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La rémunération de Jean-Marc Fournier à Carey Price

Il n'y a pas de solution miracle, la compétence, ça se paye.
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La rémunération, la nôtre et surtout celle des politiciens, est un sujet hautement émotionnel. Autant nous trouvons que le voisin, notre patron et le beau-frère gagnent trop chers, autant nous sommes peu enclin à consentir ne serait-ce que l'inflation à nos politiciens, comme augmentation de leur rémunération. Je voudrais dans ce billet, vous parler des émoluments de nos députés qui siègent à Québec et vous convaincre que nous devrions sérieusement songer à les augmenter de façon substantielle.

Notons qu'un député de l'Assemblée nationale gagne annuellement, de base, 93 827 $. À Ottawa, c'est 172 700 $. C'est ce que nous devrions offrir au minimum à nos représentants à Québec. Vous allez me dire que je suis fou. Chacun son opinion, voici la mienne.

Disons-le, la rémunération dans un marché du travail qu'il soit libre, réglementé ou conventionné est une affaire d'experts, spécialisés en ressources humaines, en économie, en actuariat et même en mathématique. Pour déterminer la rémunération adéquate d'un emploi, il faut se baser sur des critères comme la rareté des ressources, les compétences acquises à l'école dans la durée, la complexité de la tâche, le niveau de responsabilité, l'expérience de travail et les résultats.

Récemment, Jean-Marc Fournier, député de Saint-Laurent à l'Assemblée nationale et Leader parlementaire du gouvernement libéral, publiait une lettre ouverte au titre plein de sous-entendus : La rémunération des députés, où en sommes-nous, maintenant?Sous-entendus parce que sous prétexte d'un ajustement salarial pour cause de modification fiscale fédérale et donc, de mise en place d'un comité indépendant pour l'approuver, Jean-Marc Fournier nous indique que le débat sur la rémunération des députés est surtout empreint de petite politique. On le voit depuis des années: le tout est aussi teinté de misérabilisme où celui ou celle qui nivelle le plus par le bas, a le plus de chance d'obtenir le micro du jour pour ainsi faire vœu de pauvreté.

Le Québec a choisi comme modèle de société, un État présent et redistributeur de richesse qui devient par la force des choses, une immense machine de plus en plus complexe. Cela requiert donc au niveau décisionnel, des gens qui ont les compétences appropriées. En ce sens, il n'y a pas de solution miracle, la compétence, ça se paye. Sous-payer les députés relève strictement de la courte-vue qui entraîne l'incongrue situation où les mandarins de l'État et une grande partie du personnel politique sont mieux rémunérés que leur patron.

Il n'y a pas de solution miracle, la compétence, ça se paye.

Est-ce que la majorité des jeunes qui sortent aujourd'hui de nos universités, notamment des Facultés « hot » comme les HEC ou Polytechniques se dirigent sur un horizon de 5 à 10 ans vers la politique active pour y faire carrière? La réponse est non et s'il y en a, il s'agit d'une minorité motivée. Pourquoi? Parce que la rémunération y est inadéquate. Pensez-y, Alexandre Cloutier, député de Lac-Saint-Jean, 40 ans, avocat, il détient une maîtrise en droit constitutionnel de l'Université de Montréal et une maîtrise en droit international public de l'université de Cambridge, obtenue grâce à une bourse British Chevening. Il vient de démissionner sous prétexte qu'il n'avait plus le feu sacré. D'accord. Mais avec un tel CV et avec un tel talent, il arrive un moment où 112 592 $ par année devient une rémunération discutable, surtout si tu te compares avec tes « chums » de promotion et que ta conjointe te parle de sa planification familiale pour par exemple, des travaux d'orthodontie, pour des enfants que tu ne vois pas grandir.

Introduire dans l'équation tout l'enjeu du salaire minimum à 15 $ de l'heure est un double faux débat. Le 15 $ en lui-même est une panacée censée enrichir les petits salariés qui n'est en fait, qu'une illusion monétaire qui induit des mécanismes des prix à la consommation qui s'ajustent toujours plus vite à la hausse; sans compter l'incitation à la numérisation accélérée des entreprises comme vient de le démontrer Métro. Le 15 $ traduit aussi, disons-le en tout respect, la rémunération de travailleurs non instruits où employés et employeurs sont indifférents sur qui accomplit la tâche. En ce sens, il n'y a aucune comparaison possible entre le 15 $ et l'établissement de la rémunération des députés, sauf pour les nombreux populistes, de gauche à droite.

À court terme, selon l'Institut du Québec dans son bilan 2017, avec un taux plancher historique de chômage de 4,9 %, le marché de l'emploi au Québec est en effervescence. Parallèlement, Desjardins Études économiques nous apprend dans l'une de ses dernières livraisons que : « La croissance des salaires prend son envol au Québec ». Cause ou conséquence quand même partielle, les différents médias nous informent qu'en prévision des élections du 1 octobre 2018 au Québec, même la CAQ favorite dans les sondages éprouve des difficultés à trouver des candidats de qualité, pour combler ses 125 « poteaux ». Ce qui précède nous indique qu'une fois que tu as dit, la main sur le coeur, que tu es là pour la cause et le défi, la faiblesse de la rémunération pour obtenir un poste de député à Québec en ralentit sûrement plusieurs. À moyen et long terme, même en tenant compte de la robotisation galopante aux lendemains incertains, les pénuries de personnel sont déjà à nos portes et il n'est pas nécessaire d'avoir un doctorat en démographie pour le constater.

N'oublions pas qu'à force de ridiculiser et de dénigrer le métier de politicien sur le long terme, surtout celui de député, nous obtiendrons le même résultat que celui que nous avons obtenu avec le métier de professeur pour nos enfants : sa dévalorisation.

N'oublions pas qu'à force de ridiculiser et de dénigrer le métier de politicien sur le long terme, surtout celui de député, nous obtiendrons le même résultat que celui que nous avons obtenu avec le métier de professeur pour nos enfants : sa dévalorisation. Nous confions l'argent de nos impôts aux politiciens pour assurer notre bien-être et notre avenir, il serait peut-être temps de les payer convenablement pour ainsi, valoriser ce rôle. Ce n'est pas de l'élitisme et nous en serons tous gagnants.

Dans une société qui est prête à payer des millions de dollars pour un joueur de hockey comme Carey Price qui sur le fond des choses, ne nous apporte strictement rien, nous serions mieux avisés de faire un effort pour rémunérer adéquatement nos « Jean-Marc Fournier » et ainsi attirer les meilleurs à l'Assemblée nationale du Québec. Ce n'est pas de la charité, mais du gros bon sens.

Avril 2018

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