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Réflexions sur Sotchi et le «Russie bashing»

Avant le début des JO de Sotchi, tous s'entendaient pour dire que la Russie ne serait jamais capable d'héberger les Jeux, que les méthodes employées par le gouvernement russe étaient inhumaines et que Vladimir Poutine faisait preuve d'une mégalomanie rarissime qui finirait par lui coûter cher. En fait, presque tous mélangeaient mythe et réalité avec une étrange satisfaction.
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Les 22es Jeux olympiques d'hiver sont bel et bien entamés. La flamme a été transmise et les athlètes doivent maintenant honorer leurs pays. Le monde entier a les yeux rivés sur la ville de Sotchi et plusieurs craignent encore les attentats terroristes. D'autres parlent des olympiades les plus coûteuses de l'histoire: 50 milliards auront été nécessaires à la réalisation de cet immense projet. Mais qu'en est-il du peuple russe ?

Le «Russie bashing»: un nouveau sport national

Nous n'avons pas eu besoin d'attendre le début des Jeux pour assister à un déferlement de moqueries les plus diverses à l'endroit des JO de Sotchi. Tous s'entendaient pour dire que la Russie ne serait jamais capable d'héberger les Jeux, que les méthodes employées par le gouvernement russe étaient inhumaines et que Vladimir Poutine faisait preuve d'une mégalomanie rarissime qui finirait par lui coûter cher. En fait, presque tous mélangeaient mythe et réalité avec une étrange satisfaction.

Photographies de toilettes «sans divisions», de chantiers inachevés et d'immeubles inondés destinés à accueillir les équipes olympiques: jamais les téléphones portables n'auront relayé autant de clichés sur un même événement. Nous n'aurions sans doute jamais entendu parler de certains athlètes si ceux-ci ne s'étaient pas transformés en journalistes d'enquête dont la mission était de dévoiler «les côtés sombres» de Sotchi.

Ce sera au tour de de la cérémonie d'ouverture d'être passée au crible. Les moindres problèmes techniques auront été décortiqués par de nombreux médias afin de tourner en dérision le caractère grandiose du spectacle. Le fameux anneau olympique défectueux aura même défrayé la manchette dans plusieurs pays occidentaux. Certains y verront la preuve que la Russie était incapable de quoi que ce soit.

Il est fort à parier que la cérémonie d'ouverture des JO de Vancouver aurait été davantage ridiculisée si elle avait été soumise au même traitement. On s'en souvient: la piètre performance du chanteur Garou, dans la métropole de l'Ouest canadien en 2010 aurait été érigée au rang de plus mauvaise performance artistique de l'histoire humaine si elle avait été le fruit d'un chanteur populaire russe en février 2014, au nord-est de la mer Noire.

Une continuation enfantine de la guerre froide

Tout récemment, la chaîne américaine CNN dressait une liste des monuments les plus laids au monde. Au sein de cette liste, nous retrouvions le monument «Courage» érigé en l'honneur des défenseurs de la Forteresse de Brest. Situé en Biélorussie, ce monument est dédié à la mémoire des soldats soviétiques ayant héroïquement donné leur vie pour défendre leur pays face à l'envahisseur nazi.

Inutile de souligner que ce n'est pas un hasard si la publication de cette liste par CNN a coïncidé avec le début des Jeux de Sotchi. Si la très populaire chaîne télévisée a finalement décidé de retirer l'article controversé, il n'en demeure pas moins que l'événement traduit la persistance d'une vieille rivalité entre les États-Unis et l'URSS.

S'ils ont pourtant gagné - et heureusement - il faudra que les Américains finissent par faire leur deuil de ce monde politiquement bipolaire. La Russie est plus isolée diplomatiquement que jamais et il ne sert à rien d'alimenter cet imaginaire vétuste. Le Russie bashing auquel nous assistons n'est pas sans rapport avec cette véritable continuation enfantine de la guerre froide.

Un mépris gratuit pour le peuple russe

Il ne s'agit évidemment pas ici de défendre le gouvernement de Vladimir Poutine qui fait preuve depuis un bon moment d'autoritarisme, voire d'une dérive dictatoriale. Il s'agit encore moins de défendre les lois homophobes promulguées par la même administration. Il s'agit surtout de redonner au peuple russe ce qui lui revient.

Nous pourrons parler encore longtemps des populations déplacées et des impacts sur l'environnement des JO de Sotchi. Nous pourrons rire de ses organisateurs incompétents, caricaturer éternellement ses architectes et photographier encore un demi-million de toilettes «peu orthodoxes». Nous pourrons même envoyer des échantillons de nourriture servie à Sotchi dans des laboratoires chargés d'y trouver d'infinies bactéries.

Mais il y a une chose que nous ne pourrons pas faire. Nous ne pourrons pas nous moquer d'un peuple qui sort d'une souffrance longue d'un demi-siècle de totalitarisme. Nous ne pourrons pas nous amuser de l'espoir légitime d'une nation. Et nous ne pourrons encore moins abattre la fierté titanesque du peuple russe.

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