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Le projet de pays, ça se règle d'abord et avant tout au Québec. Sur la scène fédérale, les politiques de Stephen Harper sont catastrophiques et son parti doit à tout prix être délogé.
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La question sociale est aussi importante que la question nationale, et le projet de société est aussi important que le projet de pays. Plusieurs souverainistes ne l'ont pas encore compris. C'est pourquoi ils voient dans Québec solidaire un parti politique qui n'est pas vraiment souverainiste. Car, pensent-ils, comment peut-on se réclamer de la souveraineté si on accorde autant d'importance au projet de société?

Le projet de pays, ça se règle d'abord et avant tout au Québec. Sur la scène fédérale, nous sommes présentement davantage sollicités par la question sociale. Les politiques de Harper sont catastrophiques et son parti doit à tout prix être délogé.

À mes yeux, l'enjeu social numéro un est celui des sables bitumineux, de leur développement et de leur exportation via le projet Énergie Est de la TransCanada Corporation. Certes, le NPD n'est pas clairement contre ce projet, et le Bloc, lui, y est clairement opposé. Toutefois, si une majorité de bloquistes sont élus, leur opposition au projet ne changera pas grand chose et cela fera autant d'élus du NPD en moins en provenance du Québec. Cela favorisera le retour en force du parti conservateur.

Le Canada du ROC ira donc de l'avant avec ce projet insensé puisqu'il sera gouverné par le Parti conservateur, donc par le principal artisan d'une politique économique orientée sur le développement des sables bitumineux. Or, ainsi que Francine Pelletier le souligne dans Le Devoir du 17 juin, il faut un NPD qui «botte le cul» des conservateurs, et non un Bloc québécois qui leur fait des «pieds de nez».

Si le NPD prend le pouvoir, ce sera avec l'aide d'une vague orange initiée au Québec, et les députés et ministres québécois pourraient en principe faire entendre avec plus de force l'opposition québécoise au projet de TransCanada. On me dira que les députés québécois actuels du NPD ne font pas grand chose pour bloquer le projet, mais il faut savoir que plusieurs font pression en coulisse, à commencer par Alexandre Boulerice.

Sur le plan politique, sachant que le Bloc risque de diviser le vote et de réduire les chances de voir le NPD déloger les conservateurs, on pourrait se demander si les bloquistes ne sont pas, avec le retour de Gilles Duceppe, en train de pratiquer la politique du pire, c'est-à-dire favoriser la réélection de Harper dans l'espoir de révulser davantage les Québécois à l'égard du Canada. Mais cette révulsion risque de se retourner contre les bloquistes eux-mêmes et, plus généralement, contre les souverainistes si, d'aventure, ils empêchent le NPD de prendre le pouvoir.

Les bloquistes seront blâmés d'avoir contribué à la réélection de Harper.

Le parti conservateur de Stephen Harper est un parti de «droite dure» semblable à ce qu'est devenu le Parti républicain aux États-Unis. Cela contribue à créer des clivages sans précédent sur l'axe gauche-droite, et c'est ce qui nous permet d'espérer pour la première fois une prise de pouvoir du Nouveau Parti démocratique (NPD) au Canada.

Les tergiversations politicailleuses de Thomas Mulcair en ce qui a trait à Énergie Est ont quelque chose de révoltant. Si le NPD ne se montre pas ouvertement défavorable au projet, on ne pourra militer avec ferveur en leur faveur. À un tournant crucial de l'histoire de l'humanité, on ne peut pas accepter qu'un calcul électoraliste instrumentalise les enjeux environnementaux. Il est impensable que l'on entretienne l'ambiguïté dans le seul but de se ménager des appuis dans l'Ouest canadien.

Mais le Bloc québécois n'est pas en meilleure posture si, face au danger de reporter le Parti conservateur au pouvoir, il continue malgré tout d'accorder la primauté absolue à la question nationale. Les bloquistes auront beau gesticuler en chambre pour s'opposer au projet Énergie Est, il y aura des milliers de citoyens, d'écologistes et de maires concernés qui leur rappelleront leur responsabilité concernant le retour des conservateurs au pouvoir. Les bloquistes auront beau prétendre qu'ils sont contre le projet Énergie Est, un fait incontestable demeure: si le retour de Gilles Duceppe ne fait que diviser le vote et contribuer à la réélection de Harper dans le but de polariser le Bloc québécois contre un «Bloc canadien», cela démontrera que le parti de Gilles Duceppe est, en fait, encore en train d'accorder plus d'importance à la question nationale qu'à la question sociale.

Je n'ai jamais été contre la présence d'un Bloc souverainiste à Ottawa. Mais il n'y a pas que le Québec. Il y a aussi le sort de l'humanité entière. Il n'y a pas que le projet de pays, il y a aussi le projet de société. Et il n'y a pas que les positions de principe d'un parti politique, il y aussi les chances d'influer réellement sur le cours des choses dans les officines de l'État pour empêcher que le projet de TransCanada ne voie le jour.

Mon espoir en ce moment est que la position forte du Bloc contre Énergie Est force le NPD dans ses derniers retranchements et l'oblige à adopter enfin une position claire. Si le NPD délogeait les conservateurs, bloquait l'arrivée des libéraux et renonçait ouvertement à Énergie Est, ce serait clairement une aubaine pour le Québec. Et, qui sait, peut-être que le NPD pourrait en plus, une fois porté au pouvoir, mettre en pratique les belles paroles prononcées à l'occasion de la Déclaration de Sherbrooke: celle-ci proposait de pratiquer un véritable fédéralisme asymétrique, respectueux de l'autonomie politique et fiscale du Québec.

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