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Élection présidentielle: le Brésil à la recherche d'un nouveau souffle

C'est un scrutin au résultat incertain qui semble se profiler au Brésil. Le décès de Campos a paradoxalement rebrassé les cartes et sa successeure, Marina Silva, peut nourrir des ambitions pour accéder à la magistrature suprême.
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Le 5 octobre prochain, les Brésiliens seront appelés aux urnes à l'occasion des élections générales pour élire un nouveau président, les gouverneurs des 27 États ainsi que les parlementaires. La présidente sortante, Dilma Rousseff, qui a succédé à Luis Inacio Lula da Silva en 2010, brigue un second mandat dans un contexte économique et social difficile. En effet, la candidate du parti au pouvoir, le Parti des travailleurs (PT), est confrontée à une récession ainsi qu'à des revendications sociales concernant la lutte contre le coût de la vie élevé et la corruption. Même si la présidente Rousseff reste la favorite, le résultat du scrutin demeure incertain et un second tour est à prévoir le 26 octobre si aucun candidat n'obtient plus de 50% des voix. Le prochain chef d'État aura la lourde tâche de redresser l'économie du pays et de poursuivre les efforts entrepris dans la lutte contre la pauvreté, notamment depuis la présidence de Lula.

Une présidente peut-elle en cacher une autre ?

Depuis plusieurs mois, les pronostics de l'élection présidentielle brésilienne à laquelle participent sept candidats se résumaient à un duel entre la présidente Rousseff et le candidat du Parti de la social-démocratie brésilienne (PSDB), Aécio Neves. Si les sondages des mois précédents prévoyaient une victoire de la présidente Rousseff au second tour, les choses semblent avoir beaucoup évolué depuis le décès du candidat du Parti socialiste brésilien (PSB), Eduardo Campos, dans un accident d'avion le 13 août dernier. Cette disparition du troisième homme du scrutin présidentiel a amené le PSB à désigner sa colistière, Marina Silva, comme candidate à l'élection présidentielle.

Ministre de l'Environnement entre 2003 et 2008 sous la présidence de Lula, Silva a été la candidate du Parti vert (PV) à l'élection présidentielle de 2010, où elle était arrivée troisième avec près de 20 % des suffrages. Elle apparaît désormais comme étant une réelle menace pour la présidente Rousseff. En effet, le sondage de l'agence Datafolha, publié le 18 août dernier, créditait Marina Silva de 21 % des intentions de vote au premier tour, derrière Rousseff (36 % des intentions), mais devant Neves (20 %). De plus, en cas de second tour, le même sondage prévoyait que Marina Silva serait élue avec 47 % des voix contre 43 % pour Dilma Rousseff. À titre de comparaison, avant son décès, Eduardo Campos était crédité de 9 % des intentions de vote, soit 11 points de moins que Silva.

S'il faut relativiser les résultats de ce sondage - puisque ce dernier a été effectué cinq jours après le décès de M. Campos - il n'en demeure pas moins que la candidate socialiste, qui jouit d'une bonne image dans l'opinion publique, pourrait bien être propulsée au second tour. En effet, cette tendance a été confirmée par un nouveau sondage de Datafolha, publié le 29 août dernier, et qui donne Mme Silva en tête au second tour avec 50 % des suffrages contre 40 % pour la présidente Rousseff. De plus, la bonne prestation de la candidate socialiste lors des deux premiers débats télévisés du 26 août et du 1er septembre 2014 a rehaussé la crédibilité de cette troisième voie qu'incarnent Marina Silva et le PSB.

C'est donc un scrutin au résultat incertain qui semble se profiler au Brésil. Le décès de Campos a paradoxalement rebrassé les cartes et sa successeure, Marina Silva, peut nourrir des ambitions pour accéder à la magistrature suprême. Toutefois, quel que soit le vainqueur de ce scrutin, les défis à surmonter seront de taille, en particulier dans les domaines économiques et sociaux.

Un pays à redresser

Un premier enjeu de la réélection de Dilma Rousseff porte sur les difficultés économiques du Brésil. Dans un rapport publié le 29 août dernier, l'Institut brésilien de géographie et de statistiques (IBGE) a révélé que l'activité économique au deuxième trimestre avait connu une contraction de 0,6 % après avoir reculé de 0,2 % au premier trimestre, plaçant ainsi l'économie brésilienne en récession technique. C'est dans ce contexte que le ministre des Finances, Guido Mantega, a fait savoir que la prévision de croissance de 1,8 % pour 2014 serait revue à la baisse.

Selon l'opposition, cette récession est le résultat de la mauvaise politique du gouvernement, qui n'aurait pas réussi à lutter efficacement contre l'inflation, tandis que la présidente Rousseff considère que cette situation est une conséquence de la crise internationale qui a réduit la demande extérieure (notamment celle de l'Europe et de l'Argentine) de produits brésiliens. Dilma Rousseff précise toutefois que le taux de chômage, estimé à moins de 5 %, n'a jamais été aussi bas. Le prochain président devra donc s'affairer à ce que le pays retrouve des taux de croissance plus élevés, comme en 2010, lorsque la croissance économique était de l'ordre de 7,5 %.

La lutte contre la pauvreté constitue un autre enjeu important de cette élection présidentielle. En effet, Dilma Rousseff souhaite renforcer la « bolsa família », qui a été lancée en 2003 par le président Lula et qui constitue le principal programme social de lutte contre la pauvreté. Depuis son instauration, ce programme a bénéficié à plus de 36 millions de personnes et a contribué à diminuer la pauvreté et les inégalités sociales. Jusqu'ici, aucun des candidats ne semble vouloir remettre en question ce programme, notamment en raison de sa popularité dans les couches populaires, qui constituent un électorat clef. Avec les difficultés économiques que rencontre le pays, on ne peut toutefois s'empêcher de s'interroger sur l'ampleur avec laquelle la lutte contre la pauvreté sera poursuivie par le prochain chef d'État. Par ailleurs, les revendications pour l'amélioration des transports, du système de santé et de l'éducation, qui ont été l'objet de nombreuses manifestations en marge de la Coupe du monde de football 2014, restent d'actualité. Finalement, la lutte contre la corruption est un autre point sur lequel les Brésiliens attendent de grands changements, à plus forte raison que la classe politique brésilienne a souvent été frappée par des scandales et que les politiciens ne jouissent pas d'une image très favorable dans l'opinion publique.

La fin d'une ère

À moins d'un mois du scrutin, il existe donc une grande incertitude quant à l'identité du prochain chef d'État brésilien. La présidente sortante a longtemps été donnée vainqueur, mais les mauvais résultats économiques et l'arrivée imprévue de Marina Silva dans la campagne présidentielle ont changé la donne. Au-delà des considérations internes, il sera aussi important de s'intéresser à l'orientation de la politique étrangère, qui pourrait être révisée à l'issu du scrutin. En effet, la consolidation du Marché commun du Sud (Mercosur), la signature d'un accord de libre-échange avec l'Union européenne (UE) de même que la coopération avec les pays du Sud et les pays émergents représentent autant de sujets sur lesquels le prochain président sera attendu.

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Avril 2018

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