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Nadeau-Dubois: une démission à point nommé

En pleine saison électorale, Nadeau-Dubois quitte donc le devant de la scène et je dois dire que c'est tant mieux! Après avoir été outrageusement diabolisé par le gouvernement Charest, ce qu'il déplore à juste titre, Nadeau-Dubois vient de retirer une carte importante d'entre les mains du premier ministre: en s'évacuant du débat public, il vient peut-être de poser le geste le plus habile (sans le vouloir?) de cette jeune campagne électorale.
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Gabriel Nadeau-Dubois a annoncé ce matin, par une lettre aux militants et membres de la CLASSE dans les pages du Devoir, son retrait du poste de porte-parole de l'association étudiante. En pleine saison électorale, Nadeau-Dubois quitte donc le devant de la scène et je dois dire que c'est tant mieux! Tant mieux pour lui-même, personnellement : il pourra enfin s'extirper du jeu médiatique auquel il a été astreint ces derniers mois et qui comporte son lot d'exigences. Nul ne peut réaliser en effet le poids des horaires auxquels les jeunes leaders étudiants ont été confrontés, eux qui ont bien souvent eu des horaires de politiciens en campagne et ce ... quatre mois durant! Tant mieux également d'un point de vue politique. Après avoir été outrageusement diabolisé par le gouvernement Charest, ce qu'il déplore à juste titre, Nadeau-Dubois vient de retirer une carte importante d'entre les mains du premier ministre: en s'évacuant du débat public, il vient peut-être de poser le geste le plus habile (sans le vouloir?) de cette jeune campagne électorale.

De jeune premier à ennemi public

Tant et aussi longtemps que Nadeau-Dubois demeurait dans le paysage médiatique québécois, il représentait malgré lui l'épouvantail parfait à agiter auprès de l'électorat québécois. Non pas que sa personne soit un enjeu dans cette campagne, mais avec une rentrée scolaire qui s'annonce mouvementée dans les prochains jours, le premier ministre aurait eu beau jeu de reprendre ses mêmes rangaines en pointant Nadeau-Dubois afin de mieux mettre en valeur sa propre « modération ». Pauline Marois y est quant à elle arrivée à force de souffler le chaud et le froid à propos de la grève étudiante, en plus de s'adjoindre un jeune leader un peu plus aseptisé que ne l'est le porte-parole démissionnaire de la CLASSE. En effet, ce dernier en fut bon pour ses frais tout au long du conflit, lui que plusieurs ont tenté de démoniser sur toutes les tribunes. Peut-être en raison de sa propension à aller au front ou à refuser de tenir un discours visant le consensus centriste auquel l'on nous a depuis longtemps habitués, Nadeau-Dubois fut dépeint en terroriste sous les traits de Ben Laden par le caricaturiste YGreck, alors que le politologue Christian Dufour affirmait quant à lui qu'il maniait un discours de « batteur, d'abuseur de femmes ». Le ministre de la Sécurité publique allait en rajouter une nouvelle couche, lançant que le porte-parole étudiant était responsable des débordements violents occasionnés par certaines manifestations. Normand Lester ne sera pas non plus en reste, lui qui à défaut de nous démontrer que Nadeau-Dubois était un agent infiltré de l'ex-KGB, poussera la démagogie à un nouveau sommet en considérant que la CLASSE marchait désormais, à la suite de la publication du manifeste de l'association en juillet 2012, dans les pas de Benito Mussolini. Une fois la poussière de ce conflit retombée et au-delà de la seule personnalité de GND, il nous faudra nous pencher collectivement sur l'état de nos médias et de nos forums publics. Comment en est-on arrivés là et surtout, comment a-t-on pu accepter pareil niveau de démagogie sous la plume de nos chroniqueurs et dans la bouche de nos dirigeants? Tant d'exagération et de haine pour un seul étudiant d'à peine vingt-et-un ans ...

Beaucoup vont déplorer le départ de l'ex-porte-parole dans les prochains jours. En effet, sa pugnacité aura été un atout tout au long de cette grève, quoi qu'en pense la classe politique, et elle risque bien de laisser un vide important à combler. Mais, Gabriel Nadeau-Dubois n'est pas irremplaçable. Il n'était pas le « dirigeant » ou le « leader » de cette grève, pas plus que les étudiants n'étaient les « militants » de Nadeau-Dubois. Ne lui dressons pas un panégyrique, lui qui précisément a su se montrer plutôt humble dans sa lettre de départ. S'il est chanceux, il s'évitera de se voir affliger une chanson d'adieu aux airs sirupeux ... Voyez-vous, et c'est ce qui me rassure dans tout ceci, GND semble être fait d'une pâte bien particulière. Vous ne risquez pas de le retrouver sur les rangs d'un grand parti politique, à jouer les hocheurs de tête tout en mettant de côté son sens critique, ligne de parti oblige! Non. N'empêche que son départ représente une bien mauvaise nouvelle pour Jean Charest qui pouvait peut-être espérer relancer sa campagne sur le durcissement - probable ou non - du conflit étudiant. La démission de l'ancien porte-parole est peut-être aujourd'hui plus utile, d'un point de vue stratégique et politique, que tout ce que son ancien homologue, devenu péquiste, réussira à accomplir dans les prochains mois...

Nadeau-Dubois a eu le bon sens de comprendre que la notoriété médiatique ne peut remplacer la pertinence que seules confèrent une réelle réflexion et l'expérience de la vie. Qu'il rentre à l'université, qu'il se confronte à la pensée des monuments de l'histoire, de la philosophie, de la sociologie. Qu'il affine ses convictions et son regard sur notre société et il n'en sera que plus pertinent encore. Le vrai travail débutera lorsque nous devrons commencer à mesurer les réels problèmes mis en exergue par le Printemps érable. À ce moment, il devra répondre présent. D'ici là, bonne chance et bon vent!

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