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Morcellement de l'offre politique et éternité libérale

Prétendre vouloir mettre fin à cette hégémonie du Parti libéral du Québec en créant un nouveau parti politique, c'est faire fausse route.
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Le 10 avril, Thomas Mulcair fut humilié devant ses membres - et l'ensemble des Canadiens - après n'avoir obtenu que 48 % d'appuis lors d'un vote de confiance, s'étant donné comme seuil minimal 70 %. La défection de l'homme politique, qualifié de redoutable parlementaire, marque un schisme entre la frange québécoise du parti fédéral avec le reste du Canada.

Le parti fédéral, qui détient une base militante particulièrement élevée au Québec, joue son avenir. Il n'est plus le simple fait des Québécois, qui possédaient à eux seuls de 2011 à 2015 près de 60 % de sa députation. Le NPD est maintenant tout aussi le fait de la Colombie-Britannique et de l'Ontario, qui ont une répartition plus égale de leurs sièges vis-à-vis le Québec.

Le désaveu envers Thomas Mulcair va-t-il de pair avec un désaveu envers le Québec? Certains signes avant-coureurs semblaient présager que oui, notamment avec l'arrivée en scène du NPD-Québec. Il n'est donc aucunement surprenant de voir aujourd'hui de nombreux ex-députés du parti se prononcer en faveur d'une telle option, qui présenterait des candidats aux prochaines élections québécoises .

Encore un autre parti provincial?

Rappelons en préambule qu'un NPD-Québec a déjà existé de 1963 à 2002 (pour ensuite être absorbé par l'Union des forces progressistes) et qu'une formation politique, quoique éphémère, avec sensiblement les mêmes ambitions du potentiel NPD-Québec, notamment sur la question nationale, a existé de 2012 à 2015 sans toutefois trouver preneur. Il s'agit de l'Union citoyenne du Québec, qui présenta des candidats ici et là lors des deux dernières élections provinciales. Toutefois, avec l'offre inépuisable de formations politiques au Québec (17 au total), on ne sait même plus où donner de la tête.

L'arrivée d'un autre parti le moindrement populaire diviserait le vote, une fois de plus. Le Parti libéral du Québec, presque devenu indivisible, en tirerait largement profit. De fait, lors de la dernière élection provinciale, à peine 24 % des électeurs francophones avaient voté pour le Parti libéral. Évidemment, les autres formations politiques (PQ, CAQ et QS) ont comme base électorale une forte majorité de francophones. Il est donc en un sens compréhensible que les anglophones votent en grande partie pour le Parti libéral, puisqu'il s'agit de la seule majeure formation politique ouvertement et résolument fédéraliste.

Un NPQ-Québec empirerait alors la situation, surtout si elle obtient un certain engouement. Présentement, une frange de militants et d'ex-députés du parti fédéral sont particulièrement désabusés de la situation actuelle, tant par la déconfiture électorale d'octobre 2015 que par celle de leur chef. Par ailleurs, ils risquent d'être encore plus blasés avec la mainmise grandissante des autres provinces sur le NPD, tel nous l'avons vu avec le rejet albertain du manifeste antiprétrole Un grand bond vers l'avant. Pis encore, Thomas Mulcair pourrait très bien refaire le saut en politique provinciale dans le giron québécois du NPD, son mandat de chef se terminant dans deux ans, ce qui correspondrait parfaitement avec les élections québécoises d'octobre 2018.

Subdivision de l'échiquier gauche-droite

Ceci est sans rappeler la création imminente d'un autre parti politique issu du mouvement Les orphelins politiques, aspirant lui aussi à «refonder la politique québécoise» pour devenir un parti d'avant-plan au Québec, tout en laissant de côté la question nationale - un peu à la même manière de la Coalition Avenir Québec, mais à gauche. Malgré la bonne volonté des Orphelins pour mettre fin à l'hégémonie du Parti libéral du Québec, les choses s'envenimeront avec la division du vote.

Nous savons que l'offre politique se divise tantôt à gauche, tantôt à droite. Néanmoins, l'axe gauche-droite se subdivise à son tour entre l'option fédéraliste et indépendantiste, ce qui rend l'éventail de choix encore plus large. Pas que ce soit nécessairement une mauvaise chose. Cependant, la question nationale, advenant l'élection d'une formation politique prônant la souveraineté du Québec, se réglera par une consultation populaire, que ce soit avec le Parti Québécois ou Québec Solidaire : par référendum, les gens n'auraient qu'à cocher non ; par assemblée constituante, ils n'auraient qu'à faire valoir publiquement leur désaccord. Il semble donc quelque peu farfelu que l'ex-députée Isabelle Morin prétende qu'il manque un parti fédéraliste de gauche. Elle n'aurait qu'à faire valoir son opinion sur la question nationale lorsque viendra le temps.

En somme, les libéraux voient fort probablement d'un bon œil ce qui se trame. Notre mode de scrutin actuel, désuet et adapté au bipartisme, ne favorise pas l'émergence de formations nouvelles. Qui plus est, le Parti libéral est résolument en défaveur d'une réforme du mode de scrutin.

Advenant le cas d'un tel morcellement de l'offre politique, il sera extrêmement difficile de s'en sortir, surtout si l'on tient compte de sa réélection en 2014 malgré la Commission Charbonneau ainsi que sa cote de popularité actuelle, malgré tous les scandales de fraude et de corruption.

Actuellement, la division du vote profite largement au PLQ. Prétendre vouloir mettre fin à cette hégémonie en créant un nouveau parti politique, c'est faire fausse route.

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Yves-François Blanchet

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