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Aimer Fantasia pour les bonnes raisons!

Si la communauté du fantastico-geek est bien présente à Fantasia, le festival me donne surtout l'impression de s'adresser à tous les cinéphiles, quels qu'ils soient. C'est-à-dire à ceux qui ne demandent qu'à être surpris par des propositions de cinéastes passionnés
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À l'occasion de la conférence de presse organisée pour dévoiler aux critiques et journalistes le contenu de la prochaine édition de Fantasia, la dynamique Catherine Pogonat, plus sautillante que jamais, nous présentait son émission consacrée au festival (à voir les dimanches du 20 juillet au 3 août, sur MAtv). Comme il est d'usage en de telles circonstances, elle clamait son amour pour le festival en mettant de l'avant les deux principales qualités de l'événement (du moins à ses yeux).

D'une part, elle déclarait apprécier son ambiance de concert rock. D'autre part, elle louait la qualité de la programmation et affirmait pouvoir choisir n'importe quel film au hasard dans le catalogue en étant certaine de ne jamais être déçue! Mais ces arguments sont-ils vraiment ceux qui pourraient convaincre les récalcitrants à participer à ce qui est un des festivals de cinéma les plus excitants de Montréal? J'en doute!

Je sais que certains organisateurs apprécient un public particulièrement démonstratif. Il n'y a qu'à voir Mitch Davis (co-directeur du festival) s'adresser à la foule qu'il souhaite en délire et l'incitant à applaudir à chaque instant, pour s'en convaincre. Mais est-ce vraiment une raison pour apprécier Fantasia. Les "miaou" précédant la plupart des projections et les applaudissements lorsqu'un méchant se fait tuer sont amusants un temps, mais relèvent plus du folklore inhérent à ce genre de festival que du véritable intérêt. De plus, les spectateurs assidus auront relevé que certains films suffisamment puissants parviennent à faire taire les plus exaltés... parfois même en cours de route! À ce titre, la projection de l'an passé de Lesson of Evil fut très instructive. Dans un premier temps la réaction du public aurait probablement plu à certains. Mais lorsque Takashi Miike fait basculer son film vers une violence de plus en plus douloureuse, les choses changent. Lors de cette projection, même les plus bruyants finirent par rester muets devant la dernière partie du film, pourtant généreuse en hémoglobine! Un tel film prouve que s'ils aiment s'amuser, les spectateurs de Fantasia savent aussi ce qu'il regardent. Lorsque ce n'est pas le cas (ce qui arrive parfois) les hurlements arrivant au mauvais moment sont plus ridicules qu'autre chose. S'ils peuvent permettre à deux ou trois rigolos de paraître cool aux yeux de leurs amis, laissons-leur ce maigre plaisir. Demandons-nous plutôt s'il est judicieux d'en faire un argument pour inciter les spectateurs à venir à Fantasia. J'en doute!

L'autre argument avancé n'est pas plus concluant. A-t-on vraiment envie d'être sûr de pouvoir aimer tous les films projetés? Une telle affirmation tendrait à prouver que Fantasia est un festival du consensus. Mais souhaite-t-il vraiment l'être? Là encore, j'en doute!

Si l'on se fie à la programmation, il semble important aux organisateurs d'intriguer, de déstabiliser, de questionner, mais pas obligatoirement de plaire à tout prix (cette affirmation est évidente à propos du très intéressant volet Camera Lucida, mais elle est tout aussi vraie pour le reste de la programmation... du moins en grande partie). S'il est cependant possible de voir des divertissements inoffensifs à Fantasia, on peut également se retrouver face à un film d'un kitsch improbable, un film quasi expérimental, un exercice de style pur et dur... et il est évident qu'aucun film ne plaira intégralement à tout le monde. Mais le cinéphile sait bien que la curiosité fait partie de son plaisir. Être cinéphile, c'est être curieux, être capable de voir certaines qualités dans un film sans l'aimer forcément. C'est d'ailleurs ce qui nous pousse à nous questionner sur le cinéma, sur notre place de spectateur, sur les propositions d'un cinéaste. Pour les questionnements qu'il suscite, Fantasia est un festival particulièrement intéressant. À côté d'un Zombi Ass: Toilet of the Dead (vu l'an dernier), il est capable de nous proposer des films beaucoup plus ambitieux, voire très cérébraux, dont certains n'ont d'ailleurs plus grand-chose à voir avec le cinéma de genre. Il propose également des films qui relèvent autant du cinéma de genre que du cinéma d'auteur, en prenant le risque de déstabiliser les ayatollahs du cinéma sérieux tout autant que les bisseux hardcore (Schoolgirl Apocalypse, vue en 2012, en est un très bel exemple).

Attention donc... Fantasia ne s'adresse pas uniquement à un public cherchant à hurler de joie à la vision de la première goutte de sang venue. Contrairement à ce que l'on pourrait imaginer, il ne s'adresse pas à un public cible. Cela témoignerait d'une envie de n'être qu'un ghetto de plus pour une communauté prédéfinie. Si cette communauté, au demeurant fort sympathique (le fantastico-geek), est bien présente à Fantasia, le festival me donne surtout l'impression de s'adresser à tous les cinéphiles, quels qu'ils soient (ce qui inclut le fantastico-geek, évidemment, dont la cinéphilie va d'ailleurs souvent bien au-delà de son genre de prédilection)... c'est-à-dire à ceux qui ne demandent qu'à être surpris par des propositions de cinéastes passionnés (mais avouons-le plus ou moins talentueux).

Nous savons également qu'il y aura du déchet dans cette nouvelle édition, mais qu'importe. Cette année, je visionnerai aussi bien Zombieavers que White Bird in a Blizzard, Aux yeux des vivants qu'Ugly, Cold in July que Kumiko The Treasure Hunter. J'en aimerai quelques-uns... d'autres probablement beaucoup moins, et je laisserai à certains spectateurs (faute de temps, il faut tout de même se fixer des priorités) le plaisir de visionner des "kitscheries" nippones.

Une chose est sûre: je verrai à Fantasia des films réalisés par des amoureux de cinéma, en sachant que chaque réalisateur peut avoir une conception très différente de sa passion. C'est surtout probablement pour cette diversité et pour ce que je perçois comme un refus de vouloir plaire à tout prix que Fantasia est indispensable!

Pour s'en convaincre, rendez-vous à partir du 17 juillet à l'université Concordia (principalement).

Pour plus d'info sur la programmation, suivez le lien!

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