Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Lettre ouverte à Pauline Marois

Chère Madame Pauline Marois,D'ordinaire, ce type de communication sert principalement à fustiger la personne à qui s'adresse le message. Ce n'est pas le cas! Comme des dizaines de milliers, voire des millions, de personnes qui désirent ardemment que leur vote compte, que leurs opinions soient entendues, je m'adresse à vous aujourd'hui pour vous demander d'entreprendre une réforme du mode de scrutin actuel que René-Lévesque, fondateur de votre parti, qualifiait lui-même de « démocratiquement infect ».
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.
PC

Chère Madame Pauline Marois,

D'ordinaire, ce type de communication sert principalement à fustiger la personne à qui s'adresse le message. Ce n'est pas le cas!

Comme des dizaines de milliers, voire des millions, de personnes qui désirent ardemment que leur vote compte, que leurs opinions soient entendues, je m'adresse à vous aujourd'hui pour vous demander d'entreprendre une réforme du mode de scrutin actuel que René-Lévesque, fondateur de votre parti, qualifiait lui-même de « démocratiquement infect ». En d'autres termes, je souhaiterais qu'au cours de votre mandat, si vous êtes élue, vous implantiez un mode de scrutin qui représente davantage les citoyen(ne)s à l'Assemblée nationale.

Madame, croyez-le ou non, même si je suis un militant de Québec solidaire, j'aimerais vous aider à accéder au pouvoir le 4 septembre prochain pour les raisons que j'ai décrites dans mon précédent article et qui découlent toutes de mon envie de voir le Parti libéral quitter le pouvoir et de voir s'instaurer un gouvernement un peu plus solidaire de son peuple.

Pour reprendre l'expression des meilleurs pédagogues, voici ce que je vous propose : Aidez-moi à vous aider! Aidez-moi à vous aider à battre le gouvernement actuel et à vous faire gagner davantage d'électrices et d'électeurs en vous expliquant pourquoi faire une proposition de réforme du mode de scrutin les convaincrait de voter pour vous! Pour ce faire, je n'utiliserais que vos propres promesses...

Vous dites vouloir combattre le cynisme ambiant qui règne dans la population et qui entraine une désaffection massive des citoyen(e)s pour la chose politique, pour leur propre destin et celui de leur province.

Comme le souligne le très réaliste texte La paix sociale par la proportionnelle paru dans le Voir et signé par bon nombre de spécialistes politiques et de personnalités publiques, « d'élections en élections, le taux de participation est en chute libre à un point tel qu'au dernier suffrage, le nombre d'électeurs et d'électrices s'étant abstenu de voter (2,45M) était pratiquement égal à celui des votes libéraux (1,36M) et péquistes (1,14M) réunis ».

Madame, vous êtes une femme de conviction et vous comprendrez donc que celles des citoyen(ne)s leurs tiennent tout autant à cœur et doivent être également respectées. Lorsqu'on dit à quelqu'un que sa voix est écoutée, il s'exprime, il vote... En fait, j'oserai également vous dire qu'il est de votre devoir d'élue d'accroître la participation citoyenne!

Vous dites vouloir obtenir un gouvernement PQ majoritaire pour mener à bien vos actions? Il ne tient qu'à vous de réussir en mettant un terme à ce cynisme, en redonnant au peuple la place qu'il mérite au sein d'une véritable démocratie. L'annonce d'une telle proposition amènerait en masse les gens vers les urnes - ce qui est généralement favorable au PQ...

Vous n'êtes pas sans savoir que la grande majorité des analyses en sciences politiques s'accordent à dire que le mode de scrutin proportionnel mixte est le plus démocratique et que le mode de scrutin actuel est le moins représentatif et le plus discriminant pour les votants. Les outils pour entreprendre cette réforme n'attendent que vous, comme cela est expliqué dans le même texte que je mentionnais plus haut : « le rapport des États généraux sur la réforme des institutions démocratiques de 2003, les mémoires, audiences et rapports de la Commission spéciale sur la loi électorale (2005-2006), le rapport du Directeur général des élections (2007) et la démarche actuelle du Mouvement pour une démocratie nouvelle contiennent tous les éléments nécessaires pouvant mener à l'élaboration rapide d'un projet de loi solide, réaliste et qui fait l'unanimité ». D'autres modes de scrutin plus démocratiques sont également proposés, soit par certains partis politiques (même le vôtre, bien que vous semblez avoir abandonné ce projet) soit par des organismes tel que le Mouvement démocratie nouvelle. Les idées viables pour réformer l'antique mode de scrutin actuel sont nombreuses.

Vous dites vouloir lutter efficacement contre la corruption en tout genre qui sévit dans notre belle province. Pourquoi ne pas faire le choix de ce mode scrutin qui permettrait le pluripartisme et donc, inévitablement, plus de transparence dans la gestion des affaires de la province... Tous les principaux partis, y compris le vôtre, sont suspectés à tort ou à raison de corruption (financement des partis, etc.). Ne voulez-vous pas gagner en intégrité aux yeux de la population?

