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Retourne dans ton pays!

Avec le projet de loi C-31 conservateur sur l'immigration donnant au ministre des ultra-pouvoirs discrétionnaires pour renvoyer les demandeurs d'asile et les résidants permanents dans leurs pays, la terre de nos aïeux est en train de devenir celle de leurs adieux.
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Avec le projet de loi C-31 conservateur sur l'immigration donnant au ministre des ultra-pouvoirs discrétionnaires pour renvoyer les demandeurs d'asile et les résidants permanents dans leurs pays, la terre de nos aïeux est en train de devenir celle de leurs adieux.

On entendait déjà les critiques virulentes de certaines personnes envers ceux qui ne sont pas nés comme eux, à la clinique du coin, mais qui ont plutôt vu le jour ailleurs, dans des pays lointains. Ayant du mal à s'accommoder de notre société en perpétuels changements, ces enracinés du passé pensaient que virer les «autres» était le remède à tous leurs maux.

Le gouvernement conservateur réalise leurs rêves en déposant un projet de loi qui aura des conséquences radicales pour des centaines de milliers de réfugiés devenus résidants permanents.

Réfléchissons ensemble aux résultats d'un retour massif et forcé de tous ces immigrés que certains trouvent mal commodes. Que ferions-nous si tous ceux qui envahissent nos certitudes parce qu'ils ne nous ressemblent pas et peuplent nos esprits de doutes parce qu'ils ont d'autres habitudes que les nôtres devaient partir d'ici pour rejoindre la terre de leurs ancêtres?

L'exercice est plus facile que vous ne l'appréhendez et il est malheureusement très utile à une époque où dans nos contrées autoproclamées civilisées la crainte de l'étranger est un alibi politique et le ressentiment de l'autre est devenu le fond de commerce de personnages publics qui semblent se multiplier comme une famille d'écureuils venue s'installer dans l'érable du voisin.

Imaginez qu'on renvoie tous les étranges, tous les basanés, tous les pas comme vous, tous les autres que soi, de l'autre côté de l'océan, loin d'ici.

Comment pourrions-nous finir dignement le party et rafraîchir les gosiers asséchés, si le dépanneur ouvert 7/7 devait retrouver son bidonville pakistanais au lieu de nous vendre notre caisse de 24? Où irions-nous souper pas cher, si le buffet à volonté devait déménager ses plats exotiques de la banlieue de Laval à celle de Pékin? Comment ferions-nous pour arriver à l'heure si le chauffeur qui conduit d'une main de maître son taxi sur la neige comme s'il était sur les routes du Sri Lanka devait y retourner? Qui garderait nos enfants turbulents, si l'éducatrice bardée de diplômes et voilée de gentillesse qui s'en occupe chaque jour à 19 $/h devait repartir sur-le-champ aux portes du Sahara? Qui ramasserait nos jolis bleuets du Lac-Saint-Jean, nos belles fraises du Québec ou nos bons blés d'Inde de St-Hyacinthe, si notre main-d'œuvre bon marché devait retourner se tourner les pouces dans son désert sud-américain? Qui ferait le ménage de notre jolie petite unifamiliale si notre technicienne de surface payée au noir devait reprendre un aller simple pour son Soudan natal? Comment survivrions-nous si le pompiste yéménite s'en retournait faire sa prière au pays de ses ancêtres au lieu de tenir sa station ouverte 24 h sur 24?

La question de l'autre ne devrait jamais se poser. Jamais. Nous sommes tous liés. Nous venons tous de quelque part, vous d'ici, moi de là, eux d'ailleurs. Nous sommes tous l'autre de quelqu'un... d'autre. Et c'est ici que nous avons tous pris racine. C'est ici que nous voulons nous épanouir, grandir et fleurir. Pas ailleurs.

La loi C-31 de Jason Kenney, le ministre de l'Immigration, semble l'oublier.

La prochaine fois que quelqu'un, en entendant que je fais partie de la minorité audible, me dira avec finesse « ar'tourne dans ton pays », je lui demanderai de faire pareil.

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