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Le Bitcoin à «7000» : Acheter ou vendre? 

Au début de 2017, le bitcoin « ne » valait que 1000 dollars l'unité.
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La question qu'on pourrait se poser valablement est : trouve-t-on dans l'histoire financière moderne des exemples de progression aussi foudroyante de la valeur d'une monnaie ?
Dado Ruvic / Reuters
La question qu'on pourrait se poser valablement est : trouve-t-on dans l'histoire financière moderne des exemples de progression aussi foudroyante de la valeur d'une monnaie ?

Vous avez peut-être déjà investi de l'argent dans le bitcoin. Ou vous avez des amis qui vous ont expliqué qu'ils avaient de l'or entre les mains. Vous avez suivi la conférence d'un connaisseur mondialement reconnu de l'art de l'enluminure en Bulgarie à la fin du IXe siècle qui vient de passer avec armes et bagages dans le Nouveau Monde numérique et qui hante les salles de conférence pour proclamer l'arrivée de la monnaie des monnaies numériques.

Mais surtout, vous ne voulez pas laisser passer la chance. Voici les deux premières questions, incontournables sur le sujet.

1- Le cours de change du bitcoin peut-il encore progresser?

Dans les lignes qui suivent, on fera comme si le Bitcoin était une monnaie. C'est ce que prétendent ses adorateurs. C'est la seule justification « économique » de son existence. Parce que de nombreux commerçants l'acceptent, parce que les hackers l'imposent dans leurs ransomwares, le Bitcoin aurait acquis légitimité et acceptabilité. La réalité est bien loin de ce conte de fées et les communiqués victorieux qui annoncent qu'un vendeur d'appartements à Abu Dhabi a décidé d'accepter des paiements en Bitcoin comme viennent de le faire les vendeurs de hot-dogs au fin fond de l'Arizona ou même des chaines de magasins de luxe en Suisse ne suffisent pas à lui conférer un solide statut monétaire.

Néanmoins, on peut se poser la question de l'évolution de son cours de change.

Au début de 2017, le bitcoin « ne » valait que 1000 dollars l'unité. Le 5 novembre, au moment où ces lignes sont écrites, il en vaut 7500. Autrefois, il y a 6 ans, on culminait à 0,25. Il n'a donc cessé de monter et la courbe de son cours s'inscrit dans une magnifique asymptote. Les arbres ne montent pas jusqu'au ciel ? Tout est question d'échelle et si on se réfère à une évolution sur les seuls derniers trois mois, on ne parle plus que d'un doublement...

La question qu'on pourrait se poser valablement est : trouve-t-on dans l'histoire financière moderne des exemples de progression aussi foudroyante de la valeur d'une monnaie ?

La question qu'on pourrait se poser valablement est : trouve-t-on dans l'histoire financière moderne des exemples de progression aussi foudroyante de la valeur d'une monnaie ?

La réponse est négative définitivement ! Les monnaies, quand elles jouent vraiment leur rôle, c'est-à-dire, lorsqu'elles permettent de compenser les dettes et les créances nées des activités humaines qu'elles soient financières, commerciales, publiques ou privées ne peuvent pas connaître pareilles variations sauf à ruiner tous les flux d'échanges. Les relations économiques entre agents de quelques statuts que ce soient supposent des stabilités en tous genres dont la stabilité des unités de compte et dans l'ordre des échanges internationaux, la stabilité des cours des monnaies les unes vis-à-vis des autres.

Depuis que les Américains ont détaché le dollar de l'or et laissé aux marchés le soin de fixer le cours de leur monnaie, les cours des monnaies fluctuent, mais quand une monnaie perd ou gagne 10% ou plus, on s'effraie et on parle de crise : on n'a jamais vu de monnaies dont les cours explosent. En revanche, il est arrivé que les cours de certaines monnaies s'effondrent : par exemple le mark allemand au moment de la grande inflation de l'entre-deux-guerres. Aujourd'hui, il faudrait citer la monnaie vénézuélienne. Les cours des monnaies dégringolent en raison de l'effondrement de la contrepartie naturelle des monnaies : le PIB des pays qui les émettent. Ainsi la valeur de change d'une monnaie s'effondre soit parce que l'économie du pays concerné s'est effondrée, soit parce que la production monétaire propre à ce pays ne correspond plus à la réalité de son sous-jacent, la production de valeur, c'est-à-dire le PIB.

Or, le Bitcoin peut monter et descendre autant que ses partisans le souhaitent. Peu importe en réalité. Le bitcoin en effet n'est pas une monnaie : émis sans aucune contrepartie, ne devant son existence qu'à une soupe informatique de 0 et de 1, sa valeur n'est pas corrélée à la production de richesses d'aucun pays, bien qu'il se prétende « mondial » sans rien d'universel autre que les électrons des flux du système internet.

