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Le nationalisme vide de la CAQ

En politique, si tu ne te définis pas toi-même, on le fait à ta place, et il est ainsi difficile de te refaire une nouvelle image, surtout quand tu ne sais pas tout à fait qui tu es ni où tu t'en vas.
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La Coalition avenir Québec continue toujours de se chercher, et surtout, tente de se différencier du Parti libéral tout en essayant d'aller chercher ses électeurs. On a réellement de la difficulté à comprendre ce que la CAQ veut...

D'un côté, François Legault affirme que la CAQ est nationaliste, mais qu'elle veut demeurer dans le Canada, donc est d'une certaine façon fédéraliste, mais refuse simultanément d'employer ce terme tout en continuant de clamer haut et fort qu'il y a maintenant un autre parti qui veut demeurer au sein de la grande famille canadienne.

Évidemment, nous comprenons que la CAQ cherche à se définir et surtout à se faire enlever l'étiquette d'indépendantiste refoulé que le Parti libéral lui a collée aux fesses...

Cependant, force est d'admettre que la Coalition, avec sa proposition d'article 1 qui suit: «La Coalition avenir Québec est un parti nationaliste moderne dont l'objectif premier est d'assurer le développement et la prospérité de la nation québécoise à l'intérieur du Canada, tout en défendant avec fierté son autonomie, sa langue, ses valeurs et sa culture», n'a rien de nouveau en ce qui la concerne...

Il est difficile de te refaire une nouvelle image, surtout quand tu ne sais pas tout à fait qui tu es ni où tu t'en vas.

En réalité, cette proposition n'est pas bien différente de celle du Parti libéral puisque la formation de Couillard pourrait facilement se réclamer - en d'autres mots - de cette position fédéraliste... N'y a-t-il pas une aile nationaliste molle au PLQ ?

À mon sens, il y a deux problèmes à la CAQ qui expliquent ses déboires identitaires.

Premièrement, la Coalition a le même problème que la défunte Action démocratique du Québec - c'est le parti d'un seul homme, et les meilleures têtes délaissent le parti pour une autre carrière, ce qui fut notamment le cas de Christian Dubé qui est maintenant à la Caisse de dépôt - et d'autres qui traversent au Parti libéral du Québec, ce qui démontre également que les deux formations se ressemblent beaucoup à bien des égards.

Deuxièmement, son nationalisme en est un de pacotille et frileux puisqu'il adhère entièrement au statu quo fédéraliste sans pour autant vouloir présenter une nouvelle entente constitutionnelle avec le Canada et, dans le cas d'un non de la part du fédéral, de tenter l'aventure indépendantiste afin de démontrer son attachement et son intérêt premier à la nation québécoise.

Pourrait-on remémorer à François Legault que le Québec n'a pas signé la Constitution canadienne?

Rappelez-vous l'Union nationale de Maurice Duplessis, qui flirtait avec l'idée de se sortir de la Confédération, et de Daniel Johnson père avec son «égalité ou indépendance» dans laquelle il affirmait «l'indépendance si nécessaire, mais pas nécessairement l'indépendance».

L'Union nationale de cette époque était réellement nationaliste puisqu'elle jonglait avec l'idée d'indépendance du Québec tout en faisant la promotion d'un réel autonomisme, particulièrement par l'idée d'un rapport d'impôt distinct du fédéral.

Ce n'est visiblement pas le cas de la CAQ qui, elle, a pris un abonnement à vie au Canada, sans pour autant vouloir mettre un terme au statu quo et régler une fois pour toutes les nombreuses injustices que le Québec a connu dans son histoire face à Ottawa, dont, notamment, la nuit des Longs Couteaux et l'échec du lac Meech provoqué par le père de notre premier ministre actuel, pour ne nommer que ceux-là...

En somme, tu ne peux te réclamer du nationalisme et de l'autonomisme si tu n'as rien à offrir de concret en ce sens, si ce n'est que des mots...

À ce titre, un vrai parti nationaliste qui veut demeurer dans le Canada et améliorer son sort en son sein doit toujours garder dans sa poche de derrière la carte d'atout majeure d'une possible sortie du Canada s'il veut réellement représenter l'intérêt supérieur de la nation québécoise. Il doit ainsi démontrer qu'il n'est pas à la botte d'Ottawa et que le Québec est libre de son destin.

À titre anecdotique, j'avais rencontré jadis à Matane François Legault, lorsqu'il faisait la tournée du mouvement de la Coalition avenir Québec avec l'homme d'affaires Charles Sirois. Évidemment, Pascal Bérubé avait envoyé ses espions à cette soirée, ce qui est tout à fait normal, mais, ce soir-là, j'avais eu une petite discussion avec celui qui allait devenir le chef de la CAQ.

Moi, qui venais de l'ADQ, je lui avais demandé s'il pouvait définir son futur parti comme nationaliste-autonomiste. Il m'avait répondu un «NON» retentissant, puisqu'à cette époque, bien évidemment, il cherchait à sortir de l'axe souverainiste-fédéraliste en parlant presque exclusivement d'économie.

Maintenant, monsieur Legault creuse à se peindre comme nationaliste-autonomiste en cherchant par tous les moyens à se distinguer du Parti libéral et du Parti québécois afin de se donner une identité.

Le problème avec cette nouvelle proposition d'article 1 - terme emprunté au PQ - c'est qu'il cherche à se définir après qu'on ait réussi à le définir...

En politique, si tu ne te définis pas toi-même, on le fait à ta place, et il est ainsi difficile de te refaire une nouvelle image, surtout quand tu ne sais pas tout à fait qui tu es ni où tu t'en vas.

D'ailleurs, il semble que ce problème suive particulièrement Legault, puisque c'est Jean Lapierre qui avait défini les partisans de la CAQ comme «caquistes» au lieu que la nouvelle formation politique définisse elle-même ses adhérents comme «coalisés», ce qui aurait symbolisé, à mon sens, beaucoup mieux une volonté de changement et d'union que le terme «caquiste».

Tout bien considéré, le nationalisme de Legault en est un de surface qui se veut une réponse politique de poudre aux yeux, réponse d'un homme ambitieux qui désire avant tout diriger une province canadienne comme le fait actuellement le Parti libéral de Philipe Couillard.

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