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Révision des programmes: où s'en va le Conseil du trésor?

Qui ne voudrait pas être un petit oiseau au-dessus de la table de Madame Robillard, responsable de la révision des programmes? Je parie que nous sommes plusieurs à imaginer ce qui peut bien s'y passer.
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Qui ne voudrait pas être un petit oiseau au-dessus de la table de Madame Robillard, responsable de la révision des programmes? Je parie que nous sommes plusieurs à imaginer ce qui peut bien s'y passer. Le président du Conseil du trésor, Martin Coiteux, ne perd pas une occasion pour dire qu'il s'agit là d'une révision permanente des programmes; il n'en demeure pas moins que son comité doit trouver le moyen de dégager plus de 3 milliards $ pour atteindre l'équilibre budgétaire dans le prochain budget 2015-16.

Jusqu'ici, nous sommes témoins d'une pluie de rumeurs, de coupures paramétriques, de mesures cosmétiques, de stratégies d'abolition ou de fusion de structures. Difficile d'y voir une vision, une boussole, des principes ni même une philosophie politique quelconque. La riposte? De multiples tentatives de la « machine gouvernementale » de résister aux volontés du gouvernement.

Parallèlement au discours de « responsabilité financière » (on a la consigne au gouvernement de ne pas parler d'austérité - avec raison...), les employés municipaux prévoient des « grands dérangements", les éducatrices en garderie familiale réclament d'être payées 50 heures/semaine, et les 550 000 employés des secteurs publics et parapublics réclament une augmentation salariale de 4,5 % par année pendant trois ans!

Deux Québec. Les payeurs et les payés.

Le gouvernement Couillard réussira-t-il à assainir les finances publiques? Selon un sondage SOM-Cogeco, 57 % des sondés ont peu ou pas du tout confiance qu'il réussira. On pourrait croire que c'est simplement parce qu'ils se disent qu'ils ont déjà joué dans ce film-là avec la réingénierie ratée de Madame Jérôme-Forget ou qu'ils sont à peu près convaincus qu'en bout de piste, le gouvernement pliera.

Mais il y a plus. Intuitivement, la population juge peut-être que pour corriger le tir:

  • la fusion des structures de l'appareil gouvernemental ne suffira pas
  • le gel des embauches ne suffira pas
  • le discours du « mieux financer, mieux faire, mieux dépenser » ne suffira pas
  • le discours de l'optimisation de nos programmes ne suffira pas
  • l'abolition des agences de santé pour ramener la croissance des dépenses de santé en deçà de 3 % ne suffira pas non plus (élément essentiel s'il en est un)

En clair, ils soupçonnent bien que non seulement le panier de services devra être revu, mais que l'État-employeur-producteur-entrepreneur-interventionniste devra faire un sérieux examen de conscience. Est-ce ce qui se passe dans les bureaux de Madame Robillard, ceux du Conseil du trésor ou ceux du PM? Bien franchement, pour l'heure, on doit se contenter de croiser les doigts et de faire confiance.

Je ne suis pas du genre confiant.

Oh, il y a de bons signaux qui sont envoyés de la part du gouvernement. Il faut reconnaître les gestes audacieux et nécessaires que sont 1) le projet de loi no 3 sur les régimes de retraite des employés municipaux, 2) l'abolition des agences de santé et 3) le projet de loi qui permettra au Conseil du trésor d'avoir le portrait exact des ressources humaines dans le secteur public.

