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Souveraineté et remise en question de l'idéologie de l'État-providence

Il y a un problème d'éthique de la redistribution de la richesse collective à offrir à bas coûts des formations universitaires à des étudiants de disciplines ouvrant à de très hauts salaires défrayés par les citoyens, et qui oublient dès leur promotion qu'ils ont une dette envers la société, un devoir civique de solidarité envers l'ensemble.
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Nous entendons explorer une question subsidiaire à la chute des intentions de vote pour le PQ : «la souveraineté peut-elle se renouveler tout en établissant une remise en question lucide sur la nécessité de la dissocier de l'État-providence, de son caractère sacré et de son intouchabilité?»

Nous tenterons de présenter une réponse indirecte à cette question par une observation critique voulant que le paradigme de l'État-providence s'ouvre sur un lot d'attitudes et de comportements déviants.

En particulier, les attitudes et les comportements de ceux qui bénéficient de l'idéologie de l'État-providence lors de leurs études invitent déjà à une réflexion critique salutaire.

Le mouvement étudiant fournit une première illustration. Ainsi, l'ASSÉ présente des revendications radicales qui trouvent un fondement sous le thème de la solidarité et de la justice sociale. Pourtant, l'ASSÉ n'aura pas hésité à manipuler des principes démocratiques pour obtenir puis perpétuer de pseudo votes de grève autour du printemps érable, elle aura maintenu une position vindicative aux dépens d'étudiants qui auront perdu une ou deux sessions ou auront décroché.

Maintenant encore elle aura initié un autre mouvement de protestations sur le thème de questions financières. De tout ce mouvement sont évacués des problèmes d'ordre supérieur tels que la question linguistique, objet des combats de toute une génération depuis la Révolution tranquille, et l'affirmation nationale par laquelle les Québécois auront gagné en assurance, en créativité et en estime de soi. Une jeunesse donne donc préséance à des avantages ou à des privilèges sur le plan financier, demande un partage de richesses collectives toutes relatives laborieusement acquises par les générations précédentes avant même d'y avoir contribué. Exit la référence aux devoirs de citoyens envers les fondements d'un peuple. Et, qu'en est-il aussi de la qualité des diplômes dans des universités populaires toujours en grève et soumises au marketing d'affaires?

Une deuxième mise en situation est donnée par les revenus des groupes de médecins spécialistes. Ils peuvent surprendre, voire choquer la population. Les radiologistes - médecins québécois les mieux payés - soutirent une rémunération annuelle moyenne de 527 000 $, en plus des honoraires qu'ils facturent en cabinet privé pour des actes non couverts par la Régie de l'assurance maladie du Québec (RAMQ). Le président de la Fédération des médecins spécialistes a défendu le droit de ses membres d'être productifs et de recevoir des honoraires élevés, tout en maintenant qu'ils ne sont pas surpayés (Radio Canada, 2012).

On se doit de comprendre que le financement des études des médecins québécois aura été fait au sacrifice de l'ensemble des citoyens. Sous le régime de l'État-providence, on établit qu'un idéal de solidarité sociale doit guider les citoyens ce qui est donné en privilèges à quelques-uns les obligerait à un engagement implicite envers ses concitoyens. La sociale démocratie établit un contrat social, à défaut de la respecter, la société perd en solidarité et en cohésion sociale. Ainsi les étudiants qui auront bénéficié d'une formation coûteuse en médecine auraient l'obligation morale et légale de rendre à la société par des services dispensés à salaires comparables à ceux des autres citoyens. À défaut de respecter leurs engagements, les médecins auraient l'obligation morale, voire éthique, de rembourser l'ensemble des coûts réels défrayés par la société.

Autour de la notion de justice sociale et d'éthique de la redistribution

Ouvrir l'argumentaire sur la notion de justice sociale oblige aussi à revenir sur la notion de gratuité et à traiter d'un problème d'éthique de la redistribution de la richesse collective.