Vous disiez récemment, en critiquant le gouvernement Charest, qu'il ne fallait pas se battre contre la jeunesse, mais qu'il fallait l'écouter. Les jeunes partis que sont QS et ON, à l'instar des jeunes qui manifestent dans la rue, demandent d'être écoutés. Ces formations politiques sont composées de bon nombre de jeunes qui s'impliquent plus que jamais dans le destin de leur province. Vous pouvez être fière de cette jeunesse et vous dites l'être. Entendez-la!

Votre principal argument pour maintenir le statu quo sur la question est que, selon vous, ce mode de scrutin peut nuire à l'indépendance du Québec et que celle-ci est prioritaire à l'établissement de ce nouveau mode de scrutin. Madame Marois, les gens ne sont pas stupides, vous ne pouvez pas nier que les deux partis (QS, ON) qui réclament cette réforme sont également souverainistes... L'habituel argument du PQ ne fonctionne tout simplement plus.

Nous comprenons alors que l'unique raison de refuser cette réforme relève d'une stratégie électoraliste qui favorise votre parti. En d'autres termes, il s'agit seulement d'une stratégie politique pour réserver au PQ plus de siège à l'Assemblée nationale et se maintenir au pouvoir. Nous sommes bien loin des préoccupations concrètes de vos concitoyens... qui ne sont plus dupes.

Dans son article, La proportionnelle se fait attendre, Julie Roy souligne le peu d'effort du PQ à satisfaire cette importante préoccupation citoyenne : « Aujourd'hui, l'intérêt péquiste a quelque peu diminué, croit Scott McKay: «Lors de mon intervention devant la commission spéciale, le président, Sylvain Simard, du Parti québécois, lisait son journal. C'est vous dire combien la réforme les intéresse.» En 1998, le Parti québécois a été porté au pouvoir bien qu'il ait récolté moins de votes à l'échelle provinciale que les libéraux. «Les péquistes n'iront certainement pas de l'avant avec le projet de réforme. C'est le parti qui bénéficie le plus du système actuel», rappelle André Blais de l'UdeM ».

Madame, l'argument du choix stratégique contre la division des votes que vous utilisez et que je soutiens pour le 4 septembre ne dépassera pas le terme de cette élection, soyez-en sûre! Vous ne pouvez décemment pas profiter de cette situation en disant aux citoyen(ne)s, qu'à cause du mode de scrutin actuel, ils ou elles ne peuvent voter autrement que pour le PQ afin de déloger le gouvernement libéral du pouvoir, et conserver ce mode de scrutin qui ne fait l'affaire que des membres de votre parti... et non du peuple!

Madame, c'est la dernière ligne droite avant l'élection... Craignez qu'un des deux autres principaux partis en lice ne fasse cette proposition avant vous (la CAQ par exemple...). La promesse d'une réforme du mode de scrutin pourrait possiblement être une des clés majeures qui assurera le pouvoir au parti qui l'offrira...

Enfin, vous disiez lors du premier débats des chefs « ne pas avoir peur de la démocratie » et vous appeliez de vos vœux la confiance des citoyens et citoyennes à votre égard. Qu'attendez-vous pour mettre en œuvre cette réforme et redonner à vos concitoyen(ne)s une certaine confiance envers le monde politique et leurs institutions démocratiques?

Vous écriviez sur votre page Facebook hier matin : « Comme première ministre, je veux léguer à mes enfants, à mes petits-enfants, à tous les individus qui habitent le territoire du Québec un pays où les rêves se réalisent, où les espoirs se concrétisent et où la liberté est un devoir à accomplir ». Commencez donc par nous offrir la liberté de choisir, nous vous en serons tous redevables!

Pensez bien que je suis ravi de votre intention d'annuler la hausse des frais de scolarité, de votre désir de combattre la corruption qui règne chez nous, de mieux gérer l'exploitation de nos ressources naturelles, d'améliorer les politiques sociales pour réduire les inégalités ou encore de défendre bec et ongles la laïcité et notre belle langue française et, par là, ce qui reste de notre identité.

Madame Pauline Marois, soyez à la hauteur de vos ambitions, de vos meilleures intentions. Vous seriez l'instigatrice d'un progrès majeur pour notre société en entreprenant cette réforme nécessaire et, sans exagérer, d'un réel espoir de changement pour tou(te)s les citoyen(ne)s. En tant qu'individu et que femme politique, distinguez-vous du cynisme ambiant qui touche finalement plus le milieu politique que les citoyen(ne)s. Bref, soyez à la hauteur de l'éveil de notre peuple!

Pour en savoir plus sur les différents modes de scrutin proposés et pour mieux comprendre les enjeux de cette réforme :

Pauline Marois en campagne

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.