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Aylan, le petit réfugié, est mort

Le drame était prévisible. L'horreur était évitable. Échoué sur une plage turque, le corps sans vie du petit Aylan vient peut-être de donner un visage aux milliers d'autres morts anonymes.
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Le choix des mots a son importance. Pour mieux comprendre, se faire une opinion, agir. Depuis quelques mois, on nous parle de la crise des «migrants». Un migrant selon le dictionnaire, c'est une «personne qui passe d'un pays à un autre». Ici, ils ne migrent pas, ils fuient. Ils ne passent pas, ils meurent. Et la crise est un drame humanitaire.

Venu de Kobané en Syrie avec son frère et ses parents, le petit Aylan aurait aimé retrouver sa tante installée au Canada depuis 20 ans. Sa famille faisait partie d'une procédure d'accueil qui permet aux citoyens canadiens de sponsoriser personnellement des réfugiés afin de les accueillir au pays. En juin, le ministère de l'Immigration de Stephen Harper a rejeté leur demande. Échoué sur une plage turque, le corps sans vie du petit Aylan vient peut-être de donner un visage aux milliers d'autres morts anonymes.

Les médias façonnent les opinions et influencent la marche du monde. Pour ne pas nous ébranler à l'heure du souper, ils nous montrent des bateaux photographiés de loin remplis de gens sans identité. Ils les appellent «les migrants». Les bateaux coulent, les barques s'échouent. Les milliers de «migrants» sans histoire se bousculent aux frontières de l'Europe, s'entassent dans des trains, se glissent sous les barbelés, étouffent écrasés dans des camions. Et les médias font froidement le décompte de ces morts sans nom.

On a commencé petit à petit à voir les visages de ces désespérés à la une des journaux. On se souvient de ce père en pleurs qui serre ses enfants contre lui en abordant enfin les côtes de sa terre promise. Ou le regard sombre de cet homme qui aide un enfant à passer sous un mur de barbelés.

Dans certains médias on ne parle enfin plus de «migrants », mais de «réfugiés». Un «réfugié», toujours selon mon dictionnaire, c'est une «personne qui a quitté son pays ou sa région d'origine afin d'échapper à un danger (catastrophe, persécutions, guerre, etc.)» C'est un peu court pour raconter la détresse, le désespoir, le bruit des bombes, les vies brisées, le chaos, le déracinement, la peur, la faim, le froid, la mort. Mais c'est déjà plus juste que «migrant». Ces gens, qui avaient il n'y a pas si longtemps un nom, un travail, une maison, une vie rangée et sans histoire, sont désormais des anonymes sans domicile fixe, des sans-abri, des égarés, des fugitifs, des sans-patrie.

Il aura fallu 2500 morts depuis janvier, dont Aylan, 3 ans, Galip, son frère de 5 ans, Rihan, leur maman de 35 ans, 52 cadavres entassés dans la coque d'un navire, 71 personnes asphyxiées dans un camion, des centaines de corps perdus dans la Méditerranée, des dizaines de milliers de survivants qui vivent dans des conditions de voyages effroyables et qui s'accrochent à l'espoir pour que le monde sorte enfin la tête du sable et que les dirigeants fassent mine de chercher des solutions.

Le drame était prévisible. L'horreur était évitable.

Maintenant il faut agir, ouvrir nos portes, ouvrir nos bras, aider ces enfants, ces mamans, ces papas à trouver un peu de sérénité, leur donner du réconfort quitte à perdre un peu de notre confort, leur redonner espoir, les accompagner pour les rassurer sur l'humanité, et, surtout, en finir avec les guerres stupides, absurdes et horribles qu'ils fuient pour survivre.

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