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Ce qu'on voit là, ce sont les conséquences de la non prise au sérieux d'un mouvement qu'on a laissé naître et grandir pour toutes sortes de raisons, dont la lâcheté de ne pas nommer la chose correctement.
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Printemps 2013: attentats au marathon de Boston.

Octobre 2014: fusillade au Parlement d'Ottawa.

Janvier 2015: attaque terroriste chez Charlie Hebdo à Paris.

Pour chacun de ces événements, on a pleuré les morts et on a pleuré la liberté - sans compter tous les autres épisodes de carnage dans certaines régions du monde où une probabilité d'être témoin d'un acte terrorisant fait partie de la réalité quotidienne.

Mais vendredi dernier, lorsque je prenais connaissance de ce qui arrivait à Paris, je ne pleurais plus. Avec toutes les fibres de mon corps, j'étais en colère. Non. Je n'ai pas attendu 12, 24, 48 heures pour être en colère et l'exprimer. Je n'ai respecté ni le délai, ni le rythme qu'impose une certaine bien-pensance (celle qui se réjouit qu'on dépense 40 millions pour illuminer un pont, celle qui croit que le Bixi est un droit fondamental ou qui croit que les changements climatiques sont une plus grande menace que le terrorisme, tiens, celle du Journal de Montréal ou du Devoir dont certains écriveux d'articles à sensation n'ont pas suffisamment de culture politique pour faire la différence entre libertarianisme et libéralisme).

Désolée. Je n'avais pas le goût de prier, d'allumer une chandelle, ou de participer à une marche pour la paix, encore moins de chanter Give Peace a Chance. Je le sais, j'en choque plusieurs. Mais je n'avais pas le goût non plus de me faire dire pour une énième fois qu'on avait «perdu notre innocence», notre naïveté... Face à la barbarerie, les gens réagissent de toutes sortes de façons et, en ce qui me concerne, je ne m'excuserai certainement pas d'avoir exprimé la colère, réaction tout à fait humaine face à un sentiment d'impuissance, d'incompréhension, face à des gestes d'une lâcheté suprême.

Alors, pour les simples d'esprit qui prennent tout au premier niveau, bien sûr qu'on a une pensée pour les premières victimes: des civils qui n'ont rien à voir avec les mauvaises décisions de leurs gouvernements, ni avec la montée de l'islam radical politique. On pense aux millions de personnes qui fuient des régimes de terreur. On pense aux familles qui perdent parents et enfants pour aucune autre raison que celle que ces derniers se trouvaient au mauvais endroit, au mauvais moment. Mais il demeure que ce qu'on voit là, ce sont les conséquences de la non prise au sérieux d'un mouvement qu'on a laissé naître et grandir pour toutes sortes de raisons, dont la lâcheté de ne pas nommer la chose correctement.

Je ne surprendrai personne en vous disant que je crois depuis un bon moment maintenant que nos gouvernements se dispersent, qu'ils ont perdu de vue la raison pour laquelle on accepte, comme citoyens, d'abdiquer et même de céder quelques-unes de nos libertés. Cette raison-là est d'au moins agir comme gardien de notre sécurité, de nos libertés et de notre civilisation occidentale.

Et pourtant... Quelques heures avant le massacre, le président Obama affirmait à la presse que ISIS était «maîtrisé»contained», en anglais), que l'État islamique n'était pas en train de se renforcer. On parle ici d'un président qui a dit plus d'une fois que les changements climatiques sont une plus grande menace que le terrorisme ou que l'État islamique.

Au débat des démocrates, aucun des candidats n'a d'ailleurs voulu parler d'une guerre contre l'islam radical. Impossible de mettre les mots «islam radical» dans leur bouche.

Chez-nous, on a un premier ministre qui s'est fait élire en promettant le retrait de nos quelques forces militaires pendant que des innocents, partout sur la planète, se font massacrer. Une participation modeste, certes, mais qui fait des Canadiens une nation qui comprend qu'on doit agir sur tous les fronts: humanitaire, oui, mais également militaire. Une participation qui fait qu'on reconnaît que le problème est global.

Enfin, on voit, plus près de nous encore, la difficulté pour nos politiciens de nommer les choses, alors que c'est bel et bien de l'idéologie de l'islam radical dont il est question, aux dires mêmes de la communauté musulmane, qui la fuit comme la peste.

