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Superman et Batman sont-ils les nouvelles stars de l'art contemporain?

Une exposition présentée en Suisse se propose de raconter les dialogues entre l'art contemporain et la figure du superhéros dans les comics américains.
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L'art contemporain s'est souvent nourri de la culture populaire et des grands succès de la bande dessinée, du dessin animé ou des jeux vidéo. Mais si l'art contemporain a connu une consécration large et incontestée de la culture "officielle", avec la reconnaissance des musées, les gratifications et subventions publiques, et la caution de nombreux experts et institutions, ce constat n'est hélas pas le même pour la BD, l'animation ou, pire encore, le jeu vidéo.

Pourtant, les hybridations sont nombreuses, et le grand paradoxe est que les artistes contemporains eux-mêmes ont toujours considéré ces disciplines avec respect, puisant une très large inspiration au sein des codes, de l'esthétique et des plus grandes figures de l'art ludique. De Roy Lichtenstein revisitant les comic books à partir de 1961 à Takashi Murakami s'inspirant de la culture manga, on ne compte plus les œuvres contemporaines représentant Mickey Mouse (par Keith Haring, Erró, Robert Combas, Jean-Michel Basquiat, Bertrand Lavier...) ou Superman (notamment par Andy Warhol ou Gilles Barbier). Jeff Koons a travaillé sur les figures de Hulk et Popeye, tandis que Wim Delvoye s'est inspiré de Donald Duck et du jeu vidéo Sim City. Ce ne sont que quelques exemples, les collaborations entre artistes des deux univers aussi ont été nombreuses, comme celle de Salvador Dali avec Walt Disney, malheureusement restée inachevée.

Une exposition présentée à la Maison d'ailleurs à Yverdon-les-Bains (Suisse) jusqu'au 21 septembre 2014 valide ce constat, et se propose de raconter les dialogues entre l'art contemporain et la figure du superhéros dans les comics américains. Le catalogue de cette exposition: Superman, Batman & Co... mics ! est édité en France par Urban Comics, un éditeur qu'on ne louera jamais assez pour la qualité éditoriale de ses différentes collections autour du catalogue DC Comics, et qui propose pour la première fois un très beau livre d'art vendu à moins de 20 euros. Il permet de découvrir aussi bien les œuvres d'artistes contemporains s'appropriant la culture comics que de lire une dizaine de textes analysant ces relations parfois compliquées entre les deux univers.

On pourra découvrir au fil des pages les superhéros imaginaires de Gilles Barbier, comme Emmentalist (personnage en fromage, avec les trous) et The Obese, sans doute le superhéros le plus commun de l'Amérique d'aujourd'hui. Plus loin, les désormais célèbres fœtus de superhéros du toulousain Alexandre Nicolas, dont la fragilité contraste avec l'invincibilité supposée de ces personnages, voisinent avec les photographies d'Audrey Piguet, qui fait incarner Wolverine ou Catwoman par des acteurs dans sa série La Chute des héros.

Mathias Schmied utilise le matériau d'origine, le comic book, pour d'audacieux découpages laissant apparaître les superhéros en creux, ou au contraire les faisant exploser des pages. Une approche intéressante alors que les supports imprimés des premiers comic books (ceux de Superman et Batman notamment) ont curieusement acquis une valeur bien plus importante sur le marché de l'art que les dessins originaux de leurs auteurs. Maybe a Little Christmas et FWWITT sont des œuvres superbes, planches où tout a été retiré hormis les traits des cases et la figure centrale de Spider-Man. On peine à imaginer que le matériau de départ est la page d'un livre.

Adrian Tranquilli enfin, sculpteur italien, travaille lui aussi sur la fragilité du super héros dans une série de sculptures de personnages monochromes blanc ou noir, figés tel le Han Solo congelé dans la carbonite à la fin de L'Empire Contre-Attaque.

L'ouvrage cite Régis Debray, qui suggère de voir dans la bande dessinée "la revanche du figuratif sur l'abstrait", et dans la production artistique contemporaine "la résurgence de la peinture de jadis, du dessin, de la noblesse de l'art". On ne saurait mieux dire.

(c) Gilles Barbier, The Obese (posca et acrylique sur calque polyester, 2012)

(c) Alexandre Nicolas, Jokerfoetus (Inclusion, crystal de synthèse, 2011)

(c) Audrey Piguet, La Chute du héros - Catwoman (photographie numérique, 2012)

(c) Mathias Schmied, Maybe a Little Christmas (page de comics découpée, 2012)

(c) Adrian Tranquilli, This is not a love song #2 (polystyrene, résine et argent, 2005)

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