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Place aux jeunes: les baby-boomers cèdent graduellement leur majorité

Au printemps 2011, deux jeunes dans la trentaine, que je connaissais déjà, me disaient avoir très hâte que leur génération supplante en nombre les baby-boomers. Me sachant démographe, ils m'ont demandé de leur dire quand les jeunes adultes seront suffisamment nombreux pour espérer jouer un rôle plus important dans la société.
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Au printemps 2011, deux jeunes dans la trentaine, que je connaissais déjà, me disaient avoir très hâte que leur génération supplante en nombre les baby-boomers (personnes nées entre 1946 et 1966 selon les démographes Jacques Légaré et Pierre-Olivier Ménard). À leurs yeux, ces derniers prenaient encore trop de place dans la société québécoise. L'un d'eux avait milité au sein d'un parti politique, s'activant pour faire avancer ses idées parmi les plus vieux militants. En vain.

Me sachant démographe, ils m'ont demandé de leur dire quand les jeunes adultes seront suffisamment nombreux pour espérer jouer un rôle plus important dans la société. Au fur et à mesure de l'arrivée des baby-boomers à la retraite, ils sont «remplacés» par des jeunes qui arrivent sur le marché du travail. Viendra alors un moment où la majorité passera des baby-boomers aux plus jeunes qui les suivent.

Pour démarquer les jeunes générations de celles du baby-boom, mes jeunes interlocuteurs avaient à l'esprit la population adulte qui n'a connu, ni la Révolution tranquille des années 1960, ni le référendum sur le projet de souveraineté-association tenu en 1980. J'ai alors fait remarquer que ces deux balises encadraient la crise d'octobre 1970, ainsi que le long débat linguistique qui a conduit aux lois 22et 101 de 1974 et 1977 respectivement.

J'ai convenu avec eux que la génération charnière pouvait être celle qui est née en 1966. Ainsi, même s'ils avaient déjà 14 ans au moment du référendum de 1980, ils étaient trop jeunes pour voter. Parions que la plupart n'en ont gardé qu'un vague souvenir, comme d'ailleurs de la Loi constitutionnelle de 1982 entrée en vigueur alors que cette génération n'avait que 16 ans.

La majorité des baby-boomers s'effrite

Pour répondre à leur question, j'ai consulté les dernières projections démographiques de l'Institut de la statistique du Québec (ISQ). Calculées à partir du recensement de 2006, elles projettent la population du Québec de 5 ans en 5 ans (2011, 2016, 2021, etc.). Les enfants nés en 1966 avaient donc 40 ans au recensement de 2006.

Tel que montré par le tableau qui suit, les baby-boomers formaient en 2006 près des deux tiers de la population des 25-64 ans. Le Québec était alors encore loin d'un renversement de situation en faveur des plus jeunes. Mais les projections pour 2011 indiquent que les personnes de 25-44 ans arriveraient presque à égalité avec les baby-boomers alors âgés de 45-64 ans (les proportions sont de 47,4% et 52,6% respectivement). Dès lors, on ne devrait pas s'étonner du fait que les jeunes de 25-49 ans en 2016 formeront près de 60% des adultes de 25-64 ans.

Une interpolation de ces résultats entre 2011 et 2016 m'a permis d'annoncer à mes jeunes curieux que c'est en août 2012 (mois symbolique) que devrait se produire la mise en minorité démographique des baby-boomers encore en âge de travailler. C'était plus tôt qu'ils ne l'espéraient alors!

Toutefois, une mise en garde s'imposait. En effet, comme de plus en plus de personnes pourraient travailler au-delà de 65 ans, j'ai proposé à ces deux jeunes d'examiner les projections démographiques en ajoutant les 65-69 ans aux baby-boomers, d'autant plus que certains analystes incluent toutes les naissances des années 1940 dans le baby-boom. Après compilations, il s'est avéré que ce moment serait repoussé d'un peu plus de deux ans (mois symbolique : septembre 2014).

Enfin, l'ajout des 20-24 ans aux calculs - sans égard au fait que plusieurs sont aux études supérieures plutôt que sur le marché du travail -, avait pour effet de faire perdre la majorité démographique aux baby-boomers il y a déjà quelques mois : février 2012 (mois symbolique).

Outre le nombre, l'engagement

Cet examen des projections démographiques indique simplement qu'au début de la présente décennie (en gros, la période 2011-2016), les baby-boomers perdent graduellement leur majorité dans les groupes d'âge où se concentre la population active. On ne saurait toutefois énoncer, à partir de ce constat, une implacable loi des nombres au pouvoir magique.

En effet, bien que les baby-boomers prennent tour à tour leur retraite, ils joueront encore longtemps un rôle important au sein de la société en général. N'exercent-ils pas déjà leur droit de vote avec plus d'intensité que les jeunes. Incidemment, le sondeur Jean-Marc Léger rappelait récemment que «[l]es jeunes constituent près de 20 % de la population du Québec, mais à peine 10 % de l'électorat»?

Les deux jeunes qui m'ont interrogé, et leurs nombreux amis qui piaffent derrière eux, sont bien conscients qu'il ne suffira pas d'être plus nombreux. Ils devront, disent-ils, prendre leur place, car on ne leur fera pas de cadeaux.

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