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PKP contre Trudeau: c'est l'indépendantisme qui est en berne

En lisant Pierre Karl Péladeau ce jeudi matin, qui dénonce la constitution de 1982, j'ai cru reconnaître Frédéric Bastien et d'autres membres d'un certain cercle souverainiste, dont je sais qu'ils rêvent d'un affrontement constitutionnel. Pour eux, il s'agirait là de la meilleure façon de montrer aux Québécois que le Canada est un mauvais pari pour le Québec.
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Je suis indépendantiste. Cela signifie que je n'accepte pas que le Québec, foyer de la nation québécoise, soit une simple province.

Je ne me suis pas réveillé un matin en disant : «Tiens, le Canada n'a pas la constitution que je voudrais, je deviens donc indépendantiste». Quand bien même le Canada se doterait de la meilleure constitution du monde, quand bien même le Québec deviendrait la province la plus « puissante » des provinces du monde, je serais quand même indépendantiste. C'est aussi simple que ça. Il y a une foule d'excellentes raisons de vouloir que la nation québécoise assume son destin et ses responsabilités à travers un état pleinement souverain. Pas besoin de faire une obsession de la constitution canadienne pour comprendre ces raisons.

La constitution de 1982, œuvre de Trudeau, est certes nocive pour le Québec. Je ne suis pas contre le fait qu'on la dénonce. Toutefois, il devrait incomber à ceux qu'on nomme « fédéralistes » de vouloir la réformer ou de vouloir jouer dans le film des jérémiades constitutionnelles. S'ils ne veulent pas prendre le relais de Robert Bourassa à cet égard, ce n'est pas aux indépendantistes d'aller se salir les mains dans ce bourbier à leur place.

En lisant Pierre Karl Péladeau ce jeudi matin, qui dénonce la constitution de 1982, j'ai cru reconnaître Frédéric Bastien et d'autres membres d'un certain cercle souverainiste, dont je sais qu'ils rêvent d'un affrontement constitutionnel. Pour eux, il s'agirait là de la meilleure façon de montrer aux Québécois que le Canada est un mauvais pari pour le Québec.

Derrière cette école de pensée, il y a une sorte de culte du contexte de 1990, que l'on veut voir comme un alignement béni des astres qui aurait permis à Parizeau d'agir en 1995. On s'en souvient: les demandes minimales du Québec, émises par le gouvernement libéral, avaient été rejetées par le Canada et l'option indépendantiste avait atteint des sommets dans les sondages.

Chaque fois qu'on ressasse ce souvenir en guise d'excuse du fait que le Parti québécois d'aujourd'hui n'agit plus en faveur de l'indépendance comme il le fit sous Parizeau, ou encore pour justifier que l'on propose une gouvernance souverainiste nationaliste qui entrerait en forte confrontation avec Ottawa tout en se faisant discrète sur l'indépendance, on oublie l'essentiel: le nationalisme québécois n'est pas automatiquement indépendantiste. Sans proposition indépendantiste assumée et crédible, ce que représentait Parizeau à l'époque, le nationalisme demeure l'affaire de provinciaux qui, tôt ou tard, apprennent à se contenter du statut provincial.

On oublie aussi que dès 1994, la fièvre indépendantiste était retombée. Le climat était morose et tous les indicateurs habituels étaient semblables à ce qu'ils sont aujourd'hui. Les sondages d'opinion donnaient 35% à 40% au Oui et une forte majorité d'électeurs se disaient défavorables à la tenue d'un référendum, tout comme d'éminents souverainistes qui s'opposaient fermement à la volonté de Parizeau d'en faire un quand même. Qui plus est, le sentiment national québécois était moins fort qu'aujourd'hui; en effet, diverses études tendent à démontrer qu'il y a maintenant davantage de Québécois qui se sentent ou se disent Québécois avant de se dire Canadiens, que dans les années 90.

Si on veut réaliser l'indépendance du Québec, il faut la proposer au Québécois, de façon positive, moderne et assumée. Il faut se doter d'un programme politique qui se situe dans la perspective d'un état souverain. Il faut faire valoir les avantages pour une nation comme la nôtre de contrôler tous ses leviers politiques, économiques et culturels. Si nous, indépendantistes, assumons enfin une proposition indépendantiste, ne nous inquiétons pas: là, les fédéralistes devront réagir et il y aura matière à débat et à critique envers Ottawa sans devoir toujours retourner trente ans en arrière et gratter le vieux bobo constitutionnel.

À l'inverse, quand les souverainistes se contentent de dénoncer le fédéral, ils passent pour des gens qui ne jouent pas franc-jeu et qui tentent de mousser leur option par la bande. Ce qui, d'ailleurs, n'est pas complètement faux. L'indépendance ressort systématiquement de cet exercice comme une idée peu présentable, une sorte de pis-aller qui n'est pas électoralement rentable.

Les indépendantistes doivent impérativement cesser de s'écrouler en excuses, en contrition et en épouvante chaque fois qu'ils effleurent presque malgré eux leur propre option. À cet égard, la récente défaite électorale du Parti québécois, point culminant d'une longue période de souverainisme complexé, fut d'une extravagante éloquence.

Je prends bonne note du fait que Monsieur Péladeau dénonce aujourd'hui Pierre-Elliott Trudeau et la constitution canadienne. Mais j'aurais été beaucoup plus enthousiaste et impressionné si le nouveau député de St-Jérôme avait, dans sa missive, consacré une part de son plaidoyer - une part importante - à conclure que le Québec doit devenir un état indépendant dans les meilleurs délais.

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