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J'ai payé en 2011 13 754 $ d'impôts au provincial, plus une somme indéterminée de taxe de vente provinciale et autres tarifs. Que me suis-je procuré pour ce montant? Des soins de santé pour ma famille, l'éducation gratuite pour mes enfants, des dizaines de milliers de kilomètres de routes gratuites, des garderies à sept dollars, un des régimes de congés parentaux les plus généreux au monde, un système de justice, la sécurité publique, et finalement, en bonus, un filet de sécurité sociale, bien imparfait, qui permet de ne pas laisser les plus pauvres dans la rue.
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Ce texte est le premier d'une trilogie qui portera sur les impôts, le déficit, et la dette.

Les débats des dernières semaines ont remis à l'avant plan la question de la fiscalité. Combien de fois avons-nous entendu des commentateurs outrés déchirer leur chemise en dénonçant le gaspillage de fonds publics de nos gouvernements ou s'insurger contre un niveau de taxation trop élevé qui fait suffoquer les contribuables? On ne compte plus les politiciens qui participent à ce dénigrement de l'État et qui font miroiter l'illusion de baisses d'impôts sans baisses de services.

Il est devenu de bon ton de dénigrer les impôts comme une atteinte à la liberté, une ponction injustifiée dans notre portefeuille. Le mouvement Liberté Québec, l'Institut économique de Montréal, la Fédération des Chambres de commerce et les autres lobbys des privilégiés ont fait de la diminution du fardeau fiscal un projet de société.

Plus personne, en fait, ne se donne la peine de réfléchir au panier de services que nous nous offrons en payant notre impôt sur le revenu. Lorsqu'on y regarde de plus près on se rend compte de l'aubaine que cela représente.

Prenons mon cas: j'ai payé en 2011 13 754 $ d'impôts au provincial, plus une somme indéterminée de taxe de vente provinciale et autres tarifs. Disons pour arrondir un grand total de 20 000 $. Que me suis-je procuré pour ce montant? Des soins de santé pour ma famille, l'éducation gratuite pour mes enfants, des dizaines de milliers de kilomètres de routes gratuites, des garderies à sept dollars, un des régimes de congés parentaux les plus généreux au monde, un système de justice, la sécurité publique, et finalement, en bonus, un filet de sécurité sociale, bien imparfait, qui permet de ne pas laisser les plus pauvres dans la rue.

Le tout pour un peu plus de 1600 $ par mois. Ou 53 $ par jour. Combien me coûteraient ces services si je devais me les procurer à leur coût véritable? J'avoue ne pas le savoir. Que puis-je me procurer pour le même montant? Voici quelques comparaisons:

Je paie environ 160 $ par mois, ou près de 2000 $ par année à Vidéotron pour le téléphone, le câble, un cellulaire et Internet. Donc, l'équivalent de 10% de mes impôts provinciaux seulement pour mes télécommunications.

Prenons un autre exemple: mes paiements d'auto et l'achat d'essence pour l'alimenter (taxes exclues) me coûtent 6 500 $ par année. Donc je paie l'équivalent du tiers de tous mes impôts provinciaux uniquement pour me déplacer.

Je poursuis: je paie 200 $ par mois, 2400 $ par année en assurances de toutes sortes: auto, logement, vie, invalidité, assurance collective. À ce prix, je peux vous garantir que je trouve que l'assurance maladie est une aubaine.

Me voilà à 10 900 $, soit l'équivalent de 54,5% de mes impôts provinciaux pour le transport, les télécommunications et l'assurance. Quand je compare cela avec ce que mes impôts me permettent d'obtenir en services, je considère que c'est une aubaine. Les impôts, c'est la force de l'achat groupé, c'est le Groupon des services collectifs! Le plus beau dans tout cela: je fais plus d'argent, je paie plus, j'en fais moins, je paie moins. Toujours pour le même panier de services. Quelle entreprise au monde nous offre un deal pareil?

Il s'en trouve pour nous dire que c'est encore trop cher et que nous devrions baisser nos impôts, vider notre panier de service, et payer uniquement les services dont nous avons besoin à l'usage. Bref, si j'ai de l'argent je consomme plus de services, si j'en ai moins j'en consommerai moins. Ceux-là, bien souvent, sont les mieux nantis qui, contrairement à la classe moyenne et aux plus démunis, paient plus qu'ils ne retirent en services du système.

C'est pourquoi je m'inquiète de voir certains dans la classe moyenne croire à tort que des baisses d'impôts (et les coupures de services inévitables qui s'ensuivraient) les enrichiraient. Imaginez un instant que l'on diminue mes impôts du quart: je m'enrichirai automatiquement de 5000 $. Mais serai-je vraiment plus riche si l'État ou l'entreprise privée commencent à me demander de payer ces services au prix du marché? La réponse est simple: oui, si je suis riche, si je n'ai pas d'enfants, si je ne suis pas malade. L'inverse si j'appartiens à la classe moyenne ou démunie, ou si j'ai besoin de ces services.

Et qu'arrivera-t-il si un jour je ne peux plus contribuer? Mes concitoyens continueront de me soutenir à travers le filet de sécurité de l'État et je pourrai continuer de bénéficier de tous ces services, même si je suis retraité, si j'ai le cancer, si je suis étudiant, chef de famille monoparentale, si je travaille à temps partiel au salaire minimum, si je souffre de dépression ou de burnout. C'est l'assurance ultime. Aucune compagnie d'assurance dans le monde ne vous donnera autant pour si peu.

Pour toutes ces raisons, je crois fermement que la part de mes revenus que je paye en impôts et taxes est probablement l'un de mes meilleurs investissements. C'est une véritable aubaine. Il serait temps que nous cessions de laisser toute la place aux lobbys anti-impôts et que nous commencions à défendre ce que nous nous offrons collectivement à travers cet extraordinaire instrument de solidarité qu'est l'impôt.

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