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Le cardinal Turcotte, témoin de l'Évangile

Le cardinal Turcotte était un bon vivant, un homme pratique et de principes, qui savait consulter et prendre des décisions. Fidèle à l'enseignement de l'Église, il restait ouvert aux défis de ce temps, mais ne transigeait pas avec sa conscience, ses convictions.
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« Le style est l'homme même ». Cette formule célèbre de Buffon, extraite de son discours prononcé à l'Académie française le 25 août 1753, s'applique bien au cardinal Jean-Claude Turcotte. Non que celui-ci ait été un écrivain; il reconnaissait qu'il n'avait aucun talent pour écrire. Par contre, il aimait parler aux gens, aider les pauvres, rencontrer les médias, sans se défiler devant aucune question. C'était le style Turcotte : simple et direct, fidèle à l'Évangile, doté d'un sens de l'humour et « d'un gros bon sens pastoral », comme l'exprimait de Rome le cardinal Marc Ouellet dans un message vidéo.

Le cardinal Turcotte était un bon vivant, un homme pratique et de principes, qui savait consulter et prendre des décisions. Sa franchise et sa simplicité plaisaient aux journalistes. Fidèle à l'enseignement de l'Église, il restait ouvert aux défis de ce temps, mais ne transigeait pas avec sa conscience, ses convictions. C'est ainsi qu'il remit son insigne de l'Ordre du Canada après avoir appris que le même honneur serait accordé au docteur Morgentaler, vedette de l'avortement au Canada. Ce geste d'éclat demandait un certain courage. Certains pouvaient le traiter de rétrograde, d'homme du passé, mais lui allait son chemin en étant cohérent avec ses valeurs.

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L'archevêque de Montréal en imposait par sa stature physique et son franc-parler. On pouvait être intimidé en sa présence, mais lorsqu'il nous parlait, on se sentait comme un membre de la famille. En tant que « prince de l'Église », il n'était pas du tout pompeux. Je l'ai rencontré à quelques reprises, surtout à l'Oratoire Saint-Joseph en 2010, à l'occasion de l'annonce de la canonisation de frère André qu'il aimait beaucoup, parce qu'il se reconnaissait dans l'humilité du portier de l'Oratoire. J'ai mieux saisi à ce moment-là comment il était un bon communicateur, un habile vulgarisateur, un homme de foi.

Une année, j'ai prêché la neuvaine de saint Joseph à l'Oratoire. Le 19 mars, il a relevé dans son homélie comment il appréciait le thème : « Sur les chemins de la prière ». Il a parlé de l'importance de la prière collée aux réalités concrètes, qu'il avait apprise dans la J.O.C. (Jeunesse ouvrière chrétienne). Prier, c'est parler à Dieu, écouter sa Parole, vivre en sa présence. Lui ne parlait pas à Dieu, il « jasait » avec lui en toute confiance, sachant qu'il lui répondait à sa manière, au cœur même de sa fragilité. Dans un livre d'entretiens, le journaliste Pierre Maisonneuve lui avait demandé s'il avait peur de la mort, il avait répondu : « Non. Je vais enfin rencontrer Celui avec qui je jase depuis des années! J'ai hâte de Le voir ».

Le cardinal Turcotte est décédé en paix dans la nuit du 8 avril, à l'âge de 78 ans. À cette date, il y a dix ans, c'étaient les funérailles de son ami Jean-Paul II, qui l'avait nommé archevêque de Montréal en 1990, puis cardinal en 1994. Il avait été le coordonnateur de sa venue à Montréal en 1984. Il s'inspirera beaucoup de ce géant de la nouvelle évangélisation, accordant comme lui la priorité aux jeunes et à la famille. Il participera aux deux conclaves qui donneront à l'Église Benoît XVI et François.

Le style évangélique de l'archevêque de Montréal ressemblait à celui du pape François : amour ardent de Jésus et de l'Église, témoignage simple et direct, proximité affective avec les pauvres et les sans-abris, souci de transmettre les valeurs de partage et de miséricorde, joie de revenir sans cesse à l'Évangile. Dans un télégramme daté du 8 avril, le pape François a dit de lui : « Pasteur zélé et attentif aux défis de l'Église contemporaine ».

Voici quelques paroles du cardinal Turcotte, rapportées par Pierre Maisonneuve, dans le livre Jean-Claude Turcotte. L'homme derrière le cardinal (Novalis, 1998).

« Je considère que c'est une grâce pour moi d'avoir compris qu'avant d'être une religion avec des obligations, la foi est avant tout une rencontre de quelqu'un, la découverte de Jésus Christ et de son message, l'Évangile » (p. 22).

« Une des grandes tentations de l'Église est de s'installer dans l'humain. Le message de l'Évangile en est un de route, de chemin, de dépassement, pas d'installation » (p. 54).

« Ma fragilité, c'est de constater que je ne suis pas capable d'être complètement fidèle au message de l'Évangile » (p. 57).

« Quand on lit la vie d'un saint, il est inspirant de constater qu'une personne ayant vécu dans un siècle donné a traversé des difficultés que nous rencontrons nous-mêmes aujourd'hui » (p. 131).

« L'important, c'est que vous aimiez Jésus Christ et son message. L'Église est là pour vous soutenir. Elle est au service du monde, elle ne vit pas pour elle-même » (p. 171).

Ce billet a également été publié sur le blogue personnel de Jacques Gauthier

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