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Trois raisons incontournables pour lesquelles facturer les soins aux malades n'est pas une solution

L'idée d'imposer des « frais modérateurs » refait surface régulièrement dans le débat sur la viabilité du système de santé au Canada. Certains pensent que le fait de facturer les soins aux patients permettrait de limiter les dépenses, de faire en sorte que les gens reçoivent uniquement les soins dont ils ont besoin et de veiller à ce qu'ils ne surutilisent pas les services. D'autres, que cela aiderait à recueillir des fonds dont le système de santé a bien besoin. Facturer les soins aux patients n'est pas une solution. Voici pourquoi.
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L'idée d'imposer des « frais modérateurs » refait surface régulièrement dans le débat sur la viabilité du système de santé au Canada. À première vue, elle ne semble pas si bête.

Certains pensent que le fait de facturer les soins aux patients permettrait de limiter les dépenses, de faire en sorte que les gens reçoivent uniquement les soins dont ils ont besoin et de veiller à ce qu'ils ne surutilisent pas les services. D'autres, que cela aiderait à recueillir des fonds dont le système de santé a bien besoin.

Facturer les soins aux patients n'est pas une solution. Voici pourquoi:

1. Les frais modérateurs n'ont pas seulement pour effet de dissuader les patients de demander des soins dont ils n'ont pas besoin; ils les dissuadent aussi d'obtenir des soins essentiels. Ce ne sont souvent que des économies de bout de chandelle. Les études démontrent que les frais modérateurs conduisent bien des gens à se priver de soins préventifs ou de prise en charge en cas de maladie chronique. Les frais modérateurs signifient qu'il faut décider soi-même si nos symptômes nécessitent une attention médicale. Or la plupart d'entre nous ne sont pas outillés pour prendre ce genre de décision. Les experts médicaux sont justement formés pour ça. Imaginez que votre enfant a la fièvre. Sauriez-vous déterminer s'il s'agit d'une grippe ou d'un début de méningite? Voulons-nous vraiment que les parents déterminent eux mêmes s'il faut emmener leur enfant chez le médecin tout en se demandant si la facture leur laissera assez de sous pour payer le loyer?

2. Le financement des soins de santé par les patients ne permet pas de faire des économies. Cela permet peut-être de refiler une partie de la facture au patient plutôt qu'au tiers payeur, mais au final, aucune économie d'échelle n'est réalisée. L'une des explications réside dans ce qui se produit lorsque les malades renoncent à obtenir des soins à cause des frais modérateurs. La recherche montre que les ressources ainsi libérées, comme les lits d'hôpitaux ou les plages de rendez-vous chez le médecin, finissent par être utilisées de toute façon. Qui plus est, elles servent parfois à prodiguer à des personnes capables de régler la facture des soins dont elles n'ont pas besoin. Ainsi, les frais modérateurs peuvent - ironiquement - conduire à la prestation de soins superflus ou plus ou moins nécessaires, afin d'éviter que les médecins ne chôment et que les lits d'hôpitaux restent vides.

3. Lorsque c'est le patient qui paye la note, les assureurs entrent en scène. Malheureusement, les règles du jeu peuvent changer rapidement. Un rapport récent du Commonwealth Fund des États-Unis décrit les fortes hausses imposées de 2003 à 2009 aux régimes d'assurance familiale parrainés par les employeurs. Les primes ont augmenté trois fois plus rapidement que le revenu médian et les franchises, grimpé d'environ 80 %. Par ailleurs, les personnes qui auraient le plus besoin de recevoir des soins sont aussi celles qui ont le plus de difficulté à trouver un assureur disposé à les assurer.

Le mot de la fin

Regardons les choses en face: la grande majorité des gens n'exigeront pas de subir une greffe du cœur ou de la hanche simplement parce c'est gratuit. Ce sont les médecins, plutôt que les malades, qui décident de l'accès à la majorité des traitements. Alors, de quoi les frais modérateurs nous dissuadent-ils, en réalité?

Ils découragent les gens économes et les pauvres d'obtenir les soins dont ils ont réellement besoin. Ce qui finit par coûter plus cher à la collectivité, en fin de compte.

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