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Gérer l'économie ou laisser l'économie nous gérer?

Les conservateurs nous ont démontré un chose au cours des derniers quatre ans, c'est qu'à leurs yeux, le dogme du marché en concurrence vaudra toujours mieux que de l'économie planifiée.
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Depuis quatre ans, je lis un peu partout, mais surtout de la part des spin doctors conservateurs, qu'ils sont de grands gestionnaires de l'économie. Mais l'économie canadienne n'est elle pas en train d'affronter une pire tempête que la crise des papiers commerciaux de 2008?

Bonne question tout de même, à laquelle il faudrait tenter d'apporter des réponses durant cette longiforme campagne électorale.

Irrémédiablement, vous irez penser que j'ai un biais favorable à l'aspirant au poste de premier ministre, auquel cas vous auriez totalement raison. N'en demeure pas moins que certains faits, de nature économique, transcendent la ligne de parti ou le spin.

Un modèle économique digne des années 1920

Vous ne serez pas surpris de constater que notre balance commerciale est dans le négatif depuis 2009. Ceci s'explique en partie par l'absence de transformation à valeur ajoutée de produits faits à base de matières premières disponibles en abondance au Canada (modèle arracher et expédier). C'est un modèle d'exploitation des ressources naturelles qui n'est ni soutenable, ni bénéfique pour les gens qui habitent sur le territoire, en ce sens que les retombées de transformation se font à l'extérieur du pays d'origine. Un constat s'impose, le déficit commercial est toujours très élevé, malgré la quantité de traités de libre-échange entérinés par le gouvernement conservateur. Il faut donc regarder ailleurs.

L'aspect essentiel à observer à évaluer au sujet du déficit commercial canadien est le degré de transformation des produits exportés, versus les produits importés. Il n'est pas difficile de constater que les échanges concrétisés ne le sont pas au même stade de transformation. Nous exportons une bobine de cuivre et en échange nous recevons un mécanisme élaboré de forage hydraulique (je caricature pour permettre de bien saisir le concept de valeur ajoutée).

C'est cet aspect en particulier qui permet d'affirmer en dehors de la partisanerie habituelle, que l'économie gère le gouvernement et pas l'inverse. La subordination de l'intérêt public au profit privé en est un très bon exemple. Alors une question traverse mon esprit: pourquoi donc exploiter nos ressources naturelles sans en tirer le maximum de bénéfice?

Les statistiques sur la balance commerciale, c'est ici.

Des engagements farfelus

Le gouvernement Harper semble déterminé à nous convaincre du bien fondé de réduire la taxation des grandes entreprises pour favoriser l'investissement privé. Or, il n'y a aucune preuve scientifique tangible indiquant que le taux de taxation des grandes entreprises ait une influence sur le niveau d'investissement privé.

Selon un rapport relativement récent du ministère des Finances du Canada, chaque dollar investi en baisse d'impôt pour les grandes corporations rapporte 0,30$/1$ investi. Pas besoin d'un doctorat en macroéconomie pour comprendre que la proposition est farfelue (c'est ici).

Le fractionnement de revenu a deux objectifs: aider les mieux nantis à s'enrichir, et encourager les femmes à rester à la maison. Et, oui, l'incidence fiscale d'une telle politique publique, en contexte d'iniquité salariale entre hommes et femmes, nous mène à ce constat pour le moins inattendu (sic).

Sans parler du passage du CELI à 10 000$ par an, qui aura un effet carabinant sur les finances publiques: RDI-Économie nous apprenait que la facture pourrait atteindre 26 milliards de dollars en 2080. Les provinces auraient quant à elles à éponger 13 milliards pour offrir un abri fiscal aux mieux nantis sur 65 ans.

Un sabotage en règle des finances publiques

Pour bien expliquer cette idée, il faut revenir aux politiques économiques républicaines de Reagan: créer volontairement un déficit public en réduisant les impôts et en allégeant la fiscalité, de sorte à ensuite enclencher un processus de compressions publiques permanentes, et ainsi faire disparaître le plus possible le pouvoir économique de l'État. C'est ce que nous appelons affamer la bête.

Ajoutez à cette recette redoutablement efficace le fait de comprimer le nombre de vérificateurs au sein de l'Agence de Revenu du Canada, et vous avez le parfait cocktail pour réduire considérablement les revenus de l'État.

La disparition de nos leviers économiques

Évidemment, on ne peut passer sous silence la disparition de toute forme d'instance de planification économique au Canada. Abolition de la commission canadienne du blé, abolition prochaine du principe de gestion de l'offre dans le cadre du PTP (Partenariat transpacifique). Évidemment, l'abandon de ces leviers économiques ne se fait pas sans heurts. Le transport ferroviaire pétrolier prend la place du grain dans les wagons, accompagné des conséquences que nous connaissons (catastrophes ferroviaires multiples) et celles que nous connaissons moins (producteurs de blé à la merci des compagnies ferroviaires) des suites de l'abolition de la Commission canadienne du blé.

Au sujet de la gestion de l'offre, les conservateurs tergiversent sur son maintien ou son abolition. Il est assez évident, si nous observons les trois piliers de ce modèle économique qui fait vivre des centaines de milliers de canadiens, que le défi sera de maintenir le contrôle sur les importations, surtout après la signature des traités internationaux, sans exposer nos producteurs locaux à des risques non calculés.

Les conservateurs nous ont démontré un chose au cours des derniers quatre ans, c'est qu'à leurs yeux, le dogme du marché en concurrence (miné par les oligopoles déguisés, voir théorie des jeux) vaudra toujours mieux que de l'économie planifiée, même lorsqu'il s'agit de souveraineté alimentaire. Nous savons par expérience, que l'outil d'économie planifiée peut fonctionner et maximiser les gains économiques potentiels, tout en respectant l'intérêt public.

Le billet se veut un complément à l'article publié dans le journal de Montréal disponible ici.

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