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Le prix des fraises

En lieu et place d'un droit à la syndicalisation, le tout premier projet de loi du ministre du Travail, le projet de loi 8, impose aux travailleurs de se constituer en association, sans droit de grève, sans possibilité de moyens de pression ou de recours. Cette parodie de relations de travail ne présage rien de bon pour les ouvriers agricoles.
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Les fraises du Québec, c'est tellement bon, non ? Vous n'êtes pas sans savoir que ces petits fruits sont récoltés dans nos champs par des ouvriers tantôt mexicains, tantôt guatémaltèques ou d'ailleurs, travaillant comme ouvriers agricoles temporaires.

Ces derniers triment dur. Ils font des journées de 14 heures, sans pause, souvent six ou sept jours par semaine. Travailler à la sueur de leur front, ils connaissent. En mars dernier, la Cour supérieure du Québec donnait droit à ces ouvriers de se syndiquer pour améliorer leurs conditions de travail et de vie. Après tout, toute personne travaillant au Québec devrait être protégée par les normes du travail et le Code du travail, non ? C'est ce que la Cour supérieure avait tranché dans une cause opposant le syndicat des Travailleurs unis de l'alimentation et du commerce (TUAC-FTQ) au Procureur général du Québec.

À cette époque pas si lointaine, les choses semblaient de bon augure. La Fondation des entreprises en recrutement de main-d'œuvre agricole étrangère (FERME) s'était même dite « prête à vivre avec ce que décidera le législateur ».

Le fabuleux pouvoir d'observer

Depuis, le PLQ a pris le pouvoir le 7 septembre dernier et le nouveau ministre du Travail, Sam Hamad, en a décidé autrement. En lieu et place d'un droit à la syndicalisation, le tout premier projet de loi du ministre du Travail, le projet de loi 8, impose aux travailleurs de se constituer en association, sans droit de grève, sans possibilité de moyens de pression ou de recours.

Sous ce nouveau régime de relations de travail, « l'employeur doit donner à une association une occasion raisonnable de présenter des observations au sujet des conditions d'emploi de ses membres ». La seule obligation de l'employeur ? Signifier à l'association qu'il les a bel et bien lues.

Cette parodie de relations de travail calquée mot pour mot sur une législation ontarienne contestée jusqu'en Cour suprême ne présage rien de bon pour les ouvriers agricoles et, pourtant, on n'en parle presque pas dans les médias. Serait-ce parce que Sam Hamad a choisi de le déposer juste avant les vacances ?

Le droit d'association dérange

Comme cela a été le cas en 2003 avec le projet de loi 8 empêchant la syndicalisation des responsables de service de garde en milieu familial, le gouvernement légifère à nouveau pour empêcher des travailleurs vulnérables de se doter d'un syndicat. En agissant ainsi (encore une fois avec un projet de loi 8 !), Sam Hamad perpétue le combat des libéraux, sous Jean Charest, contre un droit fondamental protégé par les chartes canadienne et québécoise des droits et libertés.

Des abus répertoriés qui se perpétueront

Faute de véritable pouvoir de négociation et de rapport de force, les travailleurs temporaires resteront à la merci de leurs employeurs. C'est le cas pour les aides familiales à domicile, c'est le cas pour les travailleurs migrants en restauration et c'est particulièrement le cas pour les ouvriers agricoles temporaires.

Sans une législation équivalente au Code du travail, ces travailleurs ne pourront jamais s'organiser pour améliorer leur sort, contrairement à toutes les autres travailleuses et à tous les autres travailleurs au Québec. On me répondra qu'il faut être concurrentiel avec les autres pays qui exploitent une main-d'œuvre bon marché. Je répondrai qu'il faut plutôt montrer l'exemple.

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