En contrepartie, il demeure difficile de comprendre certaines actions ou incohérences du gouvernement:

  • Pourquoi les Québécois sont devenus des actionnaires d'une cimenterie à Port-Daniel, le projet qu'on a qualifié comme étant le plus polluant de l'histoire du Québec? Comment justifier la chose autrement que par du pur capitalisme de copinage?
  • Pourquoi on s'obstine dans l'éolien alors qu'il en coûtera aux consommateurs d'hydroélectricité 140 millions de plus par année pendant 20 ans, selon le porte-parole de la CAQ, Gérard Deltell?
  • Pourquoi on s'obstine à être un des 2 seuls endroits sur la planète (avec la Californie!) à mettre en place un marché du carbone alors que le Conseil du patronat, la FCEI et la FCCQ avertissent que ce faisant, « le gouvernement accroît le fardeau des entreprises et des citoyens qui ignorent le choc qui les guette », que celui-ci créera une iniquité concurrentielle entre nos producteurs locaux et ceux de nos voisins et qu'il fragilisera davantage notre économie en panne de création d'emplois permanents?
  • Pourquoi on croit qu'on peut assainir les finances publiques (dont 60 % sont les coûts de main-d'oeuvre) sans briser le tabou de la sécurité d'emploi?
  • Pourquoi ce gouvernement libéral comme tous ses prédécesseurs agit comme une véritable agence de placement à coups de nominations difficilement justifiables autrement que par le fait qu'il s'agit de loyaux sujets du Parti libéral du Québec? (Vraiment agaçante et contre-productive, cette manie...)

Pour revenir à l'exercice de la révision des programmes, l'heure est peut-être venue de nous informer des principes qui guident la démarche du Conseil du trésor. On peut bien tourner toutes les pierres si on veut, mais si c'est un mur qu'il faut refaire ou même les fondations, mieux vaut le détecter tout de suite plutôt que de « patcher » des trous ou de dissimuler des vices cachés.

Vivre selon nos moyens tout en nous assurant de protéger les plus vulnérables d'entre nous, ça commence par ce qui se fait dans toutes les familles du Québec: nous avouer nos moyens. Nos vrais moyens. Que peut-on s'offrir?

Pour le plaisir et pour être constructive, je me suis amusée à imaginer quelle serait ma démarche si on me demandait comment revoir ce fameux panier de programmes. Sans surprise, elle commencerait très certainement en me demandant quel est le rôle de l'État et quelles sont ses missions essentielles.

  1. Le quoi - Quelles sont les missions essentielles de l'État? Autrement dit, qu'est-ce que l'État a d'affaire là? Pour chacune des missions, quel est le panier de services potentiellement assurés ou subventionnés par l'État?
  2. La part du budget alloué - Pour chacune des missions essentielles, quelle part du budget (%) du Québec est-il raisonnable d'y d'allouer et quel montant cela représente-t-il? (Une question qu'on ne se pose plus). Le montant accordé doit respecter la capacité de payer de l'État, ne pas dépendre du coût du service offert (qui peut varier selon le producteur du service) et donc, être protégé contre les augmentations excessives des coûts de système hors contrôle.
  3. Le «à qui»? - Quel segment de la population (ou secteur d'activité économique) vise-t-on? S'agit-il d'une politique mur à mur? d'une mesure plus ciblée? Justifier.
  4. Le combien ($$$) - La redistribution est-elle uniforme (même montant pour tous) ou est-elle modulée (en fonction du revenu par exemple)?
  5. Aide directe ou subvention d'institutions (et de fonctionnaires)? - Une aide directe aux clientèles visées (chèque)? On subventionne les gens directement ou on subventionne des institutions et des programmes? Dans le cas où on subventionne les institutions, doit-on encourager un type de fournisseur en particulier (monopole?) ou encourager le secteur concurrentiel (public, privé, coopératives, économie sociale, etc.)?
  6. La clause crépusculaire - Quelle est la date de péremption de la participation de l'État? Comment évaluera-t-on l'efficacité de son intervention?

J'ai fait l'exercice avec la politique familiale. Je vous en ferai part dans un prochain blogue. Étonnantes, les conclusions auxquelles j'arrive.

La pédagogie à laquelle s'était engagé le gouvernement doit dépasser la leçon portant sur l'état des finances publiques du Québec. Elle doit maintenant porter sur les principes et la philosophie qui guident l'action gouvernementale.

Il est temps de les faire connaître. Parce que jusqu'à maintenant, on a plutôt l'impression que les réformettes de structures et les tentatives d'optimiser les programmes ne suffiront juste pas à la tâche.

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