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Peut-on prévenir les maladies psychiatriques dès l'enfance?

Une piqûre de rappel: un quart de la planète présentera un trouble psychiatrique dans sa vie (dépression, anxiété, psychose) et les troubles mentaux coûtent ensemble le double du coût des autres maladies du cerveau.
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L'adage est vrai pour l'ensemble de la médecine, psychiatrie comprise: la prévention, prévenir l'apparition des maladies, est un bénéfice pour la population, pour nous tous. Une piqûre de rappel: un quart de la planète présentera un trouble psychiatrique dans sa vie (dépression, anxiété, psychose) et les troubles mentaux coûtent ensemble le double du coût des autres maladies du cerveau. Et les maladies psychiatriques débutent pour la plupart durant l'adolescence ou au début de l'âge adulte: typiquement 15-25 ans.

Pourquoi ? L'adolescence constitue une période de très forte maturation cérébrale. De 15 à 25 ans, les connexions entre les neurones se réduisent améliorant efficacité et spécialisation, les gaines de myéline qui entourent les axones se développent, favorisant certains circuits, notamment le cortex frontal. Cette région du cerveau est le siège de nos raisonnements, de la flexibilité mentale qui nous permet de nous adapter à la situation, de contrôler des comportements non pertinents... Pendant ce temps, les circuits du plaisir, de la recherche de sensation sont suractivés sous l'influence hormonale, favorisant la recherche de sensation et l'exposition aux substances. Or, en plein remaniement, le cerveau est sensible aux substances (cannabis, alcool), au stress et autres facteurs d'environnement.

Difficultés ? il s'agit d'une période de transition: entre collège et lycée, entre univers éducatif et monde du travail, entre famille et entourage amical... Une véritable épreuve d'efforts pour des jeunes fragilisés ou mal armés pour affronter la vie sociale. C'est aussi un moment de la vie où l'on est peu préoccupé par sa santé, où l'on se croit immortel! C'est enfin, une période de discontinuité entre psychiatrie de l'enfant et celle de l'adulte.

Et pourtant... Les signes d'alerte des principales maladies psychiatriques sont présents tôt, parfois dans l'enfance, et presque toujours avant la fin de l'adolescence. Mais, malgré un système de soins développé dans nos pays, le bilan reste édifiant : le retard diagnostic est de plus d'un an pour un épisode psychotique, les signes d'alerte étant généralement présents depuis plus de 5 ans, parfois 10. Or, il est aujourd'hui parfaitement démontré que plus on agit tôt meilleure est l'évolution.

Agir ? La première étape est l'évaluation, multidisciplinaire, adaptée, non pour «diagnostiquer», le diagnostic à ce stade n'est pas toujours possible ni fiable, mais pour identifier les points d'intervention possibles et évaluer les risques. Car, tout comme on ne traite pas de la même manière un grain de beauté évolutif et un mélanome, les signes précurseurs ne doivent pas être négligés mais leur prise en charge doit être adaptée et le recours aux médicaments pas toujours nécessaire.

Peut on prévenir les maladies psychiatriques ?

Les programmes mis en place en Australie, aux USA et en Europe montrent des résultats prometteurs. Ils soulignent le changement de paradigme que représente la prévention dans le champ de la psychiatrie. Il s'agit avant tout d'éviter que la trajectoire de vie soit la plus impactée par l'apparition des symptômes et prévenir les risques: suicide, consommation de substances, décrochage scolaire ou exclusion. Les indications thérapeutiques sont différentes et des traitements à visée neuroprotectrice semblent être intéressants à ce stade, qu'il s'agisse de prévenir des troubles psychotiques ou les troubles l'humeur, en attendant que la recherche identifie des nouvelles pistes thérapeutiques.

Chez qui, pour qui ?

L'ensemble de la population, parents, jeunes et adultes à leur contact, devrait être mieux informé des signes d'alerte et mieux éduqués à la santé (sommeil, sport, nutrition, gestion du stress, risques liés à la consommation de substance et notamment risques liés au cannabis, etc). Les interventions médicales, elles, doivent se concentrer dans une prévention "ciblée", sur les personnes ayant déjà quelques signes d'alerte, des difficultés. La recherche d'indices, biologiques ou non, qui améliorent l'évaluation des risques reste un enjeu.

Mais le principal écueil est celui de faciliter l'accès de ces personnes vers les soins et tant que la psychiatrie sera stigmatisée, patients comme psychiatres, cela restera difficile.

Quelle vision de la psychiatrie les jeunes ont-ils?

Une enquête à l'initiative de la Fondation Deniker devrait nous apporter quelques éléments de réponse. Il faut aussi développer des structures adaptées en France, centres d'évaluation pour adulte et adolescent dédiés à l'intervention précoce... des expériences pilotes dans ce champ. La France restera-t-elle à l'écart de ce formidable mouvement? Qui penserait à dire devant les premiers signes d'une maladie "revenez dans un an ce sera vraiment grave !"? Un dernier chiffre: 1 euro investi pour la prévention en économise 14 dans le champ de la psychose... peu d'investissements sont aussi rentables.

Plus d'information sur www.institutdepsychiatrie.org

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