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Presser le citron de l'éducation au Québec

Le budget Leitao le confirme, l'éducation n'est pas importante pour les Québécois.
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Le budget Leitao le confirme, l'éducation n'est pas importante pour les Québécois. Nous vivons dans une société répressive qui dévalorise l'éducation en général et la profession d'enseignant en particulier. C'est pour cela que le gouvernement n'a augmenté le budget de l'éducation que d'un famélique et risible 0.2%.

Le 31 mars prochain, la convention collective des professeurs du secteur primaire, secondaire et collégial se termine. Les profs seront donc en négociation pour le renouvellement de leur convention collective à partir de cette date. Le gouvernement propose une augmentation salariale de 3% étalée sur cinq ans avec un gel des salaires dans les premières années de la nouvelle convention. Cette proposition est bien en dessous du taux actuel d'inflation et de ce que gagnent les professeurs en Ontario. Pour pouvoir baisser encore plus les salaires, le gouvernement propose en plus de ne plus considérer les maîtrises et les doctorats dans le calcul des salaires des profs de cégep, donc plus de bonis salariaux pour les profs qui possèdent ces diplômes. Du même souffle, le ministre Blais nous dit que ces politiques visent à recruter les meilleurs! Ce n'est pas avec des mauvais salaires que l'on va attirer les meilleurs M. le ministre.

Depuis les vingt dernières années, j'ai enseigné dans une université américaine et dans deux universités hors Québec et dans le réseau collégial québécois, donc je sais de quoi je parle quand je dis que nous sommes l'endroit où l'on investit le moins en éducation en Amérique du Nord. Certains néo-libéraux voudraient même aller jusqu'à abolir la formation générale dans nos cégeps puisque dans les autres provinces canadiennes on fait seulement un secondaire 6 et on passe directement à l'université. J'ai enseigné dans des universités au Nouveau-Brunswick et au Manitoba et je peux vous dire avec certitude que nos étudiants sont beaucoup mieux préparés pour leur passage du secondaire à l'université que ceux des autres provinces. En fait, le niveau de difficulté de mes classes de cégep est beaucoup plus élevé que ne l'était celui de mes cours universitaires hors Québec! Le réseau collégial donne non seulement une formation générale de qualité en sciences humaines, mais, plus important encore, il offre une formation très complète en méthodes de recherche et en gestion de projet à nos étudiants. Les étudiants canadiens n'ont pas accès à une formation similaire et sont souvent obligés de commencer par faire un baccalauréat général avant de faire un baccalauréat spécialisé. Un parcours donc plus long et plus cher.

Mais ce n'est pas tout, le gouvernement veut aussi réduire les rentes de retraite des profs et augmenter le nombre d'étudiants dans les classes à une époque où le nombre d'étudiants avec des troubles d'apprentissage augmente sans cesse. Et nous allons faire cela sans couper les services aux étudiants! Dans la vision néo-libérale, l'enseignant n'est pas un travailleur valorisé ni même un être humain, c'est un citron qu'il faut pressé pour obtenir un maximum de jus pour un minimum d'investissement. Dans ce contexte, il n'est pas surprenant que 20% des jeunes enseignants du primaire et du secondaire quittent la profession dans les cinq premières années de leur carrière. Les principales raisons pour ce changement de carrière sont : 1) la faiblesse des salaires, 2) la précarité d'emploi et 3) la faiblesse des ressources pédagogiques. Dans le contexte où les conditions de travail vont se dégrader de plus en plus, on peut postuler sans se trop se tromper que le nombre d'enseignants décrocheurs va augmenter et qu'il sera de plus en plus difficile de recruter des enseignants qualifiés pour faire un métier aussi dévalorisant. C'est aussi difficile de penser à la qualité de l'éducation quand tu vis dans une situation de précarité d'emploi constante.

Les politiciens néo-libéraux disent qu'ils vont couper dans les services administratifs sans toucher aux services aux étudiants. Mais les tâches administratives ne vont pas disparaître d'un coup de baguette magique libérale, elles vont juste être refilées aux profs. Quand un prof se consacre à des tâches administratives, il a moins de temps pour ses étudiants et ses préparations de cours et la qualité de l'éducation en souffre. S'il y a une chose que tous les profs détestent souverainement, ce sont les tâches administratives. Surtout quand elles s'ajoutent à une pleine tâche d'enseignement.

Aux fameuses «familles de la classe moyenne» qui appuient ce gouvernement qui valorise uniquement l'entreprise privée et crache sur le secteur public, ce sont vos enfants qui, ultimement, vont payer le prix de votre égocentrisme social. Car l'éducation qu'ils vont recevoir dans les prochaines années sera de piètre qualité étant donné qu'il n'y aura plus de jus dans le citron. Ces nouvelles compressions vont peut-être «assurer l'avenir» de nos jeunes comme le disent les néo-libéraux, mais dans le domaine de l'éducation elles vont certainement hypothéquer le présent.

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