Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Le jour où je suis devenue végétarienne

Quand mon frère est devenu végétarien, je n'ai pas compris et je n'ai même pas cherché à comprendre. Pourquoi arrêter de se faire plaisir !?
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Quand mon frère est devenu végétarien, je n'ai pas compris et je n'ai même pas cherché à comprendre. Pourquoi arrêter de se faire plaisir !?

"Tu sais que c'est de la merde hein ?"

Il se marrait en me regardant manger ma saucisse de viande, et je me marrais aussi. Parce que oui, je le savais, mais la fuite était facile.

Il y a quelques années j'ai arrêté de manger de la viande. La vérité c'est que j'ai arrêté d'en acheter mais je continuais à en manger chez les autres. Mais c'est déjà ça non ?

Et puis il y a quelques mois je me suis demandé quel avait été LE déclic pour les autres. J'ai presque honte de le dire aujourd'hui mais je cherchais le mien. Alors j'ai voulu savoir à quel moment et pourquoi les actuels végétariens se sont dit "j'arrête". J'ai fouillé le web à la recherche de témoignages et je suis tombée sur un article de Slate. À plusieurs reprises, le livre de Jonathan Safran Foer, Faut-il manger les animaux ? était cité. Je l'ai acheté dans la foulée.

Ma tête était pleine de questions, le livre m'apportait mine de réponses et j'avais peine à ne pas aborder le sujet avec tout le monde. Et plus j'en parlais plus je me retrouvais face à des miroirs. L'incohérence des autres ne faisait que refléter ma propre incohérence. Les propos étaient souvent aussi contradictoires que les miens. Les mots étaient tellement en désaccord avec les actes que c'en était insensé.

Le livre est bien entamé. Nous sommes en route pour un weekend de fête, je questionne encore et je m'emballe en parlant de ma nouvelle bible, et je réalise que c'est là, maintenant. Parce que ce weekend il y aura du saucisson, du jambon, des crevettes et qu'avec tout ce que je sais maintenant et tout ce que je pense, ce serait me trahir que d'avaler encore le moindre bout de viande.

Ça a été dur! J'ai refusé la salade au jambon de bayonne, j'ai dit non aux roulés au jambon, j'ai pris de la paëlla sans crevettes et j'ai pas mangé un gramme de saucisson. Mais je savais pourquoi je le faisais et j'étais fière d'enfin faire un choix.

J'ai continué la lecture et j'ai continué à me poser des questions. Et maintenant ? Je vais être la nouvelle végétarienne relou ? Je vais mal juger les autres pour quelque chose que j'ai fait moi aussi ? Et en société, je vais faire comment ? Pourquoi je vais arrêter de me faire plaisir ? Et comment je peux partager ce qui me semble aujourd'hui si évident ?

Maintenant, je me souviens encore des goûts que j'ai aimé mais la vérité me dégoûte. Je ne mange plus de viande et ma réflexion me pousse doucement sur le chemin du végétalisme et le veganisme trouve lui aussi sa place. Parce que plus je me renseigne sur le sujet plus je trouve tout ça complètement taré. Mais il faut du courage et de la volonté pour ouvrir les yeux et je n'en ai pas toujours.

Maintenant, je sais que je suis aussi celle qui casse les oreilles des gens, parce que le sujet de la nourriture est lourd de sens. Ce n'est pas que ce qu'on mange et ce qu'on fait manger à nos enfants, c'est aussi ce qu'on inflige aux autres êtres vivants et ce qu'on crée pour la terre qui nous accueille.

Maintenant, je m'efforce de ne pas mal juger les autres parce que ce serait complètement con de ne pas comprendre, et surtout, de faire comme si j'avais toujours été végétarienne et comme s'il ne m'avait pas fallu une réflexion et un parcours.

Maintenant je suis de moins en moins gênée de refuser un plat ou de prévenir de ma nouvelle alimentation. J'ai posé, à ma meilleure amie, végétarienne depuis presque toujours et vegan depuis longtemps, cette question :

- "Tu agis comment toi ?"

Elle a répondu:

- "J'en ai rien à foutre"

Je me suis marrée. Pas parce que je la trouvais gonflée mais parce qu'au fond ma question était ridicule. Pourquoi je devrais être gênée d'un choix ?

J'apprends à m'en foutre de passer pour la relou de service, j'apprends à m'en foutre de refuser un plat préparé avec amour (...). Parce qu'accepter par politesse c'est tout d'abord idiot, et qu'accepter les exceptions enverrait le message que je mange encore de la viande et rien ne changerait au final.

Maintenant, pourquoi arrêter de se faire plaisir !? Parce que je ne suis pas plus importante que les autres êtres vivants et que je n'ai pas à dominer une autre espèce. Parce que c'est complètement vide de sens d'aimer à ce point les animaux mais d'accepter qu'on les tue pour les manger. Parce que cette culture détruit l'espace où nous vivons. Parce que c'est abusif et insensé tout ce mal. Et je ne veux plus manger de ce mal. Et ce n'est pas comme si je n'avais pas le luxe du choix. Dans d'autres pays la question ne se pose pas car il est question de survie, mais ici ? Il est question d'humanité... Je ne vous montre pas de vidéos horribles ou d'images ignobles mais demandez-vous pourquoi vous n'aimeriez de toute façon pas les voir.

Maintenant, je me suis demandée qu'est-ce que je pouvais faire pour que d'autres aient aussi le déclic. Parce que je ne doute pas deux secondes du paquet de gens posés le cul entre deux chaises. Puis j'ai supposé que raconter simplement mon histoire donnerait peut-être envie à l'un ou l'autre de se questionner. Alors oui j'essaie d'entraîner les autres sur mon chemin, mais parce que je ne doute pas que ce soit le meilleur des chemins.

Billet original publié sur Medium

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.