Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

La montréalisation de la CAQ

L'entourage de François Legault souhaitait voir partir Gérard Deltell depuis longtemps. Ils doivent aujourd'hui vivre avec le résultat.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

L'élection partielle dans Chauveau fut une chaude lutte entre la CAQ et les libéraux. À vrai dire, la notoriété de Jocelyne Cazin à elle seule donnait celle-ci partante avec une longueur d'avance. L'héritage du député sortant donne également, en principe, une assise confortable pour le candidat du même parti qui tente de lui succéder.

Gérard Deltell n'est pas un simple député parmi les autres. Il est le dernier chef de l'Action démocratique du Québec. Et l'ADQ, en principe, a fusionné avec la CAQ. Ainsi, Gérard Deltell serait en quelque sorte le représentant des valeurs adéquistes au sein de la Coalition Avenir Québec. Pourtant, le noyau adéquiste existe-t-il toujours au sein de la CAQ?

Il est très fréquent d'entendre les détracteurs du parti dire que la CAQ est «l'ADQ 2.0», le même parti sous un autre nom. Dans la réalité, ce n'est vraiment pas le cas. Dès la fondation du parti, l'équipe de François Legault a complètement avalé l'ADQ jusqu'aux meubles, crayons et calepins. Les adéquistes ont été complètement évincés de leur propre parti pour faire place à une nouvelle genèse politique hybride qui fusionne ce que nous pourrions appeler les «néo-péquistes» et une autre faction issue des libéraux fédéraux. La rétrogradation de l'ancien chef de l'ADQ du poste de leader parlementaire ne fut ni plus ni moins qu'un coup de grâce envers l'héritage adéquiste, en plus d'un manque de respect.

La vérité est la suivante: l'entourage de François Legault souhaitait voir partir Deltell depuis longtemps. Ils se sont réjouis de le voir partir. Ils doivent aujourd'hui vivre avec le résultat.

Selon le directeur général du parti, l'ex-député Stéphane Le Bouyonnec, ce n'est pas grave si la CAQ a perdu Chauveau. «Il s'agit d'une bonne médaille d'argent. [...] Malheureusement, l'austérité est bien vue dans la région». Cette déclaration précise me dépasse. Le Parti libéral ne se fait-il pas accuser d'appliquer la plateforme électorale de la CAQ? Comment un parti prônant la réduction de l'État peut-il plaider que nous sommes actuellement en période austère alors que les dépenses budgétaires des programmes sont actuellement en hausse?

La CAQ se veut un parti pragmatique où les solutions adoptées ne seraient pas partisanes, mais plutôt issues du «gros bon sens». Cela peut sembler être une excellente idée à la condition d'être muni du dit «gros bon sens», lequel est très subjectif.

Davantage subjectif, François Legault est un économiste de gauche. Il croit que l'intervention du gouvernement dans l'économie est bénéfique, d'où la plateforme du projet Saint-Laurent. Il a à cœur l'environnement au point de faire une conférence de presse conjointe avec Amir Khadir. Il souhaite étendre les pouvoirs de la loi 101 dans les entreprises de juridiction fédérale. Contrairement aux promesses de projet-pilote faites par l'équipe de François Legault aux militants adéquistes lors de la fusion, Legault n'a jamais faite valoir comme solution la mixité publique-privée en santé. Plutôt que de renforcer la fidélité de sa base militante, François Legault espère adopter des positions consensuelles et populaires qui ratisseront le plus d'adhésions possible. Le registre des armes à feu en est un exemple flagrant. Jocelyne Cazin, elle-même, n'adoptant pas la même position que le parti sur cet enjeu, a choisi volontairement de cultiver l'ambiguïté chaque fois que cette question lui fut posée pendant la campagne.

Se logeant de plus en plus dans un spectre progressiste, la CAQ s'éloigne de l'ADQ et, par la même occasion, de la région de Québec. Les caquistes ont maintenant un choix à faire. Ils peuvent soit tenter de reconquérir Québec, ou bien enterrer officiellement l'héritage adéquiste tout en rêvant de conquérir Montréal.

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

7 novembre 1998

La carrière de François Legault

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.