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Legault ou comment rater des filets déserts

Dire que la Coalition avenir Québec a perdu son momentum serait un euphémisme. Des chutes dans les sondages, ça arrive même dans les meilleures familles politiques. Le problème avec la CAQ de François Legault c'est que l'on ne voit pas le jour où ils vont remonter. Surtout s'ils s'entêtent à ne pas profiter du territoire inoccupé au centre droit.
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Dire que la Coalition avenir Québec a perdu son momentum serait un euphémisme. Des chutes dans les sondages, ça arrive même dans les meilleures familles politiques. Le problème avec la CAQ de François Legault c'est que l'on ne voit pas le jour où ils vont remonter. Surtout s'ils s'entêtent à ne pas profiter du territoire inoccupé au centre droit.

L'équipe de François Legault a raté deux filets déserts depuis un mois. Le plus spectaculaire étant la controverse autour de l'étiquetage de la viande halal. Comment la CAQ a pu faire le choix de rester à l'écart de ce débat qui se veut un des talons d'Achille des deux vieux partis? Le parti libéral ne touche pas à ce débat avec une perche de 100 pieds pour ne pas faire naître des controverses à l'intérieur même de son parti. C'est tout dire...

Quant au PQ, c'est sans doute l'un des aspects sur lequel il est le plus vulnérable. Il a d'ailleurs pris la balle au bond, timidement selon plusieurs en laissant sa chef à l'abri de la controverse, dans le cas de la viande halal. Rappelons qu'André Boisclair avait lui aussi décidé de rester à l'écart du débat identitaire en 2007 (avec les résultats que l'on connait). Le PQ avait alors eu peur de refaire le débat sur le « nous », concept rendu si abstrait depuis le tristement célèbre discours de Monsieur après sa défaite référendaire en 1995. Cette crainte, le PQ l'a toujours et elle s'ajoute au désir irrépréhensible qu'ont les péquistes de plaire aux bien-pensants. Évidemment, ces derniers préfèrent carrément que les politiciens et les médias ne parlent pas de ces sujets explosifs, de peur que les Québécois ignares et reculés veuillent déporter tous les immigrants dans leur pays d'origine.

Curieusement, c'est à ces mêmes intellectuels que semble vouloir plaire François Legault. En évitant de sauter dans la mêlée dans le dossier de la viande halal, il s'évite ainsi de dures critiques d'une gauche qui s'octroie le pouvoir de dicter des normes morales sur lesquelles, croit-elle, reposent la paix et l'ordre social. Pourtant, il y a une vie en dehors des pages d'opinions de la presse et c'est plutôt à ces Québécois que la CAQ devrait chercher à plaire.

L'autre filet désert que les caquistes ont raté c'est la nouvelle position de leur chef face aux délinquants sexuels. En plein milieu de l'enquête du coroner sur la disparition de Julie Surprenant, François Legault s'est dit en faveur d'un registre des délinquants sexuels. Rappelons que le principal suspect de cette sordide histoire était un délinquant sexuel qui demeurait à l'étage au-dessus de la famille Surprenant. De l'aveu même de son père, toujours brisé par le départ de sa fille, s'il avait su qu'un criminel sexuel vivait au-dessus de chez lui, il aurait mis en garde sa jeune fille ou aurait même pensé à déménager. Où est le problème me direz-vous? Le problème c'est que personne n'a su que Legault était en faveur d'un registre. C'est grâce aux questions de l'animateur de Radio X Dominic Maurais que François Legault a annoncé sa position à Québec dans une entrevue téléphonique à 11h le matin.

J'ai rencontré Michel Surprenant pendant l'enquête et je suis certain qu'il aurait été comblé qu'un chef politique épouse cette proposition qu'il a lui-même défendue pendant des années. Un registre public aurait pu changer l'histoire de Julie Surprenant et pourrait changer le cours de la vie de beaucoup d'autres jeunes femmes vivant avec un voisin ayant un passé criminel d'agresseur sexuel sans le savoir. Pourquoi ne pas annoncer sa position au côté de Michel Suprenenant dans une conférence de presse à Québec? Je vois d'ici les gros titres : « Opportunisme! »,« Populisme! », « Calcul politique! ». Les péquistes l'ont fait avec Isabelle Gaston, l'ex-conjointe de Guy Turcotte, et ils n'ont pas été accusés d'opportunisme... Je le répète, il y a une vie en dehors des pages d'opinion de la presse. Et c'est celle-ci que la CAQ devra exploiter si elle souhaite refaire partie de l'équation. Les appuis à son parti ne remonteront pas comme par magie ou en attendant de voir les libéraux et les péquistes faire des erreurs.

Ça ne peut pas être pire

Pour François Legault, il ne faut surtout pas tomber dans le piège de penser que le plancher est atteint et qu'il ne peut que remonter à partir de maintenant. La Coalition n'avait sans doute pas prévu qu'à peine quatre mois après la formation de son parti, il se retrouverait aussi mal en point dans les sondages. En fait, c'est au point que l'opposition officielle ne semble plus à porter de main des coalisés et que la possibilité d'être reconnu comme groupe parlementaire s'éloigne tout autant.

Les mauvais sondages, rumeurs de démission, déclarations malheureuses, candidats potentiels qui reculent... Le début d'année de la CAQ n'aura pas été de tout repos. J'imagine déjà l'entourage de Legault se dire : ça peut pas être pire.

Malheureusement oui, ça peut toujours « être pire ». Combien de fois dans ma carrière politique suite à une nouvelle catastrophe j'ai entendu un philosophe à deux balles dire : «Vous en faites pas, on a atteint le fond du baril. Ça ne peut pas être pire. » Eh ben non. J'en ai été la preuve vivante et bientôt s'ils continuent de vouloir ménager la chèvre et le chou, les gens autour de François Legault vont eux aussi découvrir qu'un baril parfois, ça n'a pas de fond.

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