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La révolution virtuelle: l'économie n'est plus ce qu'elle était

L'essor des communications et des transactions électroniques était prévisible dès la mise sur pied d'Internet il y a une vingtaine d'années.
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L'essor des communications et des transactions électroniques était prévisible dès la mise sur pied d'Internet il y a une vingtaine d'années. Il s'agissait d'attendre qu'un nombre suffisant d'usagers se dotent des terminaux requis et apprivoisent cette nouvelle culture d'information, de communication et de consommation. La chose a été facilitée par l'émergence progressive d'instruments et de moyens complémentaires à l'ordinateur personnel : réseaux sociaux, téléphones intelligents, paiements en ligne sécurisés, géolocalisation, infonuagique, etc. Aujourd'hui, les transactions électroniques, payantes ou gratuites, touchent un très grand nombre de secteurs d'activité économique et leur progression ne donne aucun signe de ralentissement. L'économie est changée en profondeur dans ses structures et dans ses modes de fonctionnement, et ce à un point tel qu'il n'est pas exagéré de parler d'une révolution du virtuel, comparable par l'ampleur de ses effets sur la consommation et l'investissement à celles générées, en d'autres époques, par la machine à vapeur, le pétrole et l'électricité.

Ces changements sont d'abord apparents dans le commerce de détail. Les ventes en ligne atteignent maintenant 1,5 billion $ par année [1] et le commerce électronique représente une tendance avec laquelle tous les acteurs, grands ou petits, doivent compter. Ainsi, chez Walmart, les ventes en ligne ont progressé de 30% en 2013 pour atteindre 10 milliards de dollars alors que les ventes en magasin déclinaient pendant cinq trimestres consécutifs aux États-Unis. Le géant du commerce de détail offre maintenant 8 millions d'articles en ligne. Bien qu'énorme ce chiffre est encore loin des 230 millions d'articles offerts par Amazon. Cette pionnière du commerce électronique occupe maintenant le 9e rang du commerce de détail mondial et elle devrait d'ici quelques années atteindre la 2e position [2]. Pas mal pour une entreprise créée il y a vingt ans seulement.

On ne compte plus les secteurs du commerce qui doivent revoir leurs modèles d'affaires devant la progression irrésistible des transactions en ligne : journaux et autres médias, courtiers en valeurs mobilières, clubs vidéos, libraires, disquaires, agences de voyages, hébergement touristique, services postaux, entreprises de taxis et d'autocars, agences de location d'équipements ou d'autos, imprimerie, marchés aux puces, etc. Même l'enseignement universitaire peut maintenant se faire par télécommunication. Réalistes et pragmatiques, certains secteurs prennent les devants et incitent leurs usagers à migrer vers les services en ligne. Que l'on songe à cet égard aux banques, aux pharmacies et à plusieurs services gouvernementaux, dont les agences fiscales.

S'il était encore besoin de se convaincre de l'importance qu'a prise l'économie virtuelle, il suffirait de jeter un coup d'œil sur les titres boursiers. Elle est bien finie l'époque où les plus grandes capitalisations étaient réservées aux sociétés pétrolières ou manufacturières. Désormais, ce sont les fournisseurs de services et d'équipements du monde virtuel qui occupent le haut du pavé. Entre 2009 et 2014, avec une capitalisation boursière de plus de 500 M$ Apple a détrôné Exxon Mobil au premier rang mondial et Google et Microsoft occupent respectivement les 3e et 4e rangs [3]. Facebook (188 G $) et Amazon (144 G$) recueillent également la faveur des investisseurs. Et est-il besoin de rappeler qu'Alibaba, l'alter ego chinois d'Amazon, a fracassé des records lors de sa récente entrée en bourse.

La prédilection pour les services en ligne s'explique facilement. Les organisations, privées ou publiques, y voient un potentiel de productivité accrue par l'élimination de manutentions générant des coûts, des erreurs et des délais. Les entreprises peuvent aussi profiter d'informations précieuses sur les préférences individuelles de la clientèle telles qu'elles transparaissent dans leurs habitudes de fréquentation des réseaux sociaux et des sites Internet. Le développement et la mise en marché des produits et des services se font ainsi avec un minimum de risques d'échecs et de pertes financières.

La grande efficience des transactions virtuelles profite aussi aux usagers puisqu'ils ont accès à une plus grande variété de choix et à de meilleurs prix en plus d'éviter des files d'attente et de pouvoir transiger au moment qui leur convient, incluant la nuit, les fins de semaine et les jours fériés.

Un grand nombre de sites offrent également la possibilité aux clients de faire part de leurs commentaires, positifs ou négatifs, sur les services reçus. Les nouveaux clients potentiels disposent ainsi d'une information leur permettant de minimiser les risques de mauvaises expériences [4]. De leur côté, les entreprises et les petits fournisseurs de services disposent également, par le truchement du web, de divers instruments permettant d'apprécier le sérieux et la solvabilité de ces clients potentiels.

Ces changements ne se font pas sans heurts. Ils forcent les entreprises à des ajustements considérables de leurs modèles d'affaires quand ils ne remettent pas en cause leur survie même. Ainsi l'avenir s'annonce difficile pour les emplois consistant à colliger, consigner ou diffuser des informations banales et répétitives. La société de l'information se passe de plus en plus facilement des intermédiaires et des clercs. Dans une bonne proportion, les surnuméraires du commerce n'auront d'autres choix que de se tourner vers des emplois précaires, non essentiels et mal rémunérés. Cette évolution est déjà en cours si on en juge par la qualité décevante des nouveaux emplois créés.

Les gouvernements eux-mêmes ne s'en tirent pas indemnes puisque la révolution du virtuel soulève des questions importantes en matière de politiques publiques. Ce sera l'objet d'un prochain billet.

[1] THE ECONOMIST, How far can Amazon go ? 21 juin 2014.

[2] THE ECONOMIST, Relentless.com, 21 juin 2014.

[3] Selon une étude de Pwc publiée le 25 juin 2014

[4] Ce danger existe effectivement sur les sites ou on transige directement avec le fournisseur du bien ou du service acheté. En pratique, le commerce électronique se fait plutôt en grande majorité par le biais d'intermédiaires (entre le fournisseur et l'acheteur) spécialisés tels que Amazon ou Airbnb. Or, les sites de ces intermédiaires sont configurés de façon telle que seuls les clients véritables (ceux qui ont conclu la transaction) peuvent déposer des commentaires.

Ce billet a aussi été publié sur Libres Échanges, le blogue des économistes québécois.

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