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Avoir des «tendances suicidaires» ne signifie pas être un fou furieux

Il est humain de vouloir trouver des raisons aux tragédies et catastrophes que nous n'arrivons pas à comprendre. Mais à ce point de la discussion, il nous appartient de faire ce petit rappel : la plupart de ceux qui pensent au suicide ne sont pas des meurtriers.
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Un peu plus d'une semaine après l'écrasement de l'avion de la Germanwings, et alors que chacun tente encore de comprendre comment une telle tragédie a pu se produire, on ne cesse de parler de l'état de santé psychologique du copilote, Andreas Lubitz. Après la pathologie mentale évoquée par le parquet de Düsseldorf, les derniers articles sur le sujet font allusion à ses tendances suicidaires.

Il est humain de vouloir trouver des raisons aux tragédies et catastrophes que nous n'arrivons pas à comprendre. Mais à ce point de la discussion, il nous appartient de faire ce petit rappel: la plupart de ceux qui pensent au suicide ne sont pas des meurtriers.

Considérer des "tendances suicidaires" comme seules responsables d'un évènement aussi épouvantable que l'écrasement de cet avion est une aberration. En établissant un lien direct entre l'idée du suicide et le désir de faire du mal aux autres, on continue à stigmatiser la maladie mentale, ce qui empêche parfois les malades de demander de l'aide.

On ne saura jamais ce qui s'est passé dans la tête du copilote, mais on ne peut pas considérer que son comportement est représentatif de celui de toutes les personnes qui se sentent déjà exclues ou différentes du reste de la société. La couverture de cette tragédie permettra peut-être d'avoir plus d'empathie envers elle, à condition de s'attacher aux faits. En voici quelques-uns, à garder à l'esprit quand on évoque les questions de santé psychologique et de suicide.

FAUX : les suicides sont rares

Selon des statistiques mondiales établies en 2012, le suicide est la deuxième cause de mortalité chez les 15-29 ans. Dans la plupart des cas, cette tragédie pourrait être évitée : selon la Fondation américaine pour la prévention du suicide, près de 90 % des personnes qui mettent fin à leurs jours auraient pu être soignées.

Il existe en général des signes avant-coureurs. Si l'on estime qu'une personne est en difficulté, il faut l'encourager à se faire aider. "Être là pour quelqu'un nécessite de faire preuve d'un peu de bon sens", explique le docteur Gregory Dalack, directeur du département de psychiatrie de l'université du Michigan. "Les membres de la famille, les amis et l'entourage proche peuvent lui venir en aide sans porter de jugement. Il suffit parfois de l'accompagner à ses rendez-vous, et de l'aider à prendre son traitement ou à suivre une routine quotidienne."

VRAI : vous connaissez surement quelqu'un qui souffre d'une maladie mentale

Les troubles psychologiques ne sont pas qu'un concept un peu abstrait, sans rapport avec votre entourage immédiat. Il y a des chances que vous connaissiez quelqu'un qui en a déjà souffert. Environ un quart des Américains sont diagnostiqués chaque année.

FAUX : les gens qui souffrent d'une maladie mentale sont fous

Non, non, trois fois non. Les troubles psychologiques ne sont pas synonymes de folie. Vous ne diriez pas de quelqu'un qui a un handicap physique qu'il est responsable de son état, alors faites preuve de la même bienveillance envers celui qui souffre d'une maladie mentale. "Ils n'ont pas plus choisi d'être malades que vous n'avez voulu attraper la grippe", poursuit le Dr Dalack. "Vous n'aviez rien demandé et vous n'êtes pas capable de la faire disparaître d'un simple claquement de doigts. Si nous estimons qu'il en va autrement de la dépression, nous augmentons le risque que ceux qui en souffrent se fassent du mal."

VRAI : on peut surmonter ses pensées suicidaires

Les informations relayées sur les "tendances suicidaires" d'Andreas Lubitz laissent entendre qu'une personne suicidaire le sera toujours. C'est tout simplement faux. Beaucoup de malades ont fini par avoir des vies épanouissantes, y compris sur le plan professionnel. Dans une lettre qu'il s'était adressée à lui-même après avoir renoncé à ses idées suicidaires, le journaliste S.L. Young racontait comment sa dépression avait évolué :

Il faut que tu comprennes que si tu choisis de ne pas passer à l'acte demain, cette décision n'aura pas seulement des conséquences pour toi. Elle affectera aussi de manière positive la vie des autres, grâce au travail que tu mèneras sur toi-même l'année prochaine, et les suivantes.

FAUX : les personnes qui souffrent de troubles mentaux se soucient peu des autres

En tirant des conclusions générales à partir d'un cas particulier, nous stigmatisons involontairement toute une communauté de malades. Comme l'écrivait récemment le chroniqueur médical Dan Diamond dans une tribune adressée au journal Forbes, la dépression seule n'explique pas ce passage à l'acte terrifiant. "Posez la question à n'importe lequel des dix millions d'Américains qui souffrent de grave dépression à un moment donné. Les plus courageux vous répondront qu'elle les détruit, qu'elle les amène à se détester et à se cacher. Mais elle ne fait pas d'eux des meurtriers."

Ce blog, publié à l'origine sur Le Huffington Post (Etats-Unis), a été traduit par Aurélie Le Pape pour Fast for Word.

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