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Santé: toutes les régions ne devraient pas recevoir un financement égal

En matière de santé, égalité et équité ne sont pas des termes synonymes. Il est grand temps de répartir les fonds consacrés à la santé de manière à ce qu'ils aillent là où ils sont le plus nécessaires.
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Lorsqu'un système de soins de santé ne peut pas exploiter les ressources à sa disposition de façon optimale, les conséquences peuvent être désastreuses, et c'est exactement ce qui se produit dans le système de santé canadien. Une étude récente de l'Institut canadien d'information sur la santé (ICIS) a démontré qu'entre 12 600 et 24 500 morts pourraient être évitées chaque année au Canada si notre système de santé fonctionnait de façon parfaitement efficace. Cela signifie que nous pourrions sauver des milliers de vies sans débourser un sou de plus que ce que nous dépensons déjà ni augmenter la contribution des Canadiens à leur système de soins de santé provincial.

Pour en arriver à cette conclusion, les auteurs de l'étude ont mesuré les différents types de services de soins de santé, y compris les soins hospitaliers, les soins infirmiers et des médecins, les services de prescription de médicaments et les services des maisons de soins infirmiers. Ils ont également mesuré le nombre des personnes mortes prématurément dans 84 petites régions du Canada, c'est-à-dire les personnes décédées avant l'âge de 80 ans en raison de problèmes de santé pouvant être traités, comme le diabète, la pneumonie et l'asthme (à l'exclusion cependant du cancer du poumon). L'étude a ensuite comparé comment l'argent consacré à la santé est dépensé dans les différentes régions, ce qui a permis de constater qu'il serait possible pour une région moyenne d'améliorer ses façons de faire de 18 % à 35 % et, par le fait même, de sauver des vies en cours de processus. Qui a dit que les politiques en santé étaient ennuyeuses?

L'étude expose également dans le détail les différents facteurs d'inefficacité, qui pourraient en surprendre plusieurs. Contrairement à ce qu'on croit habituellement, l'efficacité du système ne repose pas que sur les efforts acharnés et les décisions perspicaces des gens qui y participent (les gestionnaires d'hôpitaux et d'établissement, les médecins, les infirmières et infirmiers, les régies régionales de la santé), elle repose également sur des facteurs qui sont hors de leur contrôle.

Sans aucun doute, une région qui s'efforce de surveiller les séjours hospitaliers afin qu'ils ne soient pas inutilement prolongés tout en maintenant la qualité des soins pour que le nombre de réadmissions après un congé ne soit pas trop fréquent réussira à éviter plus de morts prématurées pour un même niveau de dépenses. De la même façon, une région qui exerce un contrôle sur la proportion de spécialistes au sein de son effectif de médecins (afin d'assurer aux patients un accès à un médecin de famille) préviendra également un plus grand nombre de décès, tout comme une région qui veille à ce que les personnes au bas de l'échelle des revenus aient accès à un médecin de famille arrivera, elle aussi, à sauver plus de vies pour une même quantité de dollars dépensés.

Cependant, les régions sont soumises à des contraintes qu'elles ne peuvent contrôler que partiellement. Notamment, un taux plus élevé de tabagisme ou d'inactivité physique dans une région nécessitera davantage de ressources pour des résultats moindres, et occasionnera un plus grand nombre de morts prématurées. Par exemple, quand le nombre de fumeurs est plus élevé, les coûts visant à prévenir les décès causés par l'asthme sont aussi plus élevés, de la même façon que les dépenses destinées à éviter les décès liés au diabète sont plus grandes lorsque le nombre de personnes souffrant d'obésité est plus important.

Le revenu est aussi un facteur important qui influence les résultats en santé et sur lequel les régies régionales de la santé ne peuvent exercer aucun contrôle. Les régions socio-sanitaires au sein desquelles le revenu moyen est plus élevé sont moins efficaces que celles dont le revenu moyen est plus bas. La raison de cette différence réside possiblement dans le fait que les régions aux populations plus aisées utilisent les ressources à leur disposition non pas de manière à réduire le nombre des morts prématurées, mais plutôt de manière à atteindre d'autres objectifs, comme un accès plus rapide à des technologies de pointe ou à des arthroplasties de la hanche. Dans le même ordre d'idées, les régions qui présentent une proportion plus élevée d'immigrants, de personnes non autochtones ou de personnes très scolarisées réussissent à sauver plus de vies pour un même niveau de dépenses, car ces populations présentent en moyenne un taux de mortalité plus bas que celui du reste des Canadiens.

Que faire face à de telles constatations? Premièrement, nous devons apprendre des régions les plus efficaces du pays comment surveiller les séjours hospitaliers (leur durée et leur qualité), comment garantir l'accès à un médecin de famille aux plus pauvres et comment faire en sorte que les médecins de famille représentent une proportion raisonnable de l'ensemble des médecins. Deuxièmement, nous devons chercher des mesures de santé publique qui permettront, sans nécessairement accroître les dépenses, de réduire les taux de tabagisme et d'obésité, et qui encourageront l'activité physique.

Finalement, et peut-être par-dessus tout, nous devons repenser notre façon de répartir les ressources entre les différentes régions socio-sanitaires du Canada. Toutes les régions ne requièrent pas le même niveau de ressources pour garantir la santé de leur population. Les régions qui accueillent moins d'immigrants, qui ont une population autochtone plus importante et une moindre proportion de personnes très scolarisées devraient recevoir plus de fonds par habitant, car elles doivent dépenser plus que les autres pour obtenir les mêmes gains en matière de santé. Inversement, les régions qui comptent plus d'immigrants, moins d'Autochtones et plus de personnes ayant une scolarisation supérieure n'ont pas besoin du même niveau de financement en santé pour obtenir les mêmes résultats.

En matière de santé, égalité et équité ne sont pas des termes synonymes. Il est grand temps de répartir les fonds consacrés à la santé de manière à ce qu'ils aillent là où ils sont le plus nécessaires.

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