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De l'amour du pouvoir au pouvoir de l'amour: l'égalité entre les femmes et les hommes sauvera le monde

Pour que nous comprenions davantage l'enjeu de l'égalité des sexes, il est essentiel de connaître l'histoire des relations entre les femmes et les hommes.
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Saviez-vous que la première femme d'Adam n'était pas Ève? Saviez-vous qu'avant d'avoir un Dieu le père, nous avons prié une Déesse mère? Pour que nous comprenions davantage l'enjeu de l'égalité des sexes, il est essentiel de connaître l'histoire des relations entre les femmes et les hommes.

Je suis une entrepreneuse sociale depuis presque 30 ans. J'ai créé beaucoup d'événements et de médias dans le domaine de l'éducation, de l'emploi et de l'économie. Par mon éducation et mes réalisations professionnelles, je n'avais pas conscience qu'il pouvait y avoir des limites propres à mon genre, les femmes.

C'est une forme d'inconscience qui est partagée par la plupart des femmes. Nous sommes portées par l'apparente victoire des féministes qui nous ont précédés. Leurs combats paraissent désormais d'arrière-garde et nous pensons que cette étiquette de revendication ne sert pas notre capacité de séduction. Il est indéniable que dans notre partie du monde, nous avons acquis les mêmes droits, et que toute discrimination sur base du sexe est désormais interdite. Mais est-ce pour autant que nous sommes vraiment les égales des hommes?

Chaque femme porte en elle les stigmates de la longue histoire des femmes. La connaissance de cette histoire est fondamentale pour comprendre nos peurs et nos difficultés de relations avec les autres femmes et avec les hommes. Notre véritable liberté à tous passe par la prise de conscience que nos valeurs, nos comportements et nos croyances sont le résultat de l'histoire de l'humanité. C'est alors que nous pouvons les remettre en question et nous forger notre propre opinion. Mais tout un pan de l'histoire de l'humanité est englouti. Seule l'histoire du patriarcat sera présentée à tous comme la seule et unique Histoire officielle.

Dieu était une femme

Cela fait très peu de temps que les archéologues ont découverts que les statuettes datant des 20 000 ans de la préhistoire n'étaient pas utilisées pour des rituels de la fertilité, mais représentait la Déesse mère, celle considérée à l'origine de toute la création. Plus on l'étudie et plus on s'aperçoit que cette religion a couvert une époque longue et complexe d'un type de civilisation très différent du nôtre. On estime que le culte de la Déesse mère perdure entre 25 000 ans av. J.-C. jusque 7 000 ans av. J.-C. . Vient ensuite une période avec plusieurs déesses qui côtoient plusieurs dieux. C'est l'Empire romain qui fermera les derniers temples vers l'an 500.

L'ignorance de cette partie de notre histoire et la façon dont on la traite reflètent le conditionnement dans lequel nous vivons qui est un monde dominé par les hommes et par un Dieu Père depuis 2 000 ans.

,Mais pourquoi a-t-on adoré une femme aux débuts des temps?

Il semble qu'à l'époque ils n'aient pas compris le lien entre l'acte sexuel et la fertilité. Il n'y avait donc pas de filiation par le père. Les enfants prenaient le nom du clan de la mère. C'est ce que l'on appelle une société matrilinéaire et non matriarcale qui implique une forme de domination. La femme était donc vénérée pour sa capacité à donner la vie. La sexualité était vécue comme sacrée et n'était pas exclusive. Les religions qui ont suivi ont toutes coupé le sexe de la spiritualité.

Dès lors que les hommes ont compris leur rôle dans la procréation, le concept de virginité et de fidélité est né. Ils ont alors créé son écrin : le mariage ! Les hommes se sont ainsi approprié le ventre des femmes et par conséquent les enfants à qui ils transmettaient leurs terres et leurs biens. Derrière la façade morale et religieuse se jouait un enjeu économique qui allait leur octroyer le pouvoir.

Au fur et à mesure du temps, les déesses ont dû prendre des maris. D'abord plus petits en taille et en importance, ils ont vite acquis la première place. De la conception d'un Dieu placé au-dessus des autres dieux parce qu'il est le plus fort, on arrive à la conception d'un Dieu unique, père de la création. L'arrivée d'un Dieu unique et mâle va aller de pair avec la création d'une femme comme créature secondaire servant à distraire le premier homme. La toute-puissance de la paternité interdit désormais le plaisir féminin qui est bien trop dangereux pour la fidélité.

La femme de l'époque de la Déesse mère était honorée par les hommes et se considérait comme un être à part entière qui n'avait rien à envier aux hommes. Ce climat était évidemment favorable à sa confiance en elle et à son épanouissement. Sans doute sommes-nous loin encore aujourd'hui d'avoir reconquis ces conditions intérieures malgré l'égalité de nos droits.

Ève est-elle vraiment la première femme d'Adam dans les écritures?

