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Que veut Vladimir Poutine?

Après le déploiement d'un système anti-missile russe en Ukraine et le regain de tension entre ces deux mêmes pays dans le Donbass, la question qui se pose est de savoir ce que recherche Vladimir Poutine.
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Il est toujours facile de prendre de cours la communauté internationale en pleine torpeur estivale. Après le déploiement d'un système anti-missile russe en Ukraine et le regain de tension entre ces deux mêmes pays dans le Donbass, la question qui se pose est de savoir ce que recherche Vladimir Poutine.

Une expansion territoriale en vue?

Vladimir Poutine, dont le pays a déjà beaucoup souffert des sanctions imposées notamment par l'Union européenne, est sur tous les fronts, notamment dans le conflit en Syrie où il affirme vouloir combattre l'État islamique mais où il fait le jeu du dirigeant Bachar El-Assad.

Toutes les hypothèses sont évoquées, sauf dit-on, un coup de force qui mettrait Poutine dans une position très précaire vis-à-vis tant de l'Union européenne que des États-Unis. Le président russe s'est, la semaine dernière, rapproché de la Turquie en recevant en grande pompe M. Erdogan à Saint-Pétersbourg pour enterrer la hache de guerre, à la suite de la mort d'un pilote russe en Syrie au mois de novembre 2015.

Tant M. Erdogan que Vladimir Poutine avaient besoin de cette réconciliation essentiellement d'ailleurs pour rétablir les échanges économiques et commerciaux qui avaient connu une baisse sensible depuis cet incident, bien vite oublié face aux contraintes de la Realpolitik menée par le Kremlin.

Le rattachement illégal de la Crimée à la Russie

Il s'agit pour Vladimir Poutine de garder sa position stratégique, surtout dans cette partie du continent qui est essentielle pour la Russie. Il en va de même pour l'Ukraine, pays à propos duquel il ne semble pas décidé à admettre la légitimité du président Poroshenko. S'agissant de la Crimée, aujourd'hui annexée de fait à la Russie, la violation du droit international est avérée. Par une délibération des Nations Unies du mois de mars 2014, l'assemblée générale a affirmé que le référendum organisé dans cette partie de l'Ukraine par les représentants du gouvernement russe ainsi que dans la ville de Sébastopol n'avait "aucune validité".

De fait, cela reste aujourd'hui la position de l'Union européenne, des Nations Unies et de la communauté internationale dans son ensemble même si le conseil de sécurité des Nations Unies, saisi de cette agression territoriale, avait refusé de condamner la Russie à cause... Du veto russe.

Ce n'est pas la triste échappée parlementaire française du 31 juillet, qui aurait été financée par la Fondation russe pour la paix selon un grand quotidien, qui changera quelque chose à cette violation du droit international. Il est tout à fait dommageable que des députés et sénateurs aient cru bon de prendre le contre-pied de la politique officielle de la France en estimant qu'il fallait prendre acte de ce que la Crimée était aujourd'hui russe et en affirmant qu'il convenait de "passer à autre chose".

Toutefois, les Nations Unies n'ont pas fermé la porte à une solution politique, bien au contraire. Cette résolution affirme de façon prudente que le conflit doit être réglé pacifiquement, que le dialogue politique doit s'instaurer entre les parties et qu'il convient de donner sa chance aux négociations internationales.

Trouver une solution politique et démocratique

S'il convient de prendre compte le fait que la grande majorité de la population de Crimée est russophone et que la revendication d'une république autonome de Russie pourrait être envisageable, au nom du droit à l'autodétermination des peuples, alors cela ne peut que résulter d'un processus démocratique, avec l'organisation d'un référendum contrôlé par des observateurs internationaux, notamment de l'ONU ou de l'OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe). Le droit à l'autodétermination pourrait d'ailleurs aller jusqu'à la proclamation d'un nouveau pays qui serait indépendant tant de l'Ukraine que de la Russie...

Pour l'heure, la Crimée reste une région de l'Ukraine et doit le rester. Le coup de force ne saurait faire acte de politique à long terme, sauf à renier les principes qui ont fondé l'Organisation des Nations Unies jusqu'à aujourd'hui. Car M. Poutine n'aime pas les états indépendants qui pourraient être regardés comme appartenant à l'ancien glacis soviétique.

Ce qui vaut pour l'Ukraine vaut aussi pour le Donbass et les deux régions séparatistes que sont les Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk.

Pour bien comprendre M. Poutine, dont certains psychiatres l'ayant examiné à distance ont estimé qu'il n'était pas toujours dans un état normal, il convient de prendre en compte deux facteurs: il vient du KGB dont il fut un des derniers élèves, donc il ruse jusqu'au bout et cherche les rapports de force. Il continue aussi à mener la politique du glacis selon laquelle les territoires proches de la Russie doivent rester en droit ou en fait sous son contrôle...

Les rapports qu'il peut ainsi entretenir avec les chefs d'État et de gouvernement importent peu au final. Un diplomate de l'ambassade d'Allemagne aime ainsi raconter que lors d'une visite officielle en France, la chancelière allemande Angela Merkel, avait fait arrêter le convoi des véhicules qui l'accompagnait en plein Paris pour entamer une conversation en russe avec Vladimir Poutine. La relation spéciale qu'elle entretient avec lui aurait ainsi facilité la résolution des difficultés rencontrées avec l'Europe. Qu'on ne s'y trompe pas. Une telle relation spéciale est illusoire, l'ambition de M. Poutine étant seulement de défendre l'intérêt de son pays. De surcroît, il se pourrait que Mme Merkel ne soit plus aux commandes de son pays en septembre 2017.

Ce qui vaut pour l'Ukraine vaut aussi pour le Donbass et les deux régions séparatistes que sont les Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk. M. Poutine qui renforce son pouvoir dans cette région n'acceptera pas plus que ces deux républiques s'émancipent du giron russe. M. Poutine veut tout et d'ailleurs, il souffle le chaud et le froid sur les accords de Minsk II de février 2015 qui ouvraient aussi une perspective de règlement pacifique de ce conflit.

Réintroduire les États-Unis dans le règlement du conflit?

Là aussi, les armes parlent plus que ne s'exprime le dialogue politique. M. Poutine a fait savoir ces derniers jours que la discussion "format Normandie" (Poutine, Poroshenko, Merkel, Hollande) envisagé lors de la réunion du G20 en Chine au mois de septembre, n'avait plus de raison d'être, signe d'ailleurs que la relation Poutine-Merkel n'est plus ce qu'elle était censée être.

En effet, sauf à donner plus de poids qu'il convient à nos deux pays, le" format Normandie" n'apparaît pas le plus approprié pour régler cette affaire. Ce format devrait être élargi à Barack Obama et un représentant des Nations Unies.

Avec M. Poutine, qui prépare les élections parlementaires puis, en 2018, sa candidature à sa propre réélection, tout est possible. Il bénéficie du soutien de sa population. Il convient donc de ne pas baisser la garde et de se porter garant de l'intégrité territoriale de l'Ukraine tant qu'un règlement pacifique et négocié démocratiquement et dans le respect de la souveraineté de l'Ukraine, n'aura pas été apporté à ce conflit. Il est vrai: il a le temps pour lui. En 2017, Angela Merkel et François Hollande pourraient être partis. Quant à Obama, il appartient déjà à l'Histoire...

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Mai 2017

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