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noël, sans majuscule

Les histoires de familles déchirées par le deuil dans le temps de Fêtes, elles courent les rues, sans crainte aucune, sachant qu'elles se sont déjà cassé la face contre le mur le plus massif qui soit, qu'il n'y a plus de tournants cachés. Moi, l'affaire, c'est que j'ai surtout appris à faire le deuil d'une personne que j'ai oubliée, quelque part dans mon enfance, et qui n'est plus la même depuis bon nombre d'années.
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Décembre, chants naïfs de béatitude autour d'un sapin, manteau Chanel d'une blancheur immaculée qui recouvre le sol, course effrénée à la recherche du présent parfait pour les êtres chers. Décembre, dernier mois de l'année, dernières semaines avant les vacances, dernier sprint avant les examens finaux; décembre, qui ne serait pas le même sans ses réunions familiales à l'occasion de Noël. Que de réjouissances.

Avez-vous déjà pris le détour un peu trop vite en courant du salon à la cuisine avec les cousins, le soir du réveillon, avant de vous péter la gueule dans le mur tout enguirlandé, gâchant quelque peu vos propres réjouissances festives? Moi, jamais : pas avant cette année. Cette année, j'ai pogné mon mur, et en esti . Mon mur s'appelle Papa.

Je m'empressais vers Noël, plus rapidement qu'au cours des dernières années, et c'était moi la plus rapide. Vite comme l'éclair, glissant sur mes knee sox, tentant de rejoindre le plus promptement possible cette promesse de délectables plats chauds, de rires et de vacances, mais j'ai manqué le tournant et je me suis effondrée après m'être fracassée contre la réalité: je ne serais pas avec Papa à Noël cette année.

Les histoires de familles déchirées par le deuil dans le temps de Fêtes, elles courent les rues, sans crainte aucune, sachant qu'elles se sont déjà cassé la face contre le mur le plus massif qui soit, qu'il n'y a plus de tournants cachés. Moi, l'affaire, c'est que j'ai surtout appris à faire le deuil d'une personne que j'ai oubliée, quelque part dans mon enfance, et qui n'est plus la même depuis bon nombre d'années. Il est encore là, certes, quelque part, mais avec le temps, j'ai appris à ne plus croire au père Noël et à ne plus attendre qu'il me ramène mon Papa pour de bon, le 24 décembre au soir. Je sais bien, désormais, que je ne trouverai pas cet homme par magie dans les yeux du nouveau père qu'il est devenu, qu'il ne sera pas plus là à Noël qu'à n'importe quel autre jour de l'année. Pour la toute première fois, je me suis autorisée à ne pas attendre le son de clochettes à la fenêtre, tentant de me persuader que cette fois, le miracle dont on parle dans tous les bons films de Noël sera pour moi - pour nous.

Je ne pensais pas que ce serait difficile de prendre soin de moi en cette période de réjouissances, de m'organiser un temps des Fêtes entourée des gens que j'aime le plus au monde, sachant que je ne me chicanerai avec personne au réveillon, pour une fois, et que si j'ai mon téléphone en mains, ce ne sera pas pour m'éloigner du profond malaise que je ressens. En pratique, le bonheur de s'éloigner d'une relation qui nous pète la joie de vivre, c'est pas mal moins le fun qu'en théorie. C'est tout en sourires, en tourtières et en rigodons, s'imaginer un Jesus birthday loin de ce qui nous a fait brailler pendant des années, mais quand ça signifie un Noël sans Papa, ça ressemble un peu plus à Nightmare Before Christmas. Je suis un peu désorientée, parce que je ne sais pas comment ça marche tout à fait, Noël, pour être bien sincère. Je m'arrange comme je le peux, je me bricole une famille rapiécée parce que je ne me sens plus si Lapierre que cela, depuis que j'ai quitté sa majuscule.

À défaut d'être cette Lapierre à part entière qui mérite son titre, je suis un peu de Lalonde, un peu de Thibault et un peu de Léger, quand je suis avec Maman et son mari chez ma grand-maman; un peu de Cadieux, maintenant que je suis émotivement adoptée par la famille d'une amie, qui m'a recueillie pendant plusieurs mois; un peu de Lanteigne, et un peu de Kiraly, le soir du 25 décembre, puisque désormais j'ai le chez-moi le plus chaleureux et plein d'amour de la région. Sans avoir de famille à moi, qui porte mon nom et où en principe, j'aurais ma place par défaut, j'en ai tout un tas, je suis la petite sœur de tout le monde, la fille adoptive, la grande à sa Maman. Noël perdra un peu de son prestige, il deviendra en quelque sorte minuscule sans mon père, mais je suis minuscule moi-même, dans cette perte d'identité familiale que je n'aurais pas crue aussi éprouvante en cette période de l'année, et je pense que ce qui nous rend miraculeux, noël et moi. Noël pourra bien devenir noël, et Lauriane Lapierre petite Lou, j'imagine que cette année, mon vœu se réalisera et nous serons enfin heureux tous les deux.

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