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Conte de Noël moderne

Laissez-moi vous raconter l'histoire récente du pôle Nord. Le pôle Nord est un État de droit. Sa capitale économique étant bien sûr le Village du père Noël. C'est là que sont produits tous les cadeaux livrés dans les chaumières le 24 décembre au soir. À l'origine, le pôle Nord était un endroit où régnait la paix et le bonheur. Mais dans les années 80, le père Noël a été obligé de vendre ses actifs à un conglomérat anglo-américain, la...
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Laissez-moi vous raconter l'histoire récente du pôle Nord. Le pôle Nord est un État de droit. Sa capitale économique étant bien sûr le Village du père Noël. C'est là que sont produits tous les cadeaux qui seront livrés dans les chaumières le 24 décembre au soir. À l'origine, le pôle Nord était un endroit où régnait la paix et le bonheur. Dans les années 80, le père Noël a été obligé de vendre ses actifs à un conglomérat anglo-américain, New Order Entreprise Limited ou N.O.E.L. Qu'est-il arrivé au vrai père Noël? Aux dernières nouvelles, il se serait suicidé en Russie; alcoolique, toxicomane et acculé au pied du mur par les dettes de jeu.

Depuis que la multinationale N.O.E.L. a pris les «rênes», la situation a beaucoup changé au pôle Nord. Ils ont jugé que les lutins bénéficiaient de «trop bonnes» conditions de travail, puisqu'ils étaient protégés par le Syndicat des Lutins Ouvriers (SLO). Alors, la compagnie, qui contrôle la majorité des journaux, chaînes de télévision et de radio du pôle Nord, a décidé de déclarer la guerre au syndicat. Une grève des lutins s'en est suivie. L'opinion publique des citoyens du pôle Nord était plutôt favorable aux grévistes, mais suite au matraquage médiatique qui dénonçait la violence des grévistes (des décorations de Noël avaient été détruites), le vent a commencé à tourner. Le porte-parole du syndicat a été sali dans les médias, la compagnie a tenté de l'acheter, mais comme il restait incorruptible et populaire, les «Services secrets du pôle Nord» lui ont inoculé la tuberculose. Il est mort dans d'atroces souffrances.

Les grévistes ont donc été obligés de retourner au travail en acceptant des baisses de salaire et des heures prolongées. Jugeant qu'elle pouvait augmenter la productivité, la compagnie a commencé à engager des «travailleurs temporaires» du Mexique, du Guatemala et de la Roumanie, et tout cela protégé par les législations du gouvernement du pôle Nord. De grands chantiers de Noël ont été créés, où la compagnie gérait les habitations et la nourriture des travailleurs, à des prix plus élevés que la moyenne nationale. Tranquillement, la drogue et la prostitution ont été implantées dans ces «camps de travail», grâce à une organisation criminelle nommée «les amis du Père Noël», dont le chef maintient des liens avec la haute direction de la multinationale N.O.E.L. Le premier ministre du pôle Nord aurait cependant déclaré: «Il n'y a pas plus de cocaïne et de prostitués qu'ailleurs dans le monde», rassurant ainsi une population inquiète. (Il faut aussi préciser que comme le pôle Nord est un État de droit, la compagnie a préféré s'enregistrer à la Barbade pour bénéficier d'avantages fiscaux et de réglementations inexistantes.)

Récemment, le gouvernement du pôle Nord a décidé d'ouvrir son territoire (baptisé «le pôle Nord pour tous») à l'extraction minière et de céder les droits d'exploitations de plusieurs sites à des compagnies minières chinoises. Le gouvernement a même fourni les infrastructures, payées à même les impôts des contribuables lutins, pour accélérer le pillage. Étrangement, la population du pôle Nord a accepté cette mesure sans broncher, parce que les médias pôle-nordistes ont martelé le message de la «création de la richesse».

Puis, le Petit train du père Noël, géré par la MNA (Mère Noël et associés) une filiale de N.O.E.L. a été mis à contribution pour transporter les matières dangereuses et les minerais rares. L'un des trains a déraillé en plein centre-ville du Village du père Noël et a causé un déversement d'uranium appauvri. Bilan: des dizaines de morts, des centaines de personnes intoxiqués et des terres contaminés. La MNA, N.O.E.L. et le gouvernement se sont dissociés de cet «accident». Tous en chœur, ils ont blâmé le lutin conducteur qui s'était endormi, parce que ses nouvelles conditions de travail l'obligent à faire des «shifts» de 18 heures consécutives. Il a été jugé par le tribunal du pôle Nord et a été fusillé dans la journée. La MNA a déclaré faillite et s'appelle aujourd'hui NNA (Nouveau Noël et associés).

Aujourd'hui, les conditions des travailleurs lutins continuent de se dégrader. La corruption et la collusion sont institutionnalisées. Même les chroniqueurs qui se disent plus «progressistes», légitiment le système actuel du pôle Nord, en nous racontant leurs histoires sans intérêt de bûche de Noël et de «dwarf interest», et continuent de passer sous silence la dégradation des conditions de travail des lutins ouvriers. Les autres chroniqueurs se contentent de vomir sur les syndicats, sur les étudiants, sur tous ceux qui protestent réellement contre l'ordre établi et continuent de créer de la peur en brandissant le spectre d'un pôle Nord socialiste ou d'une République du pôle Nord islamiste.

Mais tout va bien. Le pôle Nord est une démocratie parce que les citoyens peuvent voter librement à tous les quatre ans.

Joyeux Noël

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