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Les coûts cachés de la famille moderne

Étendre son réseau de soutien, ce n'est pas seulement se simplifier la vie, mais c'est aussi multiplier les occasions de développement neural chez les enfants, tout en faisant de nos cadres de vie des milieux plus accueillants et solidaires.
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Si vous avez des enfants, la scène qui suit risque de vous sembler familière.

Le réveille-matin bêle. Vous le faites taire en tapant dessus, puis vous vous précipitez hors du lit pour faire votre toilette, vous brosser les cheveux et vous vêtir. Pendant que le petit déjeuner mijote et que le café percole, vous préparez les lunchs. Du bas des escaliers, vous criez aux enfants qu'il est temps de se préparer. Vous nourrissez le chat, vérifiez quelques courriels auxquels vous n'avez pas le temps de répondre et vous grimpez à l'étage pour exhorter des enfants pas-prêts-le-moins-du-monde à se bouger.

Être parent est un boulot exigeant. Ajoutez-le à la liste impressionnante de tâches qu'impose la vie au travail et à la maison et vous aurez le sentiment de risquer l'ensevelissement. Les parents surmenés, stressés, dépassés, sont nombreux. Le pire, c'est qu'apparemment on n'y peut pas grand-chose. Compte tenu des longues heures de travail, de la stagnation des salaires et des bouleversements économiques, l'avenir semble plus souvent fait d'interrogations que de réponses.

Mieux vaut peut-être alors se tourner vers le passé. Loin dans le passé.

La cellule familiale telle que nous la connaissons aujourd'hui peut nous sembler aller de soi, mais c'est un phénomène relativement récent. Autrefois, nos ancêtres vivaient au sein de groupes beaucoup plus nombreux, qui comptaient de vingt à trente personnes. Ces groupes se caractérisaient par une certaine cohésion familiale: les enfants étaient élevés par plusieurs adultes, plutôt que par leurs seuls parents.

À mesure que la société s'est modernisée, cette approche collective en matière d'éducation des enfants s'est transformée. Les clans se sont fragmentés en petits groupes, les familles se sont dispersées sur un vaste territoire et le nombre d'enfants a diminué au sein de chacune. Dans la plupart des foyers, la « famille nucléaire » est devenue une norme. Désormais, l'accent n'est plus mis sur le clan, mais bien sur l'individu : on est passé du « nous » au « moi ».

On ne peut s'empêcher de se demander si c'est vraiment là la meilleure façon d'organiser nos vies. Après tout, les êtres humains sont des êtres sociaux. Les liens étroits qui les unissent ont toujours été un élément essentiel de leur survie, au-delà du fait que les nouveau-nés sont incapables de se débrouiller seuls.

Les parents procurent à leurs enfants bien plus qu'un toit et de la nourriture. Ils leur apportent la stimulation interactive qui permet à leur cerveau de bien se développer. La recherche de stimulus chez l'enfant, et le désir chez l'adulte de stimuler l'enfant, sont imprimés en nous. C'est ce qui explique pourquoi les enfants adorent jouer et que les adultes se prêtent au jeu aussi naturellement et librement qu'ils le font. Faire coucou ou jouer à cache-cache peut sembler insignifiant à première vue, mais ces jeux font bien plus que provoquer des éclats de rire réjouissants. En effet, ils permettent de renforcer les circuits neuraux, essentiels à la maturité affective et à la pensée complexe.

Les occasions de favoriser ce genre de croissance sont bien plus nombreuses au sein d'un grand clan familial que d'une petite cellule isolée. Même si l'école et le travail jouent un rôle important sur le plan social, les interactions les plus enrichissantes sont celles qui se produisent grâce au contact fréquent avec un noyau de personnes aimantes - c'est-à-dire une famille.

Il nous faut revenir à une conception plus ancienne de la famille, davantage axée sur le groupe. Il y a différents moyens d'y parvenir. En font partie les mesures telles que des incitations fiscales pour grand-parents qui s'occupent de la garde des enfants à court et à long terme ou encore, pour employeurs qui accordent du temps à leurs employés pour s'occuper des affaires familiales.

Au bout du compte, toutefois, le changement à opérer n'est pas d'ordre administratif, mais bien culturel. Il nous faut comprendre et accepter que la famille a de l'importance et qu'il faut en élargir la définition. Outre les grands-parents, les tantes et les oncles, cette définition engloberait les amis et les voisins. Étendre son réseau de soutien, ce n'est pas seulement se simplifier la vie, mais c'est aussi multiplier les occasions de développement neural chez les enfants, tout en faisant de nos cadres de vie des milieux plus accueillants et solidaires.

Imaginez que la scène décrite au début de notre article se déroule dans un foyer où l'on pourrait compter sur un tout petit peu plus de soutien familial. Du coup, il ne serait plus nécessaire de tout faire en même temps. La maman ou le papa s'occuperait des enfants pendant que grand-papa préparerait le petit-déjeuner. Ou encore, les parents pourraient se relayer pour emmener les enfants du voisinage à l'arrêt de bus, ce qui donnerait un peu de temps aux autres pour consulter leurs courriels - et peut-être même y répondre.

Si notre société dans son ensemble accordait une plus grande valeur aux liens familiaux, qu'il s'agisse des liens du sang ou des liens tissés par l'entraide, le stress du quotidien diminuerait en bonne partie. Les enfants développeraient des circuits neuraux indispensables, multiplieraient les interactions propices à la santé de leur cerveau et deviendraient des personnes sûres d'elles, heureuses et soucieuses de la famille. Une évolution qui nous ferait le plus grand bien, à nous et à nos enfants.

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