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Xi Jinping est-il en train de se hisser au niveau de Mao?

Ce n'est pas rapporté dans les médias chinois, mais des rumeurs font état de plusieurs complots déjoués contre le président Xi.
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En mars dernier, l'Assemblée consultative du peuple a déclaré soutenir
Jason Lee / Reuters
En mars dernier, l'Assemblée consultative du peuple a déclaré soutenir

Xi Jinping est-il en train de se hisser au niveau des plus grands leaders chinois? Depuis près de deux ans, il m'est apparu évident que le président chinois s'apprête à franchir un pas qu'aucun de ses prédécesseurs n'avait osé franchir depuis Mao Zedong. Je peux me tromper, bien sûr. Mais j'ai testé ma théorie auprès de certains intellectuels chinois qui l'ont trouvé plausible. Je crois que Xi Jinping ne renoncera pas au pouvoir suprême, en 2022. Vous direz que 2022 est loin, mais les successions en Chine, depuis Deng Xiaoping, se préparaient cinq ans à l'avance, au moins. Le Congrès du Parti communiste qui se déroule cette semaine aurait dû identifier des successeurs potentiels. Ainsi, en 2007, on savait déjà que Li Keqiang et Xi Jinping prendraient le haut du pavé en 2012. Cette année, aucun leader désigné ou putatif n'émerge.

Au-delà du fait que ma théorie se trouve ainsi partiellement validée, d'autres signes allant dans le même sens sont apparus récemment. Celui que les médias appellent encore parfois le Camarade Xi Jinping place ses alliés un peu partout. À cet égard, le sort de Wang Qishan, principal allié du président Xi dans sa campagne anticorruption sera fort indicatif. Wang, qui aura 70 ans l'an prochain, devrait se retirer selon les règles informelles actuelles. Mais l'ancien maire de Beijing, qui a liquidé politiquement plusieurs « tigres » (c'est-à-dire des hauts dirigeants corrompus) depuis 2013 est un pilier du régime de Xi Jinping et, s'il demeure en poste, ce sera, à mon avis, un signe additionnel de la volonté de l'administration actuelle de se perpétuer. Les médias spéculent ouvertement sur le sujet, ce qui, en d'autres circonstances, n'est jamais permis dans la presse chinoise. Cela aussi est un signe que quelque chose se prépare. Ainsi, le Président Xi, qui aurait 70 ans en 2023, devrait normalement, lui aussi, se retirer au terme du prochain mandat (mars 2023). Le prolongement, maintenant, du mandat de Wang deviendrait alors un utile précédent...

Ce n'est pas rapporté dans les médias chinois, mais des rumeurs font état de plusieurs complots déjoués contre le président Xi.

On verra... mais des déductions logiques semblent pointer vers une volonté de quasi-permanence au pouvoir de l'équipe dirigeante actuelle. On imagine facilement que la lutte à la corruption, qui a mené à des milliers d'emprisonnements, de cadres tant au sein du Parti communiste que de l'Armée, et à la perte de milliards de dollars en argent et biens mal acquis, a créé une longue liste d'ennemis à Xi Jinping et ses alliés. Ce n'est pas rapporté dans les médias chinois, mais des rumeurs font état de plusieurs complots déjoués contre le président Xi.

Dans ce contexte, la mainmise sur le pouvoir, autant par souci de préservation personnelle que de continuité politique, n'est-elle pas la meilleure stratégie? De l'extérieur, on a tendance à percevoir le Parti communiste chinois comme un monolithe, mais quiconque connait son histoire non romancée sait que, de tout temps, depuis sa fondation, diverses factions se sont affrontées, d'abord pour diriger l'œuvre révolutionnaire, ensuite pour gouverner et mettre en place l'utopie communiste et, plus récemment, pour profiter du système et des réformes économiques et s'enrichir de façon colossale.

Dérive maoïste vers culte de la personnalité

Rien n'arrive par accident en Chine! Il y a quelques mois, le quotidien de l'Armée a qualifié le président Xi Jinping de 领袖(Lǐngxiù) que l'on pourrait traduire par « noyau dur » ou « noyau central » du régime. C'est un terme qui par le passé a été réservé à Mao et un ou deux autres leaders révolutionnaires dits de la « première génération ». Ces leaders ont dirigé le pays ou tiré les ficelles de 1949 jusqu'à leur mort.

Des campagnes récentes mettent l'accent sur l'exigence et le devoir absolu de loyauté de l'Armée et des fonctionnaires, de même que les enseignants et les médias, contrôlés par l'État directement ou indirectement, via la censure.

Ce qui est ironique est que, dans la mesure où on peut présentement déceler une dérive autoritaire de type maoïste, cela est justement une accusation politique qui avait été portée contre Bo Xilai, fils d'un père de la Révolution et rival de Xi Jinping, lorsque Bo a été arrêté au début de 2013, au milieu d'un scandale digne d'un mauvais roman policier, impliquant son épouse et le chef de police de Chongqing, la ville de 35 millions d'habitants dont Bo était le responsable politique. Cette affaire de meurtre d'un homme d'affaires britannique, lié de diverses façons à la famille de Bo, était sordide de tout point de vue, mais, dans l'océan de corruption où baignent de nombreux cadres, Bo Xilai était un bien petit poisson du point de vue des accusations de nature financière portées contre lui, par contre, politiquement, un rival de taille était mis hors circuit. Et, comme par hasard, les alliés de Bo sont tous passés à la moulinette judiciaire...

Plusieurs historiens de la Chine moderne diront que Mao avait manigancé la Révolution culturelle pour éliminer ses rivaux politiques et regagner l'influence qu'il perdait, alors qu'on l'écartait de plus en plus du pouvoir. À ce compte, si on compare ce qui se produit présentement à tous les dérapages de la Révolution culturelle et à la décennie de stagnation politique et économique qu'elle entraîna, on trouvera que la révolution en voie de se produire en Chine en est une bien tranquille...

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