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Et si le Bloc avait la balance du pouvoir?

Les électeurs du Québec vont-ils voter par stratégie ou par conviction le soir du 19 octobre? En fait, ils pourront peut-être faire les deux.
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Alors que nous entrons dans le sprint final des élections fédérales de 2015, les sondages sont de plus en plus d'accord sur la prédiction d'un gouvernement minoritaire libéral ou conservateur. Dans ce contexte, une nouvelle fenêtre d'opportunité s'ouvre aux Québécoises et Québécois afin de se doter d'une police d'assurance contre des politiciens imprévisibles. Les électeurs du Québec vont-ils voter par stratégie ou par conviction le soir du 19 octobre? En fait, ils pourront peut-être faire les deux.

La fameuse division du vote

La division du vote est à mon sens un faux débat. D'abord parce que tout parti, aussi petit soit-il, peut négocier des gains politiques et donner plus de visibilité aux idées qui nous sont chères. Il peut aussi mettre des bâtons dans les roues des politiciens qui nous représentent mal (des députés du Bloc pourraient par exemple éviter qu'un Trudeau s'inspire de son père et utilise ses députés québécois pour légitimer des politiques douteuses). Enfin, il leur est possible de réaliser des études et d'appuyer différents groupes de pression de la société civile avec leurs ressources humaines, financières et leurs contacts politiques.

En outre, on a beaucoup parlé de la division que pourrait causer le Bloc au Québec en oubliant l'immense division du vote causée par le PLC et le NPD dans tout le reste du Canada. En dehors du Québec se trouve pourtant plus de 76% des sièges du Canada (contrairement au Québec qui n'influence que 23% des résultats finaux, une réalité dure à avaler mais bien présente). En effet, avec des plates-formes de plus en plus similaires, ces deux partis n'ont plus de raison de diviser ainsi le vote à part les égos de leurs chefs respectifs.

Si les opportunités de conserver des sièges étaient bel et bien présentes au Québec pour Thomas/Tom Mulcair, cela n'a qu'un impact modéré sur le résultat pancanadien des élections. En effet, au-delà d'une poignée de comtés dans la ville de Québec, les endroits où le NPD peut littéralement voler un siège au Parti conservateur sont tous dans le reste du Canada, les Québécois n'ayant élu que cinq conservateurs en 2011. C'est pourtant là que les néo-démocrates auraient dû concentrer leurs énergies, au lieu de remettre en question la pertinence du Bloc québécois. Une circonscription où le NPD peut priver les conservateurs d'un gain et s'en octroyer un du même coup se serait avérée deux fois plus rentable politiquement, car l'adversaire baisse au classement en même temps que le parti victorieux monte.

Une opposition avec des dents

Un autre élément dont on parle peu est celui de la balance du pouvoir. Pourtant, presque tous les sondages laissent entrevoir un gouvernement minoritaire, peu importe le gagnant. En effet, même avec une majorité des suffrages, ni le PCC ni le PLC ne devraient remporter la majorité des sièges (ce qui est nécessaire pour former le gouvernement sans compromis) à cause du système de scrutin uninominal à un tour.

Gilles Duceppe a raison de concentrer ses discours finaux vers du positif et des propositions concrètes. L'une d'elles est de s'assurer que peu importe quel gouvernement sera présent en attendant l'indépendance, il est tout à notre avantage d'appuyer le Bloc pour améliorer notre rapport de force et augmenter notre pouvoir de négociations. Or, avec la division du vote fédéraliste entre non pas deux mais bien trois partis (NPD, PCC et PLC), il y a une occasion presque historique pour le Bloc d'obtenir la balance du pouvoir. Cela est d'autant plus vrai qu'il est fort probable qu'au terme d'une course serrée, le parti au pouvoir n'ait que 150 ou 160 sièges, alors qu'il en faut désormais 170 pour avoir la majorité absolue.

Le Bloc n'aurait donc besoin peut-être que d'une douzaine de comtés environ pour avoir cette fameuse balance. Considérant que les opinions conservatrices sont irréconciliables avec les autres partis (et que jusqu'à maintenant, Justin Trudeau a exclu tout possibilité d'alliance avec Thomas Mulcair), un futur gouvernement du PCC ou du PLC aurait tout intérêt à demeurer à l'écoute d'un Bloc revigoré.

En outre, on sait que Gilles Duceppe défendra les intérêts du Québec, peu importe le parti en place à Ottawa. Cela nous éviterait de mettre tous nos œufs dans le même panier, puis d'être déçu par un NPD qui semble de plus en plus imprévisible, ou un PLC qui nous a laissé un goût amer avec le scandale des commandites.

Bloquer le pipeline une fois pour toutes

Enfin, l'aspect le plus important est peut-être celui de l'environnement et de l'indépendance dans le contexte actuel. On constate que l'eau potable est une ressource de plus en plus précieuse dans le monde. Sans surprise, une forte majorité de Québécois s'opposent à la construction du très risqué oléoduc de TransCanada. Considérant que Thomas Mulcair a dévoilé son jeu et admis devant les médias qu'il défendait le pipeline pour des raisons aussi nébuleuses qu'injustifiables, le Bloc est officiellement le seul parti à vouloir protéger notre magnifique fleuve Saint-Laurent coûte que coûte, sans remettre la décision finale dans les mains d'un organisme fédéral.

Notre dernière chance de bloquer cette autoroute du pétrole est donc de donner la balance du pouvoir au Bloc québécois qui, contre un gouvernement minoritaire, pourrait exiger l'annulation du projet sous peine de voter contre le budget ou des projets de loi, de le garder minoritaire, ou même de le forcer à s'allier avec des adversaires peu commodes. C'est en outre un enjeu extrêmement important pour toute personne indépendantiste qui désire naturellement éviter que le Québec soit forcé d'être lié au Canada par une infrastructure qui vaudra des milliards de dollars et entraînera inévitablement de nouveaux acteurs puissants dans le camp du NON en cas de référendum.

Quoiqu'il arrive, nous verrons la vraie couleur des autres partis si le Bloc est revigoré et nous pourrons dormir la tête tranquille, ayant tout fait en notre pouvoir pour défendre nos valeurs. Comme quoi le vote stratégique et le vote de conviction ne sont pas toujours contradictoires.

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