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À force de vouloir devenir, on oublie d'être

Ce matin, une question me taraudait: «Qu'est-ce que je pourrais bien écrire comme billet qu'ils (c'est vous, ça, chers lecteurs) pourraient aimer?».
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Ce matin, une question me taraudait: «Qu'est-ce que je pourrais bien écrire comme billet qu'ils (c'est vous, ça, chers lecteurs) pourraient aimer?».

Puis, je me suis ravisée pour une simple raison: je n'ai jamais écrit ainsi. Je n'ai jamais écrit pour plaire, pour faire plaisir. Oui, je suis très égoïste; j'écris pour moi.

Un membre de la famille m'a déjà d'ailleurs dit que l'écriture était un processus égoïste qui devient altruiste lorsque son fruit est lu par autrui.

Alors, je me suis plutôt demandé ce que j'avais envie d'écrire, ce qui m'avait touchée, interpellée que j'aurais bien envie de rapporter ici, dans cette chronique.

Et j'ai réalisé que ces questions se rapportent non seulement au processus d'écriture, mais à celui de vivre.

Pensez-y bien; ne devrait-on pas agir en fonction de ce qu'on veut viscéralement faire, exprimer ce qu'on veut fondamentalement dire plutôt qu'en fonction de ce qu'on pense que les autres attendent de nous?

Quand on adopte des faits et gestes pour plaire, parce qu'on anticipe que c'est ce qui est attendu, on se ment à soi-même... et aux autres, par le fait même. On s'éloigne de qui on est réellement pour «faire comme si». Plusieurs d'entre nous adoptent ce type de comportements parce qu'ils se connaissent trop peu, au fond. D'autres encore ont peur du jugement, de se faire rejeter ou du moins, de ne pas se faire accepter. Ça fait moins mal de se faire critiquer sur un personnage (un masque, une carapace, etc.) que sur soi-même, non? Mais l'amour que les gens portent à notre image nous touche moins, forcément, puisqu'il est destiné à quelqu'un qu'on n'est pas. On tente d'entrer dans un moule, dans un idéal qui ne nous convient pas; et c'est à ce moment qu'on est malheureux.

Et c'est ainsi que se creuse le fossé entre le soi réel et le soi idéal; le premier concept renvoie à ce qu'on est, avec nos forces, nos limites et nos besoins. Le second concept renvoie à ce qu'on voudrait être ou encore, à ce qu'on pense que les autres veulent qu'on soit. On entretient cette image un certain temps puis, à un moment ou à un autre, la vérité nous rattrape. On devient conscient que ce qu'on est; que ce qu'on ressent profondément est en conflit avec ce qu'on projette. Et on se sent pris au piège: ça fait si longtemps qu'on laisse miroiter une personnalité aux autres, à soi. Comment faire alors, pour redevenir soi, retrouver son soi réel?

La lucidité fait mal. Et notre corps se fait un devoir de nous le rappeler en nous faisant ressentir moult inconforts. Un professeur à l'Université avait déjà dit: «Ce qu'on ne peut exprimer en mots... notre corps s'en charge!».

D'ailleurs, une amie ostéopathe me disait qu'elle recevait plusieurs personnes souffrant de maux divers qui, au final, ne trouvaient pas réellement leurs sources dans un dysfonctionnement physique. Mais plutôt dans un dérèglement psychique. Une incohérence entre le soi réel et celui dont on croit que les autres attendent. Elle identifiait aussi qu'à partir du moment où ses patients réalisent cette discordance, les maux physiques se font moins intenses, moins fréquents, jusqu'à disparaitre dans plusieurs des cas.

Plusieurs d'entre nous luttent: contre soi, contre nos vulnérabilités qu'on méprend pour des faiblesses, contre nos imperfections. C'est pourtant ce qui nous rend uniques, nos imperfections. Pourquoi vouloir s'en défaire, faire comme si elles n'y étaient pas? Suffit de se laisser aller, de s'écouter, sans jugement.

Comme dirait mon prof de yoga lorsqu'on commence le cours, en position du lotus, les yeux fermés: «Observez comment vous vous sentez. Comme ça, sans jugement. Et acceptez.».

J'ai souvent l'impression qu'à force de vouloir devenir, on oublie d'être. Soyons, tout simplement.

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