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Le grand vide et le trop-plein

Je vous écris cela pour me forcer à prendre conscience qu'ici je suis chez moi. Que je le serai toujours et que de vous partager mes états d'âme, ça m'aide moi-même à les toucher et à les vivre enfin...
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Pour la première fois de ma vie, l'hiver dernier, j'ai senti une très forte pression sur ma poitrine, j'avais le vertige et je sentais le sol se dérober sous mes pieds. Je me suis étendue et j'ai appelé mon amour. Elle savait exactement ce que j'avais. Elle s'est collée sur moi et m'a réconfortée. Je vivais ma première crise d'angoisse. Quelques semaines plus tard, j'ai pleuré comme ça faisait une éternité que je ne l'avais fait. Je sentais ce grand vide tributaire d'un trop-plein.

Les mois passèrent, le travail et les diverses obligations me créant une distraction suffisante pour ne pas sentir ce grand vide. Mais ce vide il est visible ici dans ce blogue. De moins en moins de billets. Moi la grande missionnaire du blogue, je ne blogue plus assez. Ça me manque. Je m'étourdis avec les « j'aime », les retweet et les chiffres fulgurants de mes abonnés. Je cueille cet amour virtuel d'inconnus alors que je ne vois plus ma famille immédiate depuis des années. Mais cet amour virtuel, il compense et panse cette plaie ouverte par ma différence. Il est lourd à porter aussi. Comme cette femme qui ne se pouvait plus de me rencontrer au supermarché. Elle tenait à se faire photographier avec moi alors que des larmes lui coulaient sur les joues. Moi qui sortais du bois, habillée comme la chienne à Jacques, pas maquillée, je me sentais comme la plante verte qui lui faisait du bien. Je ne voyais que trop ce miroir d'une allégorie qui lui appartenait et qu'elle projetait sur moi. J'avais un sentiment partagé de tristesse et de compréhension.

Ensuite, j'ai des nouvelles d'un autre procès criminel pour lequel je devrai témoigner et dont je suis la victime de même que d'un autre dossier majeur qui est encore sous-enquête. Je ressens une certaine joie. Celle de la personne qui se tient debout devant les vents et marées et qui contre toute attente, continue d'avancer, fière et digne.

Puis j'ai des troubles oculaires. Je vois double et par la suite je vois embrouillé. J'ai aussi une douleur lancinante partant de ma colonne vertébrale à l'un des nerfs me sortant du bas du dos. Je fais même mon premier voyage en ambulance. J'ai des symptômes que l'ont croit être un ICT. Après la rencontre d'une flopée de spécialistes m'ayant fait subir une batterie de tests, le diagnostic est formel. Je suis une stressée. Moi, la grande baba cool que pratiquement rien ne perturbe. Celle qui a un front de bœuf et qui se tient debout, je suis fragile. Mon cerveau ne le sait pas, mais mon corps ne cesse de me le dire. Je suis stressée et fatiguée.

J'en discute avec une psychologue spécialiste du stress post-traumatique, mais elle me dit ne pas pouvoir m'aider. C'est que les stress que je vis ne sont pas encore terminés. Peut-être ne le seront-ils jamais. Il n'est pas « post » mon traumatisme. Il est traumatique certes, mais je suis toujours en situation de stress et elle ne sait pas quoi faire avec ça. Ce stress de recevoir des menaces, de récolter régulièrement des insultes, de me faire poser ces mêmes sempiternelles questions intrusives et indiscrètes d'inconnus « qui veulent comprendre » et qui finissent par m'appeler monsieur dans des erreurs inconscientes et pas méchantes. Comme cette femme l'autre jour qui fait un détour spécialement pour venir me dire combien elle m'aime, qu'elle m'admire, qu'elle me trouve fantastique et qui me dit en s'en allant « ça m'a vraiment fait un grand plaisir de vous voir monsieur Blanc ».

Puis, sentant ce grand vide croulant sous le poids du trop-plein, je retourne pour une Nième fois en psychothérapie. Je dois apprendre à gérer un stress traumatique permanent, que je ne vois pas consciemment. Je sais objectivement qu'il est là. Mais j'ai toujours été une personne qui se lève de bonne humeur, je suis relax, je m'émerveille de choses simples et de beautés anecdotiques que m'offre la nature ou la vie. Je ne suis pas une femme compliquée. Ou plutôt si je le suis. Je ne le suis que trop.

Donc cette autre psy, qui se sent plus à l'aise à explorer avec moi la gestion de ce stress « hors des sentiers battus » m'aide à reprendre contact avec ces émotions que par mécanisme de défense, je refoule constamment en déviant la conversation par des blagues, des jeux de mots et autre étourderies qui me protègent de ressentir et de pleurer cette souffrance et même, ironiquement, cette joie qui régulièrement s'offrent à moi.

J'ai mes amours et mes passions. Je m'étourdis dans le travail. J'ai changé mon hamac d'endroit, pour qu'il soit plus « feng shui » (une blague ici pour ceux qui prendraient ça au sérieux). Je prends conscience que mon blogue me manque terriblement. Je navigue en ces eaux incertaines. Je m'entraine à ne plus écouter pour pouvoir enfin entendre. Entendre cette voix que j'ai trop longtemps étouffée. Celle qui pleure, qui rit, qui s'offusque et qui se réjouit. Celle qui envoie chier les trop nombreux esti de connards et qui embrasse la multitude d'âmes constructives qui se trouvent constamment sur mon chemin.

Je vous écris cela pour me forcer à prendre conscience qu'ici je suis chez moi. Que je le serai toujours et que de vous partager mes états d'âme, ça m'aide moi-même à les toucher et à les vivre enfin...

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