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Où en sommes-nous, maintenant?
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Il me semble difficile de nous éloigner de la recommandation du commissaire à l’éthique et d’inclure les députés dans la décision concernant leur rémunération globale.
franckreporter via Getty Images
Il me semble difficile de nous éloigner de la recommandation du commissaire à l’éthique et d’inclure les députés dans la décision concernant leur rémunération globale.

Je reviens sur la question de la rémunération des députés, qui m'interpelle particulièrement en raison de ma fonction parlementaire.

On aura compris que je soumets cette réflexion personnelle aux Québécois et à mes 124 collègues de l'Assemblée nationale dans le contexte de la tenue prochaine des caucus des différents partis précédant la dernière session législative avant les prochaines élections générales.

Comme leader du gouvernement et ministre de la Réforme des institutions démocratiques, j'ai eu à présenter un projet de loi, toujours au feuilleton et préavis de l'Assemblée, qui avait pour but de donner effet à une décision unanime du Bureau de l'Assemblée nationale, le BAN.

En effet, en 2013, le BAN a mandaté un comité consultatif indépendant sur les conditions de travail et le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale, le comité L'Heureux-Dubé, afin de proposer de nouvelles conditions de rémunération aux députés, de manière à ce que ceux-ci n'aient pas à en décider eux-mêmes, ce qui les aurait placés en apparence d'un conflit d'intérêts.

Nous n'avons pas réussi à entreprendre l'étude de ce projet de loi, puisque le comité n'avait pas le pouvoir de rendre ses conclusions exécutoires et que des partis ont retiré leur appui au rapport.

À titre d'exemple, la CAQ argumentait ne pas vouloir s'associer à une hausse de salaire des députés, même si la proposition, dans son ensemble, réduisait le poids financier imposé aux contribuables.

Depuis, le gouvernement fédéral a changé une disposition fiscale; ce qui aura pour effet d'imposer, à compter de janvier 2019, une indemnité jusqu'alors non imposable. Cela ramenait dans l'actualité la question de la rémunération des députés.

Évidemment, ceux-ci peuvent décider de ne poser aucun geste; cela entraînera une diminution de leur rémunération. C'est la position que semblent privilégier plusieurs membres de mon caucus et, sans doute, certains dans les autres caucus. Personnellement, je considère que cette option évite peut-être l'opprobre populaire, mais elle participe à une certaine dévalorisation de notre rôle d'élu et ne règle pas la question.

Personnellement, je considère que cette option évite peut-être l'opprobre populaire, mais elle participe à une certaine dévalorisation de notre rôle d'élu et ne règle pas la question.

Cela dit, les députés pourraient aussi décider d'apporter une correction à leur rémunération.

C'est en tenant compte de cette éventualité que les leaders des groupes parlementaires ont abordé cette question à l'occasion de discussions globales sur une éventuelle modernisation de nos pratiques parlementaires.

Le sujet a, par la suite, fait l'objet d'échanges plus détaillés entre les whips et leurs équipes au BAN; ceux-ci ont convenu de présenter aux députés deux scénarios législatifs visant à annuler les effets de la nouvelle règle fiscale fédérale.

Si l'un de ces scénarios était entériné, la présentation d'un nouveau projet de loi allait être nécessaire. Et, encore une fois, comme cela avait été le cas à la suite du dépôt du rapport L'Heureux-Dubé, pourtant entrepris dans la foulée du consensus des partis politiques, il était bien possible de voir à nouveau des partis se dissocier de cette modification à la rémunération.

Cette perspective ne me plaisait pas.

D'une part, rien ne m'assurait que les oppositions allaient rester solidaires à la décision. D'autre part, le BAN rompait avec l'approche de 2013, qui excluait la participation des députés à ces décisions. Notons que le commissaire à l'éthique indiquait, en février 2015, dans son rapport sur la mise en œuvre du Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée nationale, qu'il importait « de mettre en application immédiatement les mesures nécessaires pour écarter le risque d'une situation de conflit d'intérêts dans la détermination des conditions de travail et de la rémunération des membres de l'Assemblée nationale » et qu'en ce sens, il faisait sienne la recommandation visant la création d'un tel comité indépendant permanent doté de pouvoirs décisionnels.

Dans cet environnement, la proposition du BAN reposant sur un processus sollicitant les députés, qui allait entraîner une perception de conflit d'intérêts, m'inquiétait.

Comme le reconnaissaient certains de leurs députés, cette hausse salariale ne visait qu'à neutraliser les effets fiscaux d'une décision fédérale.

C'est dans ce contexte qu'une déclaration de fin de session m'a amené à imputer à la CAQ le désir de hausser le salaire des députés. Comme le reconnaissaient certains de leurs députés, cette hausse salariale ne visait qu'à neutraliser les effets fiscaux d'une décision fédérale. J'aurais dû être plus précis et moins incisif.

Où en sommes-nous, maintenant?

D'abord, il me semble difficile de nous éloigner de la recommandation du commissaire à l'éthique et d'inclure les députés dans la décision concernant leur rémunération globale. Par ailleurs, il faudra bien revenir à cette question un jour.

Le rapport L'Heureux-Dubé prévoyait un mécanisme permanent de révision. Cela pourrait être une option pour envisager de revoir, dès maintenant, notre rémunération globale, en incluant la question de la nouvelle règle d'imposition fédérale.

Ce serait certainement mon choix privilégié. Cela correspond d'ailleurs au projet de loi que j'avais présenté à l'Assemblée nationale en novembre 2015.

D'autres préféreront sans doute une intervention ciblée vers la nouvelle règle fiscale fédérale, compte tenu de son effet prochain, soit en janvier 2019. C'est l'orientation que semblaient prendre les membres du BAN dernièrement.

S'il nous fallait suivre cette voie, il serait difficile de le faire sans tenir compte de la recommandation du commissaire à l'éthique à l'égard des conflits d'intérêts.

Une approche envisageable serait d'ajouter, dans cette législation ciblée qui se limite à neutraliser les effets de la nouvelle règle fiscale fédérale sur la rémunération, des dispositions établissant, pour l'avenir, un comité de rémunération indépendant et permanent avec force exécutoire.

Ce comité pourrait être composé d'une présidence approuvée aux deux tiers des membres de l'Assemblée nationale sur proposition commune du premier ministre et du chef de l'opposition officielle après consultation des autres chefs, du jurisconsulte de l'Assemblée et d'une troisième personne désignée par ces derniers.

On pourrait imaginer que ce comité indépendant et décisionnel produira un rapport au cours de la prochaine législature, avec application des conclusions à la législature suivante.

De cette manière, nous répondrions positivement au commissaire à l'éthique et ferions de cette législation la dernière octroyant un rôle décisionnel aux députés.

Évidemment, pour éviter de revivre les écueils du passé, les chefs de partis, les membres de leurs formations et les députés indépendants devraient accepter cette approche et prendre, avant le dépôt d'un tel projet de loi, un engagement clair de l'adopter.

Je soumets donc respectueusement à l'ensemble de mes collègues la proposition de donner suite à la recommandation du commissaire à l'éthique et de légiférer pour une dernière fois, en créant un comité de rémunération indépendant doté de pouvoirs exécutoires.

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