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Un geste symbolique

En octobre dernier, j'ai lu ledit texte de Gab Roy. En entier. Ça m'avait complètement révoltée et je fus tout de suite prise d'un élan d'empathie pour Mariloup Wolfe, tout en étant très surprise, incrédule et déçue de ne pas entendre parler de poursuite nulle part.
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Samedi 15 mars, j'entamerai la première de trois journées de formations au Centre d'aide et de lutte aux agressions à caractère sexuel (CALACS) de l'ouest de l'Ile afin de devenir bénévole auprès de femmes âgées de 14 ans et plus ayant été victimes de ce type d'agressions et désirant obtenir de l'information.

Beaucoup d'entre vous, comme moi en faisant mes courses au supermarché, ont pu remarquer la page couverture du Journal de Montréal de dimanche: Mariloup Wolfe intente une poursuite de 300 000$ contre le blogueur Gab Roy pour un texte qu'il a publié en octobre dernier.

Ayant pris connaissance de la nouvelle la veille via les réseaux sociaux, je me suis demandée si c'était par hasard que la poursuite soit tombée le jour de la Journée internationale de la femme. Il s'avérait en faites que non, c'était voulu.

En octobre dernier, j'ai lu ledit texte de Gab Roy. En entier. Avant son passage à Tout le monde en parle et la controverse que cela avait suscité. Ça m'avait complètement révoltée et je fus tout de suite prise d'un élan d'empathie pour la principale intéressée dans l'article. Parce que c'était révoltant. Insipide. Humiliant et dénigrant. Peu importe qui aurait été visé dans le texte, ma réaction aurait été la même. Et si ça avait été moi, j'aurais franchement eu du mal à dormir.

Je fus d'abord très surprise, incrédule et déçue de ne pas entendre parler de poursuite nulle part. Je ne suis pas avocate ni spécialiste en droit, mais dans mon for intérieur, il était évident qu'il y avait matière à traîner ça devant les tribunaux et que c'était beaucoup trop gros pour être passé sous silence et être tout simplement ignoré. Pour moi, ignorer de tels propos serait les cautionner dans un sens et minimiser leur impact et leur importance sur la victime, mais également sur toutes les femmes qui peuvent ou ont été victimes de ce genre de choses dans la vraie vie.

Beaucoup de gens disent que lorsque l'on est une personnalité publique, il faut accepter d'être la cible de certains humoristes ou parodieurs, que ça vient avec la notoriété, que c'est signe même de notre succès et de notre présence sur la place publique. Quand on fait le choix de mener une carrière dans l'oeil public, il faut être solide psychologiquement sinon on ne fait pas ce métier. Il faut savoir en prendre et en laisser. Savoir rire de soi. Et je suis tout à fait d'accord avec ça et je suis capable de le comprendre. J'ai un très bon sens de l'humour et les personnes qui sont amenées à me côtoyer sur une base régulière (ou même moins) pourront rapidement constater que j'ai le rire très facile et que je prends très bien l'humour et les blagues.

Or, il y a une marge ici. Ce n'est plus de l'humour et si c'en est, c'est de l'humour de très mauvais goût. La limite de l'acceptable a clairement été dépassée. Le problème ici n'est pas de savoir si Gab Roy aurait ou non porté de tels gestes dans la réalité. Le problème est qu'ici, on est en train de salir et de ridiculiser une vraie personne, une femme, dans un monde où les inégalités entre les hommes et les femmes se font toujours sentir et où la très grande majorité des victimes d'agression sexuelle sont des femmes. Je n'imagine pas le stress que cela a occasionné chez Madame Wolfe et le stress que les procédures judiciaires risqueront d'amener également, car c'est souvent ça qui décourage les victimes de tels actes de porter plainte.

Je viens d'une famille où bon an, mal an, cinq membres sur sept sont de sexe féminin. Et j'effectue également mon stage final d'intervention dans une maison d'hébergement pour femmes en difficulté. De plus, j'ai côtoyé beaucoup de mes consoeurs dans différents milieux et lorsque j'étais plus jeune et il y a tellement d'histoires que j'ai entendu entre les branches ou directement en lien avec ce genre de choses. C'est beaucoup plus répandu qu'on ne le croit lorsque l'on sait que seulement une agression sexuelle sur dix est dénoncée à la police. C'est loin d'être banal.

Je fus soulagée de voir que Mme Wolfe a décidé de porter plainte. Parce que de ne n'avoir rien entendu parler à ce sujet me laissait sincèrement un goût amer dans la bouche. Je me disais, même si je n'étais pas directement concernée, qu'il faut que quelque chose se passe, que ce n'est pas normal d'écrire de telles horreurs en toute impunité sous prétexte que c'est une "blague". 300 000$, ce n'est pas pour se faire du cash vite fait, ou de la pub. C'est symbolique. C'est, à mon humble avis, pour représenter les torts causés à la victime, mais aussi pour dissuader quiconque d'imiter ce blogueur. C'est pour montrer que c'est grave, que ça ne se fait pas et que ce n'est pas acceptable ni à prendre à la légère. Il faut cesser de dire n'importe quoi au nom de la "liberté d'expression".

Je vous souhaite bonne chance Mme Wolfe pour la suite des choses. Merci de vous être levée debout pour nous toutes, mais également pour vous. Je vous respecte énormément.

Petite nuance que je juge importante: Quand je dis qu'ignorer reviendrait à cautionner de tels propos, je parle dans le sens large, dans la population en général, sans viser Mme Wolfe directement. On ne peut jamais forcer une victime à dénoncer les torts qu'elle a subi, il y a une panoplie de facteurs à prendre en compte pour cette personne avant de prendre cette décision et si elle fait le choix de ne pas dénoncer, cela ne veut pas dire qu'elle accepte ce qui s'est produit, mais qu'en fait, le choix de ne pas porter plainte représente plus de désavantages qu'avantages à la lumière de sa propre situation et de ses priorités qui lui sont propres.

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