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Montréal, future capitale de l'innovation en sciences de la vie

Notre histoire est fertile en découvertes scientifiques et en apports aux nouvelles technologies. Mais les modèles ont changé. Pour faire sa marque dans ces domaines, nous devrons oser et innover.
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L'expression «les sciences de la vie» englobe en réalité toutes les sciences qui touchent au monde vivant. Elle pourrait tout aussi bien parler de botanique, d'agriculture, d'entomologie que de médecine, de pharmacologie ou encore d'écologie. En réalité, elle relève d'une philosophie scientifique qui considère le monde vivant comme un ensemble dans lequel tout est relié.

Dans le monde de la santé, ce paradigme est particulièrement observable. Aujourd'hui, l'enseignement, la recherche scientifique, la découverte et conception des médicaments, l'informatique sont tous reliés dans des univers aussi variés que les universités, les cégeps, les hôpitaux, les startups, les capitaux de risque, les PME, les entreprises de biotechnologie et les compagnies de recherche pharmaceutiques ainsi que celles des technologies médicales. Tous jouent un rôle dans la découverte et la mise en marché de nouveaux médicaments, traitements et appareils technologiques.

Forum des sciences de la vie

En début novembre dernier, la Chambre de commerce de Montréal organisait un Forum stratégique sur les sciences de la vie. Près d'une vingtaine de conférenciers y ont présenté divers points de vue afin que la métropole retrouve son statut de leader dans le domaine de l'innovation dans les sciences de la vie.

Notre histoire est fertile en découvertes scientifiques et en apports aux nouvelles technologies. Mais les modèles ont changé. Et pour faire sa marque dans ces domaines, nous devrons oser et innover. L'innovation est en effet le fer de lance des découvertes et elle doit adopter plusieurs voies: innover dans la recherche et dans les technologies, dans les façons de faire la recherche, dans l'intégration des divers acteurs de la recherche et de toutes les étapes, de la conception à la mise en circulation des résultats de la recherche. Le travail en vase clos est chose du passé. Aujourd'hui et pour un avenir prometteur, la théorie des vases communicants est plus appropriée. En plus d'innover, il faut oser. Oser de nouvelles avenues et oser communiquer. La recherche tenue secrète dans des laboratoires pour éviter de se faire voler ses idées n'a plus cours. Aujourd'hui, la recherche a besoin de tous les acteurs: des chercheurs aux gestionnaires de l'État en passant par le milieu des finances et, bien entendu, le grand public. La communication est la clé de voûte du succès de cette entreprise.

Une nouvelle voie thérapeutique

Parallèlement à ce phénomène, l'objet même de la recherche en santé change. De nouvelles avenues se dessinent.

Ainsi, l'ère du médicament «one size fits all» est en mutation. La médecine individualisée est à nos portes et des médicaments ultra-efficaces qui traiteront des nombres limités de patients selon leur profil génétique trouveront de plus en plus preneurs dans les années à venir.

Un exemple nous en a été fourni par le Dr Jean-Claude Tardif, directeur du Centre de recherche de l'Institut de cardiologie de Montréal. Avec des données génétiques de plus de vingt mille patients, il a pu être dégagé qu'un médicament très peu coûteux (la colchicine) pourrait se révéler d'une très haute efficacité pour réduire les risques de mortalité dus aux infarctus et aux AVC chez les personnes ayant un profil génétique adapté à ce médicament. Alors que les traitements universels actuels affichent un taux de succès au mieux de 25 %, ce médicament atteindrait 40 % d'efficacité chez ces patients avec le bon profil génétique.

De plus, certains traitements actuels peuvent coûter jusqu'à quinze mille dollars par patient par année ; la colchicine coûterait moins de trente cents par jour (moins de cent dix dollars par année). Quelques années seulement nous séparent des résultats définitifs de cette recherche maintenant mondiale et qui toujours est dirigée par nos chercheurs montréalais.

Les technologies médicales

Le monde des innovations technologiques n'est pas en reste. Toujours à ce forum, nous avons eu la chance d'entendre différents représentants de la recherche en instrumentation médicale. Voilà aussi un domaine en pleine effervescence. Plusieurs exemples ont été apportés. Nous n'avons qu'à penser à ces instruments anciennement réservés au milieu médical et hospitalier comme les sphygmomanomètres pour mesurer la tension artérielle (ce qu'on appelle vulgairement «la pression») ou encore les glucomètres pour mesurer les taux de glycémies sanguines. Combien ces appareils maintenant disponibles au grand public rendent de services à ces millions de personnes souffrant d'hypertension artérielle ou de diabète. De plus en plus, le patient peut devenir participatif à ses traitements grâce à ces appareils.