D'emblée : la gratuité, ça n'existe pas. Ce que l'un reçoit, un autre l'aura payé. Il y a un problème d'éthique de la redistribution de la richesse collective à offrir à bas coûts des formations universitaires à des étudiants de disciplines ouvrant à de très hauts salaires défrayés par les citoyens, et qui oublient dès leur promotion qu'ils ont une dette envers la société, un devoir civique de solidarité envers l'ensemble. L'exemple des corporationss professionnelles dont les membres ont un jour tiré largement profit du système d'enseignement à bas coûts de l'État-Providence (médecins spécialistes, juges...) nous enseigne que l'obligation de rendre à la société ce qui a été reçu débouche sur un puits de l'oubli et d'égocentrisme, non sur l'altruisme et la solidarité sociale.

Ainsi, l'axiome à l'effet que la gratuité serait un investissement pour la société est infirmé par des comportements égocentriques démontrés aussitôt le diplôme en poche et l'inscription à la RAMQ ou au Barreau obtenue, que des médecins quittent pour les États-Unis ou le Canada de l'Ouest ou menacent de le faire s'ils n'obtiennent pas une rémunération égale ou supérieure à ce qui est consenti ailleurs!

Une solidarité se perd, faute du respect d'un contrat social explicite, net et clair stipulant les obligations des uns à rendre de rendre en services ce que la société a consenti dans leur éducation. L'action du «Je» supplante le discours du «Nous». En surprime à la solidarité sociale perdue, une méfiance des uns envers le discours des autres se sera progressivement installée. Ainsi la notion sous-entendue de solidarité des nouveaux diplômés en réponse à la solidarité démontrée par l'ensemble des citoyens qui auront contribué au progrès de la société québécoise par la formation offerte quasi gratuitement à la nouvelle génération d'étudiants aura été infirmée par un comportement égocentrique conditionné par une certaine idée que l'État-providence leur devait tout, et sans contrepartie.

Certes, la gratuité (ou quasi gratuité) favorise la plus grande accessibilité à l'éducation supérieure, ce qui est clairement dans l'intérêt de la société dans son ensemble. Dans ce sens, les ressources financières du peuple consacrées à cette tâche sont bien employées.

Toutefois, plusieurs parmi les privilégiés voudront toujours se soustraire aux responsabilités du contrat social implicite et au devoir de solidarité; des attitudes corporatistes ou l'opposition de groupe d'intérêts égocentriques contribueront toujours à développer des attitudes navrantes, voire des comportements voyous.

Ainsi, une remise en question de l'idéologie de L'État-providence s'impose du fait même des attitudes et des comportements égocentriques. Une réflexion doit être engagée sur le fondement et la validité du contrat social de l'État-providence eu égard au respect de la liberté et de l'éthique de la redistribution.

Sur la question particulièrement que nous abordions, la quasi-gratuité des études, une juste mesure serait de moduler quelque peu les droits de scolarité en fonction des coûts réels des formations et de faire un rappel explicite, en début d'études et avant la remise des diplômes, des devoirs et des responsabilités morales et sociales de remettre à la société ce que le peuple aura consenti en sacrifices de génération en génération. Voilà une idée libérale dans le sens classique du terme.

Au sein de notre État-providence, un rite de passage à la responsabilité envers les concitoyens ne se fait littéralement pas. Force est aussi de constater que la transmission de certaines valeurs à l'ensemble des jeunes ne passe pas, dont des valeurs liées à la culture religieuse, à la langue identitaire, pourtant des fondements de la cohésion d'un peuple. Cela étant, une attitude spontanée de respect du contrat social inhérent à la sociale-démocratie n'opère plus; une cohésion sociale et une responsabilité civique se perdent. Dit autrement, les grandes nations développent l'amour de la Patrie, non l'égocentrisme...

À la source de la Révolution tranquille, il y avait l'amour de La Patrie. La plus belle qualité du révolutionnaire tranquille est l'amour. Sans ce sentiment, sans cette pulsion idéalisée, il n'y a pas de Justice, ni de démocratie, ni de Fraternité, ni de Liberté.

Ainsi, une réponse indirecte et partielle à la question «la souveraineté peut-elle se renouveler en se dissociant de l'idéologie de l'État-providence?» se profile utilement. L'État-providence n'est pas une finalité en soi, mais un moyen de passage, une forme circonstancielle d'un essai de redressement d'injustices et d'inégalités, seule l'idée de Patrie contient l'idéal composé de prospérité, d'égalité, de Liberté, de Fraternité...

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