2- Si ce n'est pas une monnaie, c'est un actif financier : faut-il en acheter?

Ici, nous nous plaçons dans l'hypothèse de plus en plus répandue en vertu de laquelle le Bitcoin n'est pas une monnaie, mais un actif financier. On en achète pour protéger ses économies, pour en tirer des revenus ou pour profiter de l'évolution de ses cours (à la hausse). Les partisans du Bitcoin vous expliquent dans tous les sens que si vous voulez sauver votre argent du futur krach financier et bancaire que chacun annonce depuis deux ou trois ans, il vaut mieux ne pas déposer son argent en banque, il vaut mieux n'avoir pas d'actions ou tout autre support de valeur mobilière, il est infiniment préférable d'avoir sa « wallet » emplie de bitcoin. C'est mieux que l'or, c'est plus facile à transporter, etc.

Mais aussi, voilà un actif financier qui vient de faire « 7 fois » dans l'année et « 20 fois » dans les années qui précédent et même « 1000 fois » si on s'y est pris à temps. Il ne rapporte rien ? Ce n'est pas un argument « contre » : les taux d'intérêt pratiqués dans le monde ces temps derniers sont ridiculement bas ! Investir dans le bitcoin c'est prendre un ticket pour un avenir radieux de plus-values mirifiques. Alors, franchement, que le bitcoin ne rapporte rien est vraiment secondaire !

Ce serait idiot de l'acheter trop cher, mais ce serait encore plus bête de ne pas l'acheter s'il devait encore monter.

Mais voilà que vous vous trouvez en face des questions qui se posent chaque fois qu'un investisseur veut parier son argent sur une des cases de tapis vert. Vous en avez ou bien vous voudriez en avoir. Dans les deux cas, vous vous interrogez sur son prix. Ce serait idiot de l'acheter trop cher, mais ce serait encore plus bête de ne pas l'acheter s'il devait encore monter.

Or, vous connaissez ce qu'on nomme la loi des séries. Songez à tous ceux qui se mordent les doigts de ne pas avoir accepté d'être rémunérés en bitcoin, il y a deux ou trois ans : Lily Allen, chanteuse « bien connue », déclarait sans ambages : « I am an idiot ». Il y a cinq ans, elle avait refusé d'être rémunérée (petitement) en bitcoin ! Depuis, « ses bitcoins » auraient « fait » 20 fois !

Il faudra se renseigner un peu avant de sauter par-dessus le « janicule ». N'écoutez pas les gourous qui sévissent en France et dont on peut se demander s'ils ne prêchent pas pour leur paroisse : dans le domaine financier, il n'est pas interdit d'imaginer que les conseilleurs sont intéressés au résultat des cours : poussant les innocents à l'achat pour valoriser leurs propres actifs. Vieux truc et très classique, on verra plus loin que les Ponzi, le Stavisky, les Madoff et tous les gens de ce genre ont été des artistes de ces pratiques douteuses et spoliatrices.

Et en tout, en bourse comme en monnaies cryptées, il faut raisonner avec les Américains : c'est très clair, ils sont enthousiastes. Prenez Didi Taihuttu. Il a tout vendu. Tout. Pour acheter des bitcoins. Et il est sûr "that by 2020 his wealth with bitcoin will be worth by three to four times as much". En français, cela signifie que dans 3 ans, sa fortune aura été multipliée par 3 ou 4 et même plus. Il y a aussi Novogratz, un milliardaire américain qui investit massivement : pour lui, il faut s'attendre à 10 000 dollars le bitcoin dans un an au pire et 10 millions dans quelques années. En début novembre, il a fait 75% de la première étape !

Songez que le bitcoin a surpassé la capitalisation de Goldman Sachs (laquelle s'est déclarée enthousiaste vis-à-vis la « belle monnaie ».

Tous ne partagent pas ces enthousiasmes : ce sont surement (pour reprendre les commentaires des fans du Bitcoin) des représentants de la vieille banque et de la vieille finance, Jamie Dimon par exemple, le patron de JP. Morgan qui non content de clamer que les "stupid enough to buy [bitcoin] will pay the price for it one day" il a déclaré haut et fort que la reine des monnaies cryptées n'est qu'une « fraude ». Les pro-bitcoin ne le ratent pas dans leurs commentaires (dont la teneur intellectuelle se rapproche souvent des vociférations dans un stade de football) ! Et de caricaturer en riant que « Jamie a la trouille d'autant plus que Goldmann Sachs va lui piquer la bonne affaire ».

Alors ? On achète. Ou bien vendrait-on ?

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