Trudeau au G1

Alors là, on a un nouveau premier ministre canadien qui s'amène en Turquie au sommet du G20 dans le but de vanter son programme d'investissements publics, et qui se retrouve dans la cour des grands au moment précis où un des grands est touché en plein cœur. Il fait quoi, Justin Trudeau? Il prend conscience d'un nouveau contexte et il s'adapte? Il use d'intelligence émotionnelle en réaménageant ses priorités, ses messages, ses «lignes»?

Il semble qu'il n'y ait rien de tout ça. Justin Trudeau se donnait comme mission de changer l'image du Canada. Le résultat est qu'il n'est pas du tout évident que l'image qu'il dégage présentement soit digne de ce que nous sommes. Bien franchement, à lire certaines analyses, Justin Trudeau est sur le point de faire «honte» aux Canadiens.

Quand une Emmanuelle Latraverse de Radio-Canada (écoutez à partir de 3:35) se permet de dire «À l'écouter par rapport aux autres, on a même l'impression qu'il n'est pas au même sommet», quand même une Michèle Ouimet de La Presse termine une chronique par les mots «On les accueille [les réfugiés] Et on bombarde l'EI. C'est la moindre des choses», c'est qu'on réalise tristement que le nouvel élu échoue au test de leadership que le contexte lui impose.

Ce contexte n'est pourtant pas nouveau. Il nous est rappelé périodiquement: une guerre ouverte contre notre civilisation. Comme le suppose l'ex-éditorialiste de La Presse, Mario Roy, ça aura peut-être pris Paris, coudonc! Peut-être... Compris qu'on veut tuer des Occidentaux parce qu'ils sont des Occidentaux, parce qu'ils croient à la liberté, parce qu'ils fêtent, consomment de l'alcool, croient à l'égalité entre les hommes et les femmes.

Mais chez-nous, notre premier ministre canadien semble encore dans un état de transe et d'exaltation postélectorale. D'autres ont tenté de le réveiller, lui ont tendu la main. «Hey, Justin! Wake up!», semblent lui dire les Rona Ambrose du Parti conservateur, Philippe Couillard du Québec et Brad Wall de la Saskatchewan (lire ceci) .

Heureusement, samedi, j'étais en phase avec notre premier ministre Philippe Couillard: impitoyable contre les barbares, ouvert à une participation à coalition internationale qui serait exigée de notre part, et humaniste pour ce qui est de l'accueil de réfugiés. «Je m'attends que mon pays, le Canada, qu'on joue un rôle tel que demandé par nos partenaires de la communauté internationale. Le Canada doit se montrer disponible pour ce que nous demandent nos partenaires», déclarait-t-il lors d'un point de presse en matinée samedi. (En passant, il n'était vraiment pas nécessaire de faire suivre cela de basse partisanerie politique le lendemain en s'en prenant aux partis d'opposition. M. Couillard n'a pas besoin de faire ça.)

Là, présentement, nous écrivons l'histoire

Paris s'est passé deux jours après le jour du Souvenir, le jour où on se souvient de ceux qui se sont battus pour la liberté, socle de notre civilisation occidentale. Mais c'est aussi un jour où on se souvient plus péniblement des pacifistes, comme Chamberlain qui traitait Churchill de «fauteur de guerre», et des collaborationnistes avec les nazis.

Quelle histoire écrivons-nous présentement? Qu'au Canada, deux semaines avant les attentats de Paris, on a élu un premier ministre qui s'est fait élire en promettant le retrait de nos quelques forces sur le terrain, pendant que des innocents, partout sur la planète, se font massacrer par une idéologie? Que le Canada n'a pas su se raviser lorsque l'Occident appelle à l'aide?

Honnêtement, qui peut croire que ce nouveau gouvernement perdrait un quelconque crédit politique s'il se ravisait d'être plus prudent pour ce qui est de ses engagements de retirer la contribution militaire canadienne? De prendre un peu plus de temps pour ce qui est de l'accueil des réfugiés? De se montrer fier des forces canadiennes qui ont participé à libérer un village kurde, Sinjar, ces derniers jours?

Parce qu'au-delà des déclarations, du flower power et des selfies, la France (et l'Occident tout entier) attend des engagements concrets. «Au-delà de la solidarité et de l'émotion» après les attentats de Paris, la France «voudra des décisions concrètes en matière de lutte contre le financement du terrorisme», ont déclaré des ministres Français.

Pour l'instant, Justin Trudeau est à son G1.

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Pour ceux qui ne font pas la différence entre les meurtriers de l'État islamique et les familles qui fuient très précisément l'horreur créée par les fous d'Allah, je ne peux rien pour vous.

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Attentats de Paris du 13 novembre 2015

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