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Le jupon du ministre François Blais

Ce à quoi nous assistons n'est ni une "grève", ni un geste "social". Ce qui rend impossible aux institutions d'enseignement de respecter le contrat qui les lie aux étudiants qui ont choisi de parfaire leur formation académique chez eux est notre complaisance envers des voyous qui refusent de vivre dans une société de droit.
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Avouons-nous-le. Il faut quand même admirer la virtuosité des groupes de pression à manier le "spin" médiatique. Dans ce cas-ci, en mettant de l'avant le terme "grève sociale". Il faut l'admettre. Ajouter le qualificatif "social" ajoute un petit quelque chose de suffisamment vaporeux et vertueux pour nous faire oublier le fait qu'il s'agit bien d'activités somme toute illégales privant une grande majorité d'étudiants du droit fondamental d'accéder à leur formation académique.

Je ne parle pas ici des manifestations tout à fait pacifiques et légitimes, même si un être moindrement rationnel peine à comprendre le "Fuck toute" qui motive les manifestants.

Je parle ici du comportement d'une minorité d'activistes-voyous contre lesquels nos universités n'ont d'autre choix que de recourir à des requêtes d'injonction. Je parle de gens masqués à l'UQAM qui intimident, menacent et déchirent des injonctions en s'exclamant "Fuck l'injonction", d'une porte-parole de l'ASSÉ incapable de condamner de tels gestes.

Alors non. Ce à quoi nous assistons n'est ni une "grève", ni un geste "social". Ce qui rend impossible aux institutions d'enseignement de respecter le contrat qui les lie aux étudiants qui ont choisi de parfaire leur formation académique chez eux est notre complaisance envers des voyous qui refusent de vivre dans une société de droit. Aussi, notre tolérance pour un "droit acquis" qui n'a jamais existé.

En effet, selon la décision du juge Robert Mongeon de la Cour supérieure du Québec rendue le 1er avril ("Les Étudiants" ici réfèrent aux associations étudiantes, leurs dirigeants et leurs membres de l'UQAM):

Je suis d'avis (...) que le droit de "grève" dont les Étudiants tentent de se prévaloir se résume à leur droit de boycotter leurs cours. Ils ne peuvent en aucune façon empêcher ceux et celles qui le désirent d'assister à leurs cours et de recevoir la formation que l'institution (ici l'UQAM) a l'obligation contractuelle de leur offrir.

Si le "droit de grève" dont les Étudiants se réclament existe vraiment, cela donne automatiquement aux Étudiants le pouvoir de paralyser une institution publique d'enseignement et donc, rapidement, de paralyser cette institution, au nom de revendications sociales non reliées à l'institution d'enseignement proprement dite.

Notre droit ne va pas aussi loin et si le Législateur considère d'accorder un tel droit aux Étudiants, il faudrait qu'il le fasse de façon très explicite et qu'il compose avec le risque que le détenteur d'un tel pouvoir puisse à tout moment lui dicter sa vision des choses sous peine de paralysie de tout l'enseignement postsecondaire ou universitaire au Québec.

Ainsi, je suis d'avis que la position des Étudiants n'a actuellement aucune assise juridique d'une part et que, d'autre part, l'UQAM a non seulement le droit d'opérer, mais elle en a l'obligation envers les autres étudiants qui veulent suivre leurs cours.

J'estime, en conséquence, que l'absence d'assise juridique de la position des Étudiants fait en sorte que le droit de l'UQAM est clair et sans équivoque.

On ne peut plus clair... et pourtant. Alors que les nostalgiques d'un "Borg étudiant" niant toute liberté individuelle ne comprennent pas ce qui leur apparaît comme une trahison (lire ici Josée Legault), une forte proportion des gens se disent "Enfin!".

Alors que l'ensemble des analystes a qualifié de "maladroites" les sorties du ministre de l'Éducation François Blais, une forte majorité de la population se dit "Enfin, quelqu'un qui ose parler de sanctions. Enfin quelqu'un qui pense aux jeunes qui se dévouent à leurs études."

Sondage TVA Nouvelles

La chroniqueuse Josée Legault croit que le jupon du ministre dépasse. Que nous ne sommes pas dans une dynamique d'argumentation logique et éclairée. Elle a tort. D'abord, parce que le jupon du ministre ne dépasse pas. Il n'a tout simplement pas de jupon. La clarté de ses propos est absolument éblouissante: le gars et par conséquent son gouvernement ne reconnaissent pas le droit de "grève étudiante" et il le dit. Clairement. Apprécions plutôt que d'y voir de la manipulation politique.

Enfin, pour ce qui est de la dynamique d'argumentation, je lui suggère de lire le jugement de la Cour supérieure. Argumentation logique et éclairée elle y trouvera.

Pour le reste, je suggère que les analystes et chroniqueurs qui se plaignent de la langue de bois des politiciens cessent de tant miser sur la forme pour échanger plutôt sur le fond. Y prêter autant d'attention ne reflète qu'une certaine paresse intellectuelle qui dispense d'avoir à réfléchir sur les enjeux fondamentaux.

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