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Les décisions courageuses

Je ne saurais dire si le fait de révéler la fameuse «entente secrète» au congrès de mai dernier, AVANT le vote des délégués sur les alliances, aurait suffisamment changé la donne pour faire basculer le vote en faveur de la convergence.
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La semaine dernière, j'ai publié un billet d'humeur sur Facebook dans lequel je disais être en co-lère contre le CCN et l'exécutif de Québec solidaire à la suite des révélations de ce que les jour-nalistes ont appelé « l'entente secrète » des OUI-Québec. Si j'estime toujours que le contenu de cette feuille de route (qui n'était en fait qu'un document de travail) aurait dû être communiqué aux délégués du congrès de QS avant le vote sur les alliances, je ne peux que déplorer que Jean-François Lisée ait associé ma colère et son concept de « politburo de QS » dans un tweet.

Tout le long de ma campagne comme porte-parole, j'ai milité pour un rapprochement entre le PQ et QS en vue des élections de 2018. Je me permettrai donc ici d'identifier trois principaux facteurs qui, à tort ou à raison, ont mené au rejet de la convergence par une majorité de mes collègues solidaires : 1) l'historique péquiste en matière de politiques néolibérales et de «trahisons» des promesses faites, 2) les sentiments racistes d'une partie de la population sur lesquels le PQ a parfois semblé vouloir surfer et 3) son chef, Jean-François Lisée, qui peut passer aux yeux de certains pour la personnification des deux premiers facteurs.

En soufflant le chaud et le froid pendant la course, en nous « tendant la main » à la veille de notre congrès et en nous accolant de sobriquets bolchéviques dans les jours suivants, le chef péquiste pourrait être lui-même devenu le principal adversaire d'un rapprochement entre nos deux formations. De plus, depuis son arrivée en poste, le PQ est en baisse de 1% dans les sondages en moyenne par mois, il a limogé son leader parlementaire qui avait admis que le PQ ne pouvait plus gagner d'élections seul et de plus en plus d'analystes s'entendent pour envisager la possibilité qu'il soit battu dans Rosemont par QS aux prochaines élections.

«Laissons le PQ couler une bonne fois pour toutes», clament désormais plusieurs solidaires. Au risque de passer pour la mouche du coche, je continue de croire que la convergence doive se faire en 2018...

«Laissons le PQ couler une bonne fois pour toutes», clament désormais plusieurs solidaires. Au risque de passer pour la mouche du coche, je continue de croire que la convergence doive se faire en 2018...

Tout d'abord, les sondages démontrent que les péquistes déçus se tournent davantage vers la CAQ que vers QS (notre rejet de la convergence pourrait continuer d'y contribuer). Toutefois, le PQ ne mourra probablement pas tant que les baby-boomers formeront encore le plus gros bloc démographique, mais il pourrait bientôt passer sous la barre des 20%, un seuil que QS aura du mal à dépasser dans les prochaines années. Or, avec notre mode de scrutin, on observe qu'en bas de ce seuil, les partis sont sous-représentés, récoltant difficilement plus de 8 à 10 sièges... Il est donc fort probable que le PQ et QS deviennent - et demeurent un certain temps - les parents pauvres de l'Assemblée nationale et que le Québec entre dans une ère d'alternance PLQ-CAQ.

Par ailleurs, je crois que ce n'est pas en «démonisant» le PQ que l'on convaincra massivement des gens qui en sont les militants et les électeurs depuis 40 ans de se joindre à QS. Les membres de la «famille péquiste» ont fondé et aimé ce parti avec la même passion que les solidaires ont aujourd'hui pour QS. Les amener vers QS doit se faire dans la fraternité et les luttes conjointes. Ces luttes conjointes pourront se faire dans le cadre d'alliances. Pas dans un cadre de railleries et de division.

Bref, dans l'état actuel des choses, ni QS, ni le PQ ne pourront bloquer les libéraux en 2018, en 2022 - voire en 2026 ! Ce scénario m'apparaît catastrophique pour l'avancement des enjeux que défend QS et que le PQ a également souvent portés.

Trois décisions courageuses

La balle semble donc objectivement dans le camp du PQ qui tiendra son congrès en novembre prochain. QS tiendra aussi un congrès, quelques jours plus tard, en décembre. Je crois que mes collègues solidaires pourraient reconsidérer sérieusement l'idée de pactes ou d'alliances si le congrès péquiste prenait les trois grandes décisions courageuses suivantes :

1- Adopter les parties du cahier de proposition qui constituent un rapprochement avec le pro-gramme de QS (scrutin proportionnel mixte compensatoire, salaire minimum à 15$, Pharma Québec, etc.);

2- Adopter massivement une résolution spéciale visant à rompre avec les discours identitaires diviseurs et opter plutôt pour une approche citoyenne inclusive à l'endroit des minorités racisées et plus spécialement celles de confession musulmane ;

3- Remplacer Jean-François Lisée par un chef plus ouvert et plus modéré (par exemple, Alexandre Cloutier ou Véronique Hivon). Évidemment, cela demanderait un sens de l'État exceptionnel à M. Lisée qui devrait démissionner suffisamment tôt pour permettre une course à la chefferie qui culminerait au congrès péquiste de novembre.

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Je ne saurais dire si le fait de révéler la fameuse «entente secrète» au congrès de mai dernier, AVANT le vote des délégués sur les alliances, aurait suffisamment changé la donne pour faire basculer le vote en faveur de la convergence.

C'est pourquoi je me permets cette épineuse sortie publique aujourd'hui : parce que je suis sincèrement persuadé que ces trois «décisions courageuses» sont les principaux éléments qui manquent pour convaincre une majorité de délégués solidaires de voter en faveur d'un quelconque scénario d'alliance ou de pacte avec le PQ. Ces changements ne constituent donc pas tant une demande aux militants péquistes qu'un diagnostic de l'échec des causes de la défaite de la convergence au congrès de Québec solidaire de mai dernier.

Si ceux qui ont suivi ma campagne savent que je suis de bonne foi, je comprendrais que mes propositions puissent passer pour de l'ingérence dans les débats internes du PQ. Ce qui ne m'empêche pas de les jeter aujourd'hui comme une bouteille à mer, en espérant qu'elles arrivent à bon port, contre vents et marées, et entreprendre une réflexion chez des militants sincères habitant d'autres rivages.

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