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Et si l'on regardait ce qui se passe ailleurs dans le monde?

Je n'aime pas l'expression « Quand on se compare on se console », parce que je suis fondamentalement convaincue que la consolation est un bien piètre objectif, et qu'une société qui se respecte doit viser l'excellence et non chercher à éviter la relative médiocrité. Ceci étant, un regard -- même furtif -- sur d'autres régions du globe permet de mieux saisir la mesure de ce à quoi peuvent ressembler des démocraties menacées.
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AP

En direct de la même planète que la nôtre... Et juste au cours de la dernière semaine...

Cent huit civils, dont près de la moitié étaient encore des enfants, ont péri lors du stupéfiant massacre qui a déchiré, vendredi dernier, un quartier résidentiel de Houla, en Syrie. Un événement qui a inspiré un concert de récriminations de la part de la communauté internationale envers les autorités à Damas et envers les rebelles, une condamnation unanime du Conseil de sécurité des Nations Unies et la désapprobation de joueurs ayant jusqu'ici fait preuve de discrétion : Russie, Chine, Iran... Un massacre que même le cessez-le-feu décrété depuis le 12 avril dans le plan de paix de l'ONU n'a pu empêcher. L'événement, loin d'être isolé, s'inscrit dans une série de violences qui secouent le pays depuis plus d'un an. Des violences dont le coût en vies humaines a franchi la dizaine de milliers depuis mars 2011, et qui menacent la survie même du plan de paix, pourtant qualifié « d'unique chance de stabiliser le pays » par l'émissaire désigné par l'ONU pour en assurer la mise en place, Kofi Annan. L'horizon s'assombrit à mesure que Paris, Londres, Berlin et Ottawa -- pour ne nommer que celles-là -- ont annoncé l'expulsion des diplomates syriens de leur territoire.

Un peu plus au sud, le premier tour d'une élection présidentielle s'est conclu avec un résultat à tout le moins serré qui a garanti à Mohammed Morsi (candidat des Frères musulmans) et Ahmad Chafiq (dernier premier ministre sous l'ancien président Moubarak), l'accès au second tour du premier scrutin présidentiel au pays tenu de façon libre, en réponse au soulèvement qui a secoué Place Tahrir il y a déjà plus d'un an. Une élection décisive de laquelle l'ensemble des candidats dits modérés ont été écartés et qui se déroule au rythme de coups de théâtre successifs. D'abord, la constitution ayant jusqu'ici prévalu a été suspendue, la rédaction du document visant à la remplacer est victime d'un blocage politique et ne sera vraisemblablement adoptée qu'après l'élection d'un nouveau président. Ensuite, la candidature même de Chafiq est contestée alors que l'adoption d'une loi par le parlement, dominé par les islamistes, et sa ratification par le pouvoir militaire empêcherait tout pilier de l'ère Moubarak de briguer la présidence égyptienne (ou d'exercer quelque autre de ses droits démocratiques). La cour constitutionnelle tranchera à cet égard le 11 juin prochain, soit 6 jours avant que les Égyptiens ne retournent aux urnes... L'attente de ce jour décisif du 17 juin se déroule sur un fond de violence alors que les quartiers généraux des candidats sont des cibles de choix pour différentes factions de militants ayant peu de goût pour la modération.

Parlant du 17 juin, il s'agit de la date retenue pour la deuxième prise d'une élection grecque en tout autant de mois. Après la tourmente économique, c'est l'impasse politique qui paralyse la Grèce. Les partis élus il y a quelques semaines ont échoué à former un gouvernement de coalition. La reprise du scrutin pourrait, en vertu d'un dénouement qui porterait au pouvoir un gouvernement refusant d'appliquer les mesures d'austérité inhérentes au plan de sauvetage européen, enclencher la sortie du pays de la zone. Panique bancaire, fuite de capitaux, retraits massifs de près de 1 milliard d'euros en une semaine face à la menace du retour à la drachme ont marqué les derniers jours. Un Grec sur cinq est au chômage, les analystes prévoient un recul du PIB de près de 6 % pour l'année en cours, un parti néonazi a fait une entrée historique au Parlement, raflant 21 sièges et quelque 7 % des voix lors du dernier scrutin... Les éléments susceptibles d'alimenter les inquiétudes se multiplient.

Les difficultés européennes s'étendent à l'Italie et à l'Espagne, respectivement aux prises avec un taux de chômage et une dette publique qui n'ont rien pour rassurer ni les marchés ni la population. Madrid a d'ailleurs nationalisé la quatrième banque espagnole, une opération estimée à 19 milliards d'euros, un record.

La Grande Bretagne bat au rythme de la Commission Leveson, initiée en réponse au scandale de l'écoute téléphonique imputé à News of the World et à l'empire de Rupert Murdoch.

Plus de 6 millions de Nigériens, soit le tiers de la population du pays, souffrent d'une famine dont on peine à voir la fin.

L'actuel président américain a donné un appui historique au mariage de conjoints de même sexe.

Des secousses sismiques n'ont de cesse depuis 10 jours dans le nord de l'Italie.

Manifestement, la planète nous offre suffisamment de dossiers à couvrir pour alimenter toutes les chaînes de nouvelles en continu, et pour faire voyager le contenu de nos fils twitter pendant plus des 24 heures que dure chaque journée.

Mais au Québec, nous sommes tellement occupés à nous écouter jouer de la casserole que nous n'avons plus d'oreille pour ce qui se passe hors du trajet de la #manifencours, que l'on peut allègrement suivre en direct au petit écran, sur le web ou à la radio. Nous jetons certes un oeil sur la scène internationale, mais c'est de plus en plus afin de questionner la façon dont les médias étrangers couvrent nos manifestations...

Évidemment, les débats qui ont cours ici sont cruciaux, fondamentaux, et il est nécessaire que l'on y accorde une attention soutenue, rigoureuse, équilibrée et honnête. Il est d'ailleurs souhaitable -- voire essentiel -- que tous les citoyens disposent des éléments d'information nécessaires à prendre part au débat public qui anime nos rues depuis plus d'une centaine de jours et à réfléchir à l'avenir de notre système d'éducation postsecondaire. Il est heureusement possible d'y parvenir sans pour autant évincer de nos discussions tous les autres enjeux qui caractérisent les profondes transformations, les crises majeures et les tragédies qui frappent les autres sociétés.

Je n'aime pas l'expression « Quand on se compare on se console », parce que je suis fondamentalement convaincue que la consolation est un bien piètre objectif, et qu'une société qui se respecte doit viser l'excellence et non chercher à éviter la relative médiocrité. Ceci étant, un regard -- même furtif -- sur d'autres régions du globe permet de mieux saisir la mesure de ce à quoi peuvent ressembler des démocraties menacées. C'est d'ailleurs la fantastique opportunité qui nous a été offerte par l'avènement des nouvelles technologies; celle de pouvoir nous intéresser en temps réel à ce qui se passe par-delà nos frontières, sans ignorer le parc Émilie-Gamelin, mais sans nous y limiter.

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