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Combien reste-t-il d'«Alexandre Bissonnette» au Québec?

Et ma réponse rapide en parcourant les réseaux sociaux est malheureusement:. Mais, il n'est jamais trop tard pour les dissuader de perpétrer leur tuerie, car nous pouvons tous ajouter notre battement d'ailes de papillon pour influencer la psyché des meurtriers potentiels.
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Quelquefois, dans une tragédie comme celle de ce dimanche soir à Sainte-Foy, une fleur pousse. Cette fleur est l'amour d'une grande majorité du peuple québécois envers les immigrants, un amour que les immigrants musulmans se résignaient à douter de l'existence. Cependant, cette tragédie a aussi révélé de façon aiguë le côté sombre d'un peuple : les xénophobes, les intolérants, les racistes.

Je n'aime pas trop nommer les tueurs de masse, car ils recherchent la célébrité, peu importe le moyen macabre, mais ma question est : y a-t-il d'autres A. B. prêts à passer à l'action au Québec? Et ma réponse rapide en parcourant les réseaux sociaux est malheureusement : peut-être. Mais, il n'est jamais trop tard pour les dissuader de perpétrer leur tuerie, car nous pouvons tous ajouter notre battement d'ailes de papillon pour influencer ce système chaotique qu'est le psyché des meurtriers potentiels.

Retour sur Polytechnique

Je sais que selon la définition de la loi, ce qui s'est passé dimanche est un acte terroriste, mais je ne peux m'empêcher d'y voir des parallèles avec le tueur de Polytechnique. Les deux sont de jeunes hommes adultes avec des visions déformées de certains groupes, un les femmes, l'autre les musulmans. Ils étaient solitaires, dans leur petit monde, passionnés de fusils. Un passé d'intimidation et peu de succès dans leur vie.

Depuis que j'ai survécu au drame de Polytechnique (je sais ce qui attend les survivants de la mosquée pour le reste de leur vie), j'ai développé une fascination pour les tueurs de masse. Pas au point de garnir ma bibliothèque de livres de tueurs en séries, une des raisons selon moi qui les incite à devenir célèbre en tuant, mais je m'intéresse à ce qui peut motiver quelqu'un d'en arriver à ce point de désespoir en emportant d'autres avec lui. Et surtout le moment de passer à l'acte. Qu'est-ce qui déclenche la destruction et comment peut-on l'éviter.

Une explication venant de la science

En invoquant la science pour comprendre ce phénomène, j'ai trouvé un intéressant parallèle qui se produit dans les océans. On est toujours étonné d'une tuerie de masse, cela semble survenir sans avertissement dans l'ambiance générale d'une nation. Et c'est souvent un acte isolé qui n'est pas suivi en même temps par d'autres, quoique certains «copycats» profitent du moment pour exploser eux aussi, les jours suivants.

Or, il existe dans les océans un phénomène semblable : les vagues scélérates. Découvertes depuis peu, ce sont d'immenses vagues capables d'engloutir un navire (elles seraient la cause de certaines disparitions maritimes mystérieuses). Elles apparaissent souvent isolées, à partir de l'énergie des vagues autour et les probabilités font que de temps en temps une de ces vagues est beaucoup plus grandes que les autres.

Plus la xénophobie augmente, plus les chances qu'un individu devienne un scélérat augmentent aussi.

L'analogie que j'en fais: la xénophobie ambiante dans une population est la mer houleuse. La plupart du temps, nous avons des individus extrémistes qui caressent un projet meurtrier, mais sans passer à l'acte. Ce sont les crêtes des vagues. Mais rien pour engloutir un navire. Plus la houle augmente dans tous les sens, plus la probabilité augmente qu'une vague scélérate apparaisse.

Plus la xénophobie des individus augmente, à cause des médias, des évènements mondiaux ou locaux, de l'élection de dirigeants ouvertement racistes ou des problèmes personnels d'un seul individu, plus les chances que cet individu devienne un scélérat augmentent aussi. Tout cela dans une mer qui peut sembler inoffensive, mais qui, en fait, cache ces fameuses vagues meurtrières.

Nous sommes tous une goutte d'eau

Là où je veux en venir : c'est la responsabilité de chacun de nous, comme goutte d'eau, afin que cet océan soit le plus calme possible. Et aussi l'erreur de penser que parce que la mer semble juste un peu agitée, ce n'est pas grave, on peut l'agiter encore plus et on ne risque rien.

Eh bien non. Une simple xénophobie légère dans le peuple peut engendrer un fou tueur. Et c'est ce qu'on a vu dimanche. La plupart des Québécois avant cette journée - malgré des accusations du Canada anglais que nous sommes un peuple raciste depuis toujours - auraient affirmé que nous ne sommes pas islamophobes, que seuls quelques groupuscules posent problème.

Ma recherche sur les réseaux sociaux de ces groupes d'extrême droit (je ne les nomme pas, pour ne pas leur donner de publicité) m'a abasourdi. Leur discours intransigeant et paranoïaque contrastait avec le discours officiel des médias principaux de tolérance et d'acceptation. J'aurais pu écrire un billet contenant seulement des extraits de leurs messages.

L'extrême droit et les réseaux sociaux

Le mur du web leur permet peut-être des opinions tranchées au couteau comme «on devrait toute les renvoyer chez eux», «y ont pas d'affaires icitte», «y sont une menace urgente, réveillez-vous les boys». Le tout ponctué de fausses nouvelles et de théories du complot. Et ce sont une partie de ce genre d'individus qui ont aidé Trump à se faire élire, c'est maintenant que je le comprends.

On peut se cacher dans les ruelles du Plateau et du Mile-End et croire qu'ils n'existent pas et qu'ils n'ont aucune influence au Québec. Mais ce serait l'équivalent de se cacher dans le fond de l'eau. Les vagues sont à la surface. Je suis tout à fait d'accord que la très écrasante majorité de personnes d'extrême droit ne commettra jamais un crime, mais déjà un fou tueur, c'était trop. Et imaginez qu'il en reste deux ou trois autres au Québec.

Qu'est-ce qu'on peut faire? Premièrement, changer soi-même. Dans mon billet de blogue sur le port du voile, j'écrivais qu'autrefois j'adoptais une position intransigeante sur ce sujet et que j'aurais pu glisser vers plus d'intolérance. Mais j'ai changé et ce fut long, je l'admets. Il est possible de changer d'opinion et ceux qui sont horripilés par ma position actuelle seraient agréablement surpris d'eux-mêmes s'ils se voyaient transformer leurs idées.

Deuxièmement, ne pas alimenter le racisme latent par des commentaires sulfureux en croyant que c'est bénin. On a tous une influence autour de nous qui ensuite influence plus loin et ainsi de suite, comme une mer houleuse. Chacun de nous peut empêcher la prochaine tuerie.

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