Voici ce qu'on lit dans le Zohar: "Lorsque Jéhovah créa Adam, il créa en même temps une femme, Lilith, comme lui tirée de la terre. Elle fut donnée à Adam comme épouse. Mais il survint une brouille dans le ménage, pour une question qui devant les tribunaux ne pourrait se débattre qu'à huit clos." La dispute était donc d'ordre sexuel. Lilith refusait d'être constamment sous Adam pendant l'acte sexuel. Lilith réclamait l'égalité. Adam la lui nia. Elle est donc partie. La menace de tuer cent de ses enfants par jour ne la fit par revenir. A partir de là, Lilith symbolise la puissance féminine maléfique, démon aux longs cheveux, avec des ailes, un corps de serpent et des griffes. Il fallait bien associer la liberté de la femme à une image terrifiante pour que l'homme et la femme la repoussent à jamais.

Une autre représentation essentielle pour la création de l'identité des femmes est la Vierge Marie. La Vierge est la servante et la mère de Dieu. Avec elle, on crée un modèle totalement inaccessible de soumission et de procréation sans sexe.

L'histoire collective marque profondément nos destins individuels

Celui qui détient le pouvoir économique détient aussi le pouvoir et la liberté. Ces 5 000 dernières années ont été des millénaires de souffrance pour les femmes puisqu'elles faisaient partie des biens de propriété de leur père et puis de leur mari. Un bien que l'on peut vendre et échanger. C'est encore comme cela dans une grande partie du monde. La peur des femmes a suscité un féminicide terrifiant qui se traduit encore aujourd'hui par les viols et la violence conjugale. Mais le combat a probablement une origine plus archaïque. Il s'agit de la lutte contre la Déesse mère pour prendre le pouvoir.

Chaque femme porte la trace de cet asservissement. Qu'elles en aient conscience ou non, les femmes sont encore complètement imprégnées d'un sentiment d'infériorité, de dépendance et de soumission, qu'elles ont toutes intériorisé même si elles s'en défendent et même si elles se révoltent. Nous avons le mépris de notre propre sexe. Nous sommes souvent des juges impitoyables de nous-mêmes et des autres femmes.

La femme vit encore souvent l'homme comme un oppresseur dont elle est la victime parce qu'elle s'efforce de le satisfaire, parce qu'elle tourne autour de ses besoins parce qu'elle veut se rendre indispensable pour se faire aimer. L'homme est victime de cette situation dégradée tout autant que la femme.

La plupart des hommes et des femmes sont encore en guerre

La femme tient souvent la position de victime et l'homme reste l'oppresseur. Le droit de vote, le droit de disposer de son corps et la contraception sont des étapes indispensables à l'indépendance de la femme. L'équation femme = mère disparaît. L'homme n'a plus le contrôle sur la sexualité de la femme. La femme reprend la maîtrise de la procréation. C'est la condition sine qua non pour son nouvel épanouissement.

Depuis les années 80, de plus en plus de femmes partent à la reconquête de leur estime de soi en se battant comme les hommes tout en gardant leur féminité extérieure. Elles deviennent aussi performantes économiquement, mais gardent la plupart des tâches domestiques et familiales à leur charge, s'épuisant littéralement. Les femmes jouissent de moins de temps libre que les hommes et dorment beaucoup moins.

Beaucoup de femmes dépensent énormément d'énergie pour correspondre à un idéal de beauté, pour séduire. Elles courent après la perfection physique, mais aussi pour remplir à la perfection tous les rôles. Mais cette recherche d'équilibre dans la perfection et la séduction prend énormément de temps et d'énergie. Elles sont alors trop peu à avoir assez d'élan et d'audace pour créer de grands projets ou pour innover. Ce manque de force s'ajoute aux stéréotypes auxquels les femmes doivent faire face. On leur demande toujours de faire leurs preuves bien plus qu'aux hommes. Leur légitimité n'est pas automatique. Elles tentent donc constamment de se persuader et de persuader leur entourage de leur valeur au travail comme à la maison.

Les femmes ont quelque chose en plus à reconquérir que leurs droits. Il s'agit de leur fierté et de leur dignité. Elles doivent reconquérir leur pouvoir intérieur, ce que j'appelle la puissance. La révolte n'est encore que l'expression d'un rapport de force. La femme doit trouver la voie de son affirmation sereine, de son identité intérieure. Pour trouver l'amour de soi, il faut arrêter de se sentir rivale des autres femmes dans la séduction à l'égard de l'homme. Il faut rentrer dans des relations de sororité avec les autres femmes.

Une nouvelle façon de penser est essentielle si l'humanité veut vivre

Une des conséquences de la domination des hommes est la disparition ou la dévalorisation des valeurs féminines. La guerre, le pouvoir, l'argent, le sexe coupable et brutal mènent le monde. Les hommes aussi souffrent. Ils souffrent des dégâts que cela génère et ils souffrent parce qu'ils sont coupés de leur féminité intérieure. L'évolution de l'un passe par l'évolution de l'autre.

Dans nos pays, nous sommes au crépuscule du patriarcat. Si enfin une femme vaut un homme, il est urgent que les valeurs du féminin (émotion, vulnérabilité, communication, ..) aient autant d'importance que les valeurs du masculin (intellect, force, compétition, ..). La réconciliation entre nos dimensions masculine et féminine fera naître notre puissance et notre réussite individuelle et collective.

Passer de la domination ou de la compétition à la coopération entre les hommes et les femmes, c'est le prochain saut de civilisation. " Il est temps de passer de l'amour du pouvoir au pouvoir de l'amour" ("La femme solaire" de Paule Salomon)

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