision (24, 18 ou 12 mois) et ces délais « s'appliqueront au gouvernement et non aux promoteurs de projets ».

Il est spécifiquement précisé qu'en ce qui a trait « aux grands projets de pipeline d'intérêt national », la réforme « conférera au gouvernement le pouvoir décisionnel d'approuver ou de rejeter de tels projets, sur la recommandation de l'Office national de l'Énergie ». Le gouvernement Harper manifeste ainsi son intention de veiller de près au bon cheminement des projets pétroliers chers à son cœur comme celui de Northern Gateway, qui pourra bénéficier du nouveau processus qui sera rétroactif.

D'autre part, l'environnement étant une compétence partagée entre le fédéral et les provinces, il existe donc un chevauchement entre les procédures fédérales et celles des paliers provinciaux. Présentement, ce chevauchement varie en fonction des ententes conclues entre les gouvernements, mais implique généralement plutôt l'application conjointe des processus qu'une véritable harmonisation. Le ministre des Ressources naturelles annonce donc que le fédéral pourra procéder à une véritable délégation de pouvoirs aux provinces lorsque le processus provincial respectera les exigences de la loi fédérale.

Punir plus sévèrement les fautifs et museler les groupes environnementaux

En accord avec sa philosophie générale qui consiste à châtier les fautifs, le gouvernement Harper annonce aussi une série de mesures pour renforcir le contrôle l'application des lois. Mentionnons parmi celles des pénalités administratives pécuniaires, des « énoncés de décision exécutoires », une augmentation du nombre d'inspection des oléoducs et gazoducs et un nouveau règlement sur le régime de sécurité des pétroliers. Même en faisant abstraction des délais requis pour les mettre en place, ces mesures en théorie intéressantes, seront toutefois tributaires du bon vouloir des autorités. Succomberont-elles à l'approche client trop souvent adoptée par les émules de Jacques Brassard?

L'aspect qui a le plus été dénoncé par les groupes environnementaux est évidemment le critère restreignant au « public directement touché » la participation citoyenne. Si le ministre Oliver s'est gardé de définir la portée de cet « intérêt direct », on garde encore en mémoire sa déclaration de janvier lorsqu'il s'en était pris aux défenseurs de l'environnement « et autres groupes radicaux » qu'il accusait d'être financés par « des groupes d'intérêts étrangers ». On peut donc comprendre que les citoyens auront le fardeau de démontrer un intérêt certain pour pouvoir intervenir, à la manière de l'exigence pour certains recours civils.

Finalement, un autre des points troublants demeure le rôle que jouera le ministre des Ressources naturelles dans l'administration du processus d'évaluation environnementale. Deviendra-t-il la principale «autorité responsable» au sens de la loi ?

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