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Malade notre système de santé: le passage à une ère nouvelle

C'est dans cette ère que veut entrer Santé-Québec, une gestion de la santé qui se réclame de la coopération.
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Devant la nouveauté, il est normal d'afficher un certain scepticisme. Pourtant la peur du changement ne peut empêcher à terme l'évolution. Arrive un jour où les bénéfices s'imposent et permettent de surpasser les prophètes de malheur. Plus grande liberté d'action, autonomie, participation aux profits, définition plus claire des mandats et des objectifs, régionalisation véritable, voilà tous des avantages que Santé-Québec pourra présenter par rapport à la gestion actuelle. Mais il est deux points sur lesquels nous devons insister plus particulièrement.

Un changement de pensée

Le premier est un changement radical de pensée. Alors que pendant les années 1970, nous affichions en tant que peuple une fierté face à notre système de santé, aujourd'hui, nombreux sont ceux qui éprouvent une certaine gêne.

L'arrivée de Santé-Québec devra inverser cette tendance défaitiste

D'une part, les étapes menant à sa réalisation se voudront rassembleuses. Il s'agira d'asseoir à une même table de réflexion des membres de diverses professions, des membres de comités de malades, de jeunes penseurs et des plus vieux, des syndicats et des gestionnaires actuels. Cet exercice sera le point de départ d'une unification des forces en présence pour se doter d'une société d'État, un organisme paragouvernemental capable d'apporter des solutions réelles pour soigner adéquatement notre population.

D'autre part, l'élaboration des objectifs et des responsabilités de Santé-Québec marquera un point de départ plus que motivant, fournira à tous une nouvelle énergie pour construire l'organisme idéal et non plus une recherche de multiples solutions pour tenter de rafistoler un système de santé qui s'effrite de toutes parts.

C'est un peu comme ériger les plans d'une nouvelle maison répondant aux besoins actuels plutôt que de réparer tantôt le toit, tantôt la plomberie, tantôt les fondations d'un édifice vétuste, usé et qui ne correspond plus aux besoins de la population.

Santé-Québec, c'est l'occasion unique de repartir à neuf, de bâtir un système adapté aux besoins actuels et futurs d'une société dans laquelle les gens auront le droit de vivre plus longtemps sans risquer de manquer de soins, tout en préservant les acquis et les réalisations positives du système actuel.

Une ère de collaboration

Santé-Québec voudra aussi établir de nouvelles normes quant aux rapports entre les divers intervenants en santé. En séparant l'État payeur des dispensateurs de services, nous voudrons créer une dynamique unificatrice plutôt que la traditionnelle façon de gérer dans laquelle diviser pour régner est le modus operandi habituel. Présentement, plus les forces en présence sont divisées, meilleures sont les chances pour le Ministère d'arriver à ses fins.

Si le médecin ou l'infirmière d'aujourd'hui jouissaient encore de la même réputation que durant les années 1960, aucun ministère ne pourrait leur refuser quoi que ce soit sans que la population ne déclenche une émeute. Les divisions actuelles au sein des groupes en causes: médecins contre infirmières, médecins spécialistes contre médecins omnipraticiens, secteur public contre secteur privé, etc., ont entaché lourdement l'image de ceux qui nous soignent, au profit du système de santé uniquement administré par un gouvernement transposé en défenseur de la veuve et de l'orphelin. Le bon docteur (et tout autre professionnel de la santé) est devenu le méchant loup et le Ministère s'est identifié comme le protecteur du citoyen.

Santé-Québec sera pensé, formé et géré par tous ces groupes qui aujourd'hui s'affrontent. Il leur reviendra de décider des plans et objectifs de leur système de santé et de les appliquer par la suite. Nous avons ici une armée de professionnels, de médecins, d'infirmières et d'infirmiers qui ont à cœur la santé de leurs patients. Nous avons des gestionnaires de haut calibre capable de contribuer à encadrer et, surtout, à augmenter l'accès aux soins. Et nous avons des hauts fonctionnaires aguerris et compétents, capables d'une vision d'ensemble du présent et futur de la population québécoise. L'unification de toutes ces personnes de bonne foi vers un objectif commun ne peut que permettre un nouvel envol d'un système adapté aux besoins actuels et futurs en termes de santé de notre société.

L'ère des revendications sera remplacée par celle de la collaboration individuelle dans un objectif commun. Ceci peut sembler à première vue utopique, mais il n'en est rien. L'ère de l'attente d'une décision venant d'en haut pour améliorer le système de santé est révolue. La santé, c'est l'affaire du citoyen et des intervenants.

Au début des années 2000, j'ai eu le privilège de travailler avec la psychiatre Suzanne Lamarre, auteure du livre Aider sans nuire, de la victimisation à la collaboration, publié aux éditions Lescop. L'auteure me résumait ainsi une partie de son ouvrage: selon elle, en termes de relations humaines, l'histoire affichait trois grandes périodes, la première étant celle du dominant/dominé, le plus fort établissant une loi et en échange du respect de celle-ci, accordant sa protection au plus faible; la deuxième ère fut celle de la négociation où les plus faibles s'étant renforcés, ils peuvent faire part de leurs requêtes aux plus forts et, suite à une négociation, les voir acceptées ou refusées en tout ou en parties; en cas de refus, il y a retour à l'ère du dominant/dominé et... le plus fort l'emporte.

Avec l'arrivée de l'ère de la communication, une troisième voie s'ouvrira: ce sera celle de la coopération. Deux individus ou des groupes d'individus décident d'unir leurs efforts dans le but d'atteindre un objectif commun. Dans ce nouvel ordre, chacun établit ses objectifs individuels et les soumet à l'autre pour former une communauté dans un but recherché. Une fois l'objectif atteint, chacun est libre de se retirer ou de continuer l'association vers d'autres objectifs communs. Dans un tel contexte, lorsqu'il y a problème, on peut toujours revenir alors à la formule de négociation avant de se retrouver à l'étape dominant/dominé.

C'est dans cette ère que veut entrer Santé-Québec, une gestion de la santé qui se réclame de la coopération: coopération entre les divers professionnels de la santé, coopération entre ceux-ci et les gestionnaires, coopération entre les gestionnaires et les fonctionnaires d'État et coopération entre ces divers intervenants et la population qui, d'une part, a besoin de soins de qualité et qui, d'autre part, n'exigera plus l'impossible, car elle participera aussi à la gestion de Santé-Québec. (Réf. : Jacques Beaulieu, avec la collaboration des docteurs Robert Ouellet et Alban Perrier, Révolutionner les soins de santé. C'est possible !, Éditions Trois-Pistoles, 2012, p.: 136-139).

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Mai 2017

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