L'informatique est un autre allié de plus en plus présent en médecine. Non seulement permet-il un archivage constituant des banques de données gigantesques, mais aussi il ouvre la porte à des technologies diagnostiques et thérapeutiques qui relevaient, il y a quelques années à peine, de la science-fiction la plus pure. Un chercheur de l'Université de Montréal qui dirige une équipe d'une centaine de jeunes chercheurs, le Professeur Yoshua Bengio, nous a initié à l'apprentissage profond («deep learning»), un domaine où informatique et génétique s'allient pour une médecine personnalisée.

La recherche pharmaceutique

Malgré la perte récente de nombreux brevets pharmaceutiques, une perte de 55 milliards de dollars depuis 2005 au Canada, et l'augmentation des coûts de développement d'une nouvelle molécule et du temps qui lui est associé pour faire face aux nouvelles exigences réglementaires, l'industrie de la recherche pharmaceutique demeure, doit-on le rappeler, un maillon fort de l'écosystème des sciences de la vie. L'industrie a modifié son modèle d'affaires et le Québec a su s'y adapter et saisir les opportunités.

L'exemple de NEOMED, tel que souligné durant le Forum, illustre parfaitement ce virage technologique. Après la fermeture des laboratoires de recherches de la pharmaceutique AstraZeneca, 132 personnes perdaient leurs emplois. C'est alors que fut créé NEOMED pour mettre à la disposition de tous les chercheurs les facilités de recherche laissées vacantes par le départ de la compagnie. Aujourd'hui, NEOMED emploie plus de 145 personnes au sein des quelques 22 entreprises résidantes de leurs facilités. Et elle a le vent dans les voiles, avec 90 millions en financement public et privé (dont 55 millions en recherche et développement).

Le Québec pourrait aller encore plus loin. L'annonce d'une stratégie québécoise des sciences de la vie suscite beaucoup d'espoir. Les principaux acteurs la souhaitent ambitieuse et audacieuse.

Une subvention qui arrive à point

Oui, la recherche et l'innovation scientifique vont bien à Montréal et au Québec. Mais il ne faut pas oublier que la concurrence est vive. Alors qu'avant, nos plus grands compétiteurs se trouvaient à Toronto, de nos jours, ils sont répartis en divers pôles situés partout sur la planète. Comment faire alors pour demeurer dans la course?

L'excellence demeure un atout essentiel, mais il faut plus car on peut aller plus loin. Toujours à ce forum, Dominique Anglade, ministre de l'Économie, de la Science et de l'Innovation, est venue annoncer une subvention de cent millions de dollars immédiatement pour un total de quatre cent millions pour les trois futures années. L'annonce fut des mieux accueillie.

Autres pistes de solution

D'autres pistes furent aussi explorées durant cette journée. Ainsi, on souhaiterait une meilleure collaboration entre les chercheurs, l'industrie et le ministère de la Santé. D'un côté, les données recueillies par tous les intervenants de la santé (médecins, infirmières, chercheurs en milieu hospitaliers, etc.) pourraient être plus facilement accessibles à la recherche et au développement de différents produits.

À l'autre bout de la chaîne, l'acceptation de nouveaux médicaments et de produits technologiques devraient bénéficier de voies plus rapides d'adoption par notre ministère. Ainsi ces médicaments et ces technologies seraient plus rapidement disponibles pour nos patients à leur plus grand bénéfice. De plus, l'accès au marché est l'un des facteurs d'attractivité des investissements sur lequel nous devrions miser, tel que confirmé dans une étude de Montréal International. Nous devons innover dans la manière d'intégrer les innovations dans le réseau de la santé. Nous avons besoin de modes d'évaluation et d'inscription des médicaments plus rapides et innovants. Le marché mondial de la recherche et développement pharmaceutique est en croissance et le Québec devrait s'assurer d'en tirer une plus grande part.

Mais le plus important

Finalement, ou premièrement, tous ces discours qui sont connus des professionnels des sciences de la vie doivent trouver écho auprès des gouvernements et de la population. Il faut multiplier les efforts afin qu'ils puissent être informés de ce qui se passe et surtout de ce qui s'en vient du côté des sciences de la vie. Cette information ne doit cependant pas céder à la facilité. Il ne s'agit pas de lancer des chiffres qui seront contestés, ni sombrer dans les exemples populistes. La science relève d'une démarche rigoureuse et sérieuse. Sa communication devrait s'abreuver aux mêmes eaux.

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Mai